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ÉCONOMIE SOUTERRAINE

L'expression générique « économie souterraine » regroupe un large éventail d'activités allant des activités légales réalisées illégalement aux activités illégales. Étant donné cette diversité, un recensement des activités souterraines constitue un préalable indispensable à toute tentative de mesure de leur importance par rapport à la richesse produite annuellement au sein d'un pays. Les principales estimations de l'économie souterraine convergent pour se situer à des pourcentages qui atteignent fréquemment 10 p. 100 des P.I.B. officiels dans les pays occidentaux, avoisinent les 50 p. 100 dans les pays en transition et dépassent cette proportion dans beaucoup de pays en développement. L'ampleur de la mesure incite à mieux comprendre le rôle joué par l'économie souterraine vis-à-vis de l'économie officielle.

Les causes et les effets de l'économie souterraine varient avec le degré de développement des économies. Dans les pays industrialisés où la fiscalité est parfois perçue comme excessive, grande est la tentation de s'affranchir de sa participation au financement des biens collectifs. C'est dans cette perspective qu'on peut expliquer, à défaut de les justifier, la fraude fiscale, le travail au noir ou la commercialisation de produits issus de la contrebande. Dans les pays où les contraintes administratives sont perçues comme des freins à l'action, l'exercice parallèle d'activités souterraines peut être un moyen d'évoluer dans un espace de libertés, loin des exigences d'une administration tatillonne. Dans un monde où l'impersonnalité domine les relations sociales, le besoin d'échanges personnalisés et de convivialité pousse parfois à des activités économiques que l'orthodoxie réprouve, mais que la raison n'a aucune peine à comprendre, à justifier, et à favoriser. Dans certains pays en développement où, à l'inverse, les services publics sont défaillants, la fourniture de biens et services nécessaires est fréquemment assurée par des réseaux informels de production, de distribution et d'échanges qui échappent à tout contrôle statistique mais qui rendent des services indispensables à une population au voisinage du seuil de pauvreté.

Les contours de l'économie souterraine

Compte tenu de la nature éminemment éclectique des activités qui composent l'économie souterraine, il y a eu pendant longtemps autant de définitions de celle-ci que d'auteurs. Afin que toutes les études consacrées à ce sujet reposent sur les mêmes bases, une équipe de statisticiens coordonnée par les directeurs des services statistiques de l'O.C.D.E., du F.M.I., de l'O.I.T. et du Comité inter-États pour la statistique de la C.E.I. a publié en 2003 le Manuel sur la mesure de l'économie non observée, dont l'objet est « d'établir une terminologie commune et de donner une assise solide aux mesures de la production économique ». Ce manuel, qui fait autorité, codifie le vocabulaire en matière d'économie souterraine en définissant quatre concepts adoptés depuis lors par la quasi-totalité des chercheurs : la production souterraine ; la production illégale ; la production du secteur informel ; la production des ménages pour leur usage final propre.

La production souterraine

Elle regroupe toutes les activités légales délibérément soustraites au regard des pouvoirs publics pour éviter le paiement d'impôts, de cotisations sociales, pour ne pas avoir à respecter certaines normes comme le salaire minimum, la durée légale du travail, les conditions d'hygiène et de sécurité. Ce sont donc toutes les activités légales réalisées illégalement. Cette production souterraine peut être exercée à petite échelle lorsqu'une personne en emploie une autre de manière occasionnelle pour repeindre un appartement[...]

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Pour citer cet article

Philippe BARTHÉLÉMY. ÉCONOMIE SOUTERRAINE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Culture de la coca - crédits : Alain Labrousse

Culture de la coca

Autres références

  • ASIE (Géographie humaine et régionale) - Espaces et sociétés

    • Écrit par Philippe PELLETIER
    • 23 142 mots
    • 4 médias
    ...delta du Tumen (Chine, Russie, Corée du Nord, avec partenariat sud-coréen et japonais) est en panne. Dans un domaine moins visible se déploie également l'économie cachée des trafics clandestins et illégaux, des pirateries qui fréquentent les détroits (Malacca) ou sillonnent les mers de Chine. Elle se...
  • CONTREFAÇON

    • Écrit par Alain BLANCHOT, Albert CHAVANNE, Daniel HANGARD
    • 9 806 mots
    Enfin, sur le plan social et politique, la contrefaçon fait partie de cette économie souterraine dont un récent rapport parlementaire a montré la nocivité. Non contrôlée, parce que illégale, l'activité contrefactrice va de pair avec le travail au noir, l'exploitation des salariés, en particulier les...
  • CÔTE D'IVOIRE

    • Écrit par Richard BANÉGAS, Universalis, Jean-Fabien STECK
    • 13 572 mots
    • 8 médias
    ...l'industrie représentent respectivement 50 % et 22 % du P.I.B. (2012), mais leur contribution à l'emploi se réalise bien davantage, et de plus en plus, dans l'informel, qui représenterait un quart du P.I.B., que dans le formel : les emplois salariés ne représentent en effet que 17 % des emplois secondaires...
  • DROGUE

    • Écrit par Alain EHRENBERG, Universalis, Olivier JUILLIARD, Alain LABROUSSE
    • 12 156 mots
    • 6 médias
    Lemarché des drogues illicites génèrent des bénéfices très importants qui ont pour origine les particularités liées la fabrication et à l'acheminement des ces produits. Dans le cas de la cocaïne et de l' héroïne, les différentes étapes de la transformation de la matière première – feuilles de coca,...
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Voir aussi