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MERCIER DÉSIRÉ JOSEPH (1851-1926)

Archevêque de Malines, l'un des promoteurs du renouveau thomiste dès la fin du xixe siècle, ainsi que du mouvement œcuménique, notamment avec les « Conversations de Malines ». Né à Braine-l'Alleud, gros bourg du Brabant belge, dans une famille catholique aisée, Désiré Joseph Mercier, très tôt orphelin de père, fait ses études au collège Saint-Rombaut de Malines et s'oriente vers la prêtrise en entrant au séminaire en 1868. Il est ordonné en 1874, étudie à l'université de Louvain et devient docteur en théologie (1877) : sa carrière est celle d'un clerc intellectuel promis aux tâches professorales (il enseigne la philosophie au petit séminaire de Malines entre 1877 et 1882).

Pendant ces années de formation, il a rencontré fortuitement la pensée de saint Thomas — alors bien oubliée —, qui va commander la première partie de son existence : il voit dans cette théologie, et surtout dans cette philosophie, l'instrument indispensable pour répondre, sur son terrain, au rationalisme ambiant. Sans le savoir, il rejoint ainsi Léon XIII qui, peu de temps après son élection, propose dans l'encyclique Aeterni Patris (4 août 1879), la pensée de l'Aquinate comme modèle à la chrétienté. Dans le renouveau intellectuel par le thomisme qu'il souhaite promouvoir, Louvain occupe une place de choix : en 1880, il demande aux évêques protecteurs d'y créer une chaire de philosophie thomiste ; elle est confiée, en 1882, au jeune Mercier. L'enthousiasme du professeur et le soutien constant du pontife font de Louvain l'un des centres de la renaissance thomiste qui marque la pensée catholique à la fin du xixe siècle : la fondation de l'Institut supérieur de philosophie et de la société philosophique (1888), celle du séminaire Léon-XIII pour la formation philosophique des prêtres (1892), la parution de la Revue néo-scolastique de philosophie (1894) jalonnent une œuvre qui se trouvera en butte aux manœuvres de l'université d'accueil et de milieux romains désireux de conserver l'apanage et la direction du renouveau.

Cependant, l'appui pontifical ne se dément pas : chanoine honoraire de Malines en 1882, prélat en 1886, Mercier reçoit le siège archiépiscopal belge en 1906 et le chapeau de cardinal l'année suivante. Ce grand professeur se montre aussi un grand pasteur soucieux de la vie spirituelle de son diocèse et prompt à y appuyer toutes les initiatives : il encourage le mouvement liturgique suscité par dom Lambert Beauduin peu avant le conflit mondial. Celui-ci fait de lui le digne héritier des grands « défenseurs de la cité » médiévaux : sa lettre pastorale Patriotisme et endurance (1915), les documents et démarches qui la suivent lui valent l'hostilité des occupants allemands, la méfiance de Rome... et une grande popularité dans les pays de l'Entente, bien au-delà des frontières confessionnelles. Un voyage triomphal aux États-Unis et au Canada (1919) lui permet de mesurer cette audience et de prendre d'utiles contacts en dehors du monde catholique.

C'est à ce personnage phare que lord Halifax et Portal s'adressent tout naturellement lorsque, jugeant la situation favorable, ils souhaitent reprendre le dialogue entre catholiques et anglicans, interrompu depuis 1896. Mercier accepte et ce sont, entre 1921 et 1926, les « Conversations de Malines », auxquelles il participe activement. L'unionisme des dernières années du cardinal Mercier ne se limite pas à l'anglicanisme ; il atteint aussi l'Orient orthodoxe avec l'aide matérielle et morale que le prélat apporte aux émigrés russes et l'appui qu'il assure à dom L. Beauduin pour la fondation du prieuré de l'Union à Amay-sur-Meuse (1925). Mais il n'aura pas le temps de voir les fruits de ces entreprises.

— Étienne FOUILLOUX

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Écrit par

  • : professeur des Universités, professeur d'histoire contemporaine à l'université de Lyon-II-Louis-Lumière

Classification

Pour citer cet article

Étienne FOUILLOUX. MERCIER DÉSIRÉ JOSEPH (1851-1926) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • MALINES CONVERSATIONS DE

    • Écrit par Étienne FOUILLOUX
    • 532 mots

    Série d'entretiens qui se déroulèrent de 1921 à 1926 entre des anglicans et des catholiques et qui, malgré leur échec, illustrent l'histoire de l'œcuménisme.

    L'ébranlement intellectuel et moral provoqué par la Première Guerre mondiale a accéléré le rapprochement entre les Églises...

  • MODERNISME, catholicisme

    • Écrit par Émile POULAT
    • 5 231 mots
    Dans cette foulée, l'université catholique de Fribourg (Suisse) sera un lieu sensible. Celle de Louvain ouvrira une voie originale (Mgr Mercier, futur cardinal et archevêque de Malines ; Mgr Deploige) en cherchant à élaborer une « néo-scolastique » nourrie des progrès des sciences physiques, psychologiques...
  • THOMISME

    • Écrit par Édouard-Henri WÉBER
    • 5 224 mots
    • 1 média
    Mais un double mouvement, tout à fait positif, se dessine. D'une part, à l'Université de Louvain avec le cardinal Mercier (1851-1926), en France à la suite de Bergson, qui met fin au positivisme scientiste, on redécouvre la philosophie. Jacques Maritain s'emploie en pionnier à restaurer un thomisme...