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DIODORE CRONOS (mort en 296 av. J.-C.)

Philosophe de l'école de Mégare, sur l'enseignement duquel nous ne possédons que des témoignages fragmentaires. Comme les autres mégariques, Diodore se situe dans la tradition éléate et cherche, comme Zénon d'Élée, à nier dialectiquement l'existence du mouvement (cf. Sextus Empiricus, Adversus mathematicos, X, 85) : si l'on admet l'existence d'atomes (indivisibles), ces atomes se trouveront en des lieux eux-mêmes indivisibles et ne pourront se mouvoir ni dans le lieu où ils se trouvent (puisqu'ils le remplissent), ni dans un lieu différent (puisqu'ils n'y seront pas encore). Il n'y a donc pas de mouvement, mais mutation brusque, succession d'instantanés (c'est la théorie qu'Aristote critique dans sa Physique, VI, ii, 231 b 18). Le même refus de la notion de virtualité ou de possibilité se retrouve dans le fameux argument imaginé par Diodore, que l'on appelle argument du « dominateur ». Cet argument veut prouver qu'il n'y a que du nécessaire ou de l'impossible. Si je dis : il y aura une bataille navale demain, cette proposition doit être vraie ou fausse. Si elle est vraie, il est nécessaire que cette bataille ait lieu ; si elle est fausse, il est impossible que cette bataille se réalise. Autrement dit, ce qui demain sera vrai ou sera faux doit déjà être vrai ou faux aujourd'hui. C'est encore ce refus de la notion de potentialité que l'on voit s'exercer dans la critique à laquelle Diodore soumet la notion d'ambiguïté. Un mot ne peut pas avoir deux sens en même temps (c'est-à-dire deux sens potentiels). Celui qui le prononce ne lui donne effectivement qu'un sens, celui qui l'entend en fait de même : si locuteur et auditeur ne donnent pas le même sens au mot, il y a obscurité, non ambiguïté.

— Pierre HADOT

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Pour citer cet article

Pierre HADOT. DIODORE CRONOS (mort en 296 av. J.-C.) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • ANTIQUITÉ - Naissance de la philosophie

    • Écrit par Pierre AUBENQUE
    • 11 137 mots
    • 8 médias
    ...situent dans le plaisir, qui est un mouvement, le but de la vie. Moins bien connus, mais non moins importants, sont les mégariques (Euclide de Mégare, Diodore Cronos, Stilpon) qui, dans la tradition à la fois des éléates et de certains sophistes, développent des argumentations rigoureuses pour montrer...
  • LOGIQUE

    • Écrit par Robert BLANCHÉ, Jan SEBESTIK
    • 12 972 mots
    • 3 médias
    ...entre deux propositions à la manière exactement de l'« implication matérielle » des modernes. Pour échapper aux paradoxes qui en résultaient, son maître Diodore Cronos y introduisait une notion modale, mais pour réduire ensuite les nuances modales à de simples différences temporelles ; l'impossible, par...
  • MÉGARIQUE ÉCOLE

    • Écrit par Olivier JUILLIARD
    • 768 mots

    Du chef de l'école de Mégare, Euclide, aucun texte ne nous est parvenu ; l'enseignement du maître et celui de ses successeurs à la tête de l'école, Eubulide, Alexinus, Diodore Cronos, nous sont seulement connus par des allusions et des critiques de Platon, d'Aristote...

  • MODALITÉS, logique

    • Écrit par Pascal ENGEL
    • 7 573 mots
    • 1 média
    ...ultérieurement développée par ceux-ci et par les mégariques, qui cherchent en particulier à définir l'implication en termes modaux. Celle-ci se distingue, pour Diodore Cronos, du conditionnel (implication matérielle) tel que l'interprétait Philon et Mégare (« si p alors q » est vrai si p est faux et...

Voir aussi