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FEUERMANN EMANUEL (1902-1942)

Par sa stature et son aura, Pablo Casals (1876-1973) a quelque peu éclipsé deux autres authentiques génies du violoncelle nés au tout début du xxe siècle, Emanuel Feuermann et Gregor Piatigorsky (1903-1976). Plus sans doute que Casals, Feuermann a pourtant révolutionné la technique de son instrument, à un point tel que l'on a pu dire de lui qu'il était le premier violoncelliste à avoir joué avec l'aisance d'un violoniste.

Le génie foudroyé

Emanuel Feuermann naît le 22 novembre 1902 à Kolomea (Kolomyja en polonais), en Galicie, province qui appartient alors à l'Empire austro-hongrois (cette ville est aujourd'hui Kolomyya, en Ukraine). Il commence ses études musicales avec son père, qui joue du violon et du violoncelle. Enfant prodige du violon, son frère aîné, Zigmund Feuermann (1900-1952), interprète à onze ans à peine des concertos sous la direction d'Arthur Nikisch et de Felix Weingartner ; il se produira ultérieurement avec son frère cadet, notamment dans le Double Concerto pour violon et violoncelle de Brahms. À Vienne, où sa famille se fixe en 1908, Emanuel travaille en privé avec Anton Walter. À neuf ans, il prend des leçons avec Friedrich Buxbaum, premier violoncelliste de l'Orchestre philharmonique de Vienne et membre du prestigieux Quatuor Rosé. En 1912 se produit un événement décisif pour l'orientation de sa carrière : il entend Casals lors de ses débuts à Vienne. Il donne son premier concert public en février 1914, jouant le Deuxième Concerto pour violoncelle de Joseph Haydn avec l'Orchestre philharmonique de Vienne sous la baguette de Weingartner : il n'a que onze ans. Très vite, il va se perfectionner au Conservatoire de Leipzig (1917-1919) auprès de l'incontournable Julius Klengel, qui forme à cette époque l'élite de l'école allemande du violoncelle : Paul Grümmer, futur membre du Quatuor Busch et maître de Nikolaus Harnoncourt, Ludwig Hoelscher, qui jouera en trio avec le pianiste Walter Gieseking et le violoniste Gerhard Taschner, Alfred Wallenstein, qui sera violoncelle solo de l'Orchestre symphonique de Chicago puis de l'Orchestre philharmonique de New York, et Gregor Piatigorsky, son cadet de quelques mois. En 1919, Feuermann est engagé comme violoncelle solo à l'Orchestre du Gürzenich de Cologne, devient professeur au Conservatoire de cette ville et entre dans le Quatuor du Gürzenich ; il remplace à ces postes le grand Friedrich Grützmacher.

De retour à Vienne en 1923, Feuermann développe sa carrière de soliste, qui s'étend rapidement au monde entier. C'est en mai 1928 et en octobre 1929 qu'il réalise, en deux sessions, ce qui est considéré comme le premier enregistrement commercial du Concerto pour violoncelle de Dvǒrák, avec Michael Taube à la tête de la Staatskapelle de Berlin. Professeur de violoncelle à la Hochschule für Musik de Berlin (1929-1933), où il succède à Hugo Becker, il forme en 1929, avec Joseph Wolfsthal (violon) et le compositeur Paul Hindemith – par ailleurs remarquable altiste –, un trio à cordes qui restera l'un des plus célèbres du xxe siècle. Szymon Goldberg remplacera Wolfsthal à la mort de ce dernier, en 1931 ; c'est cette formation qui crée le 17 mars 1933 le Deuxième Trio pour violon, alto et violoncelle de Paul Hindemith. La profonde amitié qui lie Feuermann à Hindemith prendra malheureusement fin en 1940, lorsque le compositeur allemand confiera la création de son Concerto pour violoncelle – pourtant écrit pour Feuermann – à Piatigorsky. Feuermann, qui est juif, est déchu de toutes ses fonctions par les nazis en 1933. Il effectue ses débuts à New York le 2 janvier 1935, jouant le Deuxième Concerto pour violoncelle de Haydn avec l'Orchestre philharmonique symphonique de New York sous la direction de Bruno Walter. Il se fixe en Suisse, à Zurich (1937-1938),[...]

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Pierre BRETON. FEUERMANN EMANUEL (1902-1942) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )