ÉROSION DU LITTORAL
Article modifié le
L’érosion du littoral est un phénomène qui suscite à la fois la crainte et le défi chez les populations qui y sont exposées. Crainte, car elle représente une menace importante pour les personnes et les enjeux économiques de la frange côtière. Défi, tant les sociétés côtières sont attachées à leur cadre de vie, soit parce qu’il leur est essentiel pour subvenir à leurs besoins, soit du fait de l’agrément qu’il leur procure, et acceptent mal qu’il ne puisse pas à tout prix être préservé. Ainsi, il est encore souvent préféré de protéger les côtes au prix de coûteux ouvrages de défense qui souvent ont des effets collatéraux, voire sont accélérateurs du phénomène érosif.
Les mécanismes de l’érosion du littoral
Les facteurs naturels
Les côtes basses sableuses
Dans la zone littorale, la houle, par les courants qu’elle génère, est le principal agent responsable des mouvements ou transports de sédiments. Son déferlement à la côte induit : des courants du large vers la côte ou courants d’entraînement ; des courants de la côte vers le large, ou courants de retour et courants sagittaux ; un courant parallèle à la côte, ou dérive littorale. Ces courants entraînent avec eux les sédiments (transport ou transit sédimentaire), de manière plus ou moins importante suivant leur vitesse et l’étendue de leur action. La dérive littorale est un mode de transport prédominant sur les plages. Elle contrôle leur morphologie et détermine en grande partie l’érosion, l’accrétion ou la stabilité de la côte.
Les courants liés à la marée contribuent au transport sédimentaire, mais le plus souvent dans une mesure moindre comparativement aux autres courants. Leur influence est en revanche importante dans les estuaires, dans les lagunes en communication avec la mer et dans les passages étroits.
Le vent, outre le fait qu’il génère les houles (par son action au large), les vagues et le clapot (par son action plus locale), est également un agent du transport des sédiments. Il est le facteur des échanges aériens de sédiments entre la plage et la dune, essentiels pour le maintien de l’équilibre du système.
Les variations du niveau marin au fil des temps géologiques, liées soit à des variations climatiques importantes (glaciations/déglaciations), soit à des phénomènes d’origine tectonique (mouvements verticaux de l’écorce terrestre), contribuent à induire sur le long terme une tendance soit à l’érosion des côtes (élévation du niveau marin), soit à leur accrétion.
D’un point de vue morphologique et en fonction des paramètres marins (caractéristiques des houles, vents), la côte est naturellement découpée en secteurs homogènes. Dans ces cellules hydro-sédimentaires, il s’est instauré au fil du temps, au gré des marées et des tempêtes sur les plages, un certain équilibre entre les apports de sédiments à la côte, par les fleuves principalement, et les départs de sédiments vers le large ou latéralement. Mais cet équilibre peut cependant être perturbé, voire fondamentalement modifié, si les tempêtes se font plus violentes et/ou plus fréquentes, ou si les apports de sédiments se font moins abondants. Ainsi, des phénomènes d’érosion apparaissent naturellement sur les côtes soit de manière saisonnière (en hiver), soit de manière plus pérenne lorsque le déséquilibre se maintient durablement.
Les côtes rocheuses
Pour les côtes rocheuses, les facteurs favorisant l’érosion sont principalement liés à la nature des roches et à leur structure. Ainsi, les roches telles que la craie, le grès, le tuf, sont mécaniquement peu résistantes et donc plus sensibles à l’érosion. Les roches dures (telles que le granite, le gneiss, le schiste), si elles sont parcourues de nombreuses fractures ou bien si elles sont fortement altérées, sont également plus vulnérables que les roches saines et massives.
L’érosion des falaises côtières est réalisée par une combinaison de facteurs, continentaux pour l’essentiel et marins dans une moindre mesure. La nappe phréatique joue un rôle important dans l’instabilité des terrains, et les variations de la pluviométrie et le gel sont de ce fait des facteurs à prendre en compte. Les facteurs marins, la houle, les vagues contribuent par leur action mécanique au déblaiement des éboulis au pied des falaises ainsi qu’à la fatigue des matériaux et à l’évolution de la fracturation sous l’effet du choc frontal du déferlement sur la paroi. Dans certains cas, un creusement en pied de falaise apparaît (sous-cavage), pouvant la déstabiliser.
Les facteurs anthropiques
Outre des facteurs naturels, les activités humaines peuvent influer sur l’évolution du littoral et provoquer l’apparition ou l’aggravation de phénomènes d’érosion.
Les extractions de sable sur les plages ou sur les fonds du proche littoral, si les sédiments sont prélevés dans des stocks mobilisables par les houles et les vents, peuvent créer un déséquilibre dans le bilan sédimentaire (moins d’apports, plus de départs) et entraîner une érosion des plages du secteur concerné.
Les extractions de sable dans les lits mineurs des fleuves ainsi que le blocage des sédiments au niveau des retenues des barrages contribuent à la diminution des apports de sable à la côte et favorise ainsi l’érosion des plages sableuses.
L’urbanisation, en particulier des zones dunaires, entraîne une perturbation voire un arrêt des échanges de sédiments entre la dune et la plage.
Le piétinement des zones dunaires entraînant la disparition de la végétation fragilise le front dunaire, le rendant plus vulnérable aux actions de la mer, et favorise l’érosion par le vent.
L’installation d’ouvrages de protection contre la mer modifie les courants et leurs interactions, entraînant des perturbations du transport sédimentaire et l’aggravation des phénomènes d’érosion contre lesquels ils sont sensés lutter.
Les émissions de CO2 dans l’atmosphère, à l’origine de changements climatiques, entraînent une remontée du niveau de la mer, induisant une tendance érosive à long terme.
Accédez à l'intégralité de nos articles
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Ywenn DE LA TORRE : directeur du Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) de Guadeloupe
- Éric PALVADEAU : directeur régional du Bureau de recherches géologiques et minières, (B.R.G.M.) Rennes, responsable littoral régional
Classification
Médias
Voir aussi
- NAPPE PHRÉATIQUE
- RÉGLEMENTATION & RÈGLES
- SABLE
- DUNES
- HOULE
- ÉROSION & SÉDIMENTATION LITTORALES
- COURANTS MARINS
- COURANTS DE MARÉE
- PRÉVENTION
- VAGUES
- CORDON LITTORAL
- DÉRIVE LITTORALE
- LIDAR (light detection and ranging)
- MARIN, vent
- CHANGEMENT CLIMATIQUE
- CLIMATIQUES VARIATIONS
- URBANISATION
- DÉFORMATION DES ROCHES
- NIVEAU DES MERS
- TEMPÊTES
- ANTHROPISATION
- GPS (Global Positioning System)
- BATHYMÉTRIE
- SÉDIMENTS TRANSPORT DES
- ÉROSION
- CARBONIQUE GAZ ou DIOXYDE DE CARBONE
- RISQUES NATURELS