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CHŌSHŪ

Nom d'un fief au Japon sous les Tokugawa, actuellement le département de Yamaguchi. Chōshū était constitué de deux anciennes provinces impériales : Nagato et Suō. Celles-ci n'étaient pas encore d'un seul tenant sous Kamakura, puis elles firent partie du vaste fief conquis par les Ōuchi, shugo-daimyō sous Muromachi. Les Ōuchi furent renversés par les Sue, eux-mêmes remplacés par les Mōri, quelques années plus tard, en 1555. Les Mōri résistèrent à Oda Nobunaga mais, à sa mort, conclurent la paix avec Toyotomi Hideyoshi. Bien qu'alliés des Toyotomi, à la bataille de Sekigahara, ils se virent confirmer par Tokugawa Ieyasu leur fief réduit aux deux provinces de Nagato et de Suō. Ils se sont donc considérés comme redevables aux Tokugawa, jusqu'au milieu du xixe siècle. Cependant, après l'ouverture du Japon au commerce international, en 1859, Chōshū prit conscience de l'importance de sa position stratégique. En effet, les navires étrangers se rendant de Chine à Yokohama passaient le plus souvent par le détroit de Shimonoseki, entre Chōshū, situé à l'extrémité ouest de l'île de Honshū, et l'île de Kyūshū. Dès lors, le gouvernement seigneurial de Chōshū allait tenter de jouer un rôle de premier plan dans la politique du Japon. D'abord ouvert à des projets de commerce extérieur, il s'orienta ensuite vers l'action xénophobe. Chōshū obtint de la cour impériale, en 1863, un édit hostile aux puissances étrangères et, passant outre aux conseils modérés du bakufu (quartier général du commandement suprême), bombarda les navires étrangers circulant dans le détroit de Shimonoseki. Il organisa des compagnies armées qui présentaient parfois un aspect de milice ; quelques-unes d'entre elles marchèrent sur Kyōto, en août 1864, dans l'intention de s'emparer du palais impérial, mais furent repoussées par la garde du bakufu et de Satsuma. En outre, du 5 au 7 septembre suivant, une flotte alliée de la Grande-Bretagne, de la France, des États-Unis et des Pays-Bas bombardait les forts de Chōshū, dans le détroit de Shimonoseki. Enfin, le bakufu décidait une expédition punitive contre Chōshū. Cette fois-là, la guerre civile n'eut pas lieu, grâce à l'entremise de Saigō Takamori, et le gouvernement seigneurial se soumit. Mais une équipe de jeunes officiers se souleva, au début de 1865. Désormais déclaré « fief rebelle » par la cour impériale, Chōshū allait rester politiquement isolé pendant trois ans. D'une part, les officiers qui prirent le pouvoir dans le gouvernement seigneurial abandonnèrent l'attitude xénophobe et, d'autre part, ils se préparèrent à la guerre civile contre le bakufu. Celle-ci eut lieu en 1867 et le bakufu n'évita la défaite qu'en concluant un armistice. Jusqu'alors, bien que très actif, Chōshū n'avait eu qu'un rôle marginal dans la politique générale du Japon. Mais, dès que le bakufu fut renversé, entre janvier et mai 1868, il se trouva au premier plan du nouveau gouvernement impérial. C'est ainsi qu'il fournit un grand nombre de réformateurs au pouvoir de Meiji : entre autres, Kido Takayoshi et Itō Hirobumi, politiciens civils, et Yamagata Aritomo, le fondateur de l'armée impériale moderne. Jusqu'aux années trente, les hommes d'État originaires de Chōshū marquèrent la vie politique du Japon et, surtout, la faction de Chōshū dans l'armée dirigea de fait la politique militaire avec ses chefs, Yamagata Aritomo, Katsura Tarō, Terauchi Masatake et Tanaka Giichi.

— Paul AKAMATSU

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Pour citer cet article

Paul AKAMATSU. CHŌSHŪ [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • ITŌ HIROBUMI (1841-1909)

    • Écrit par Paul AKAMATSU
    • 1 275 mots
    • 1 média

    Fils d'un valet attaché aux armées seigneuriales de Chōshū, Itō Hirobumi ne fut reconnu comme officier qu'en 1863. Il fut disciple de Yoshide Shōin, qui fut l'éducateur de la plupart des réformateurs issus de Chōshū, des premières années de Meiji. Parti clandestinement faire des études à Londres...

  • JAPON (Le territoire et les hommes) - Histoire

    • Écrit par Paul AKAMATSU, Vadime ELISSEEFF, Universalis, Valérie NIQUET, Céline PAJON
    • 44 405 mots
    • 52 médias
    ...extorquèrent du shōgun la décision de chasser les étrangers, « en cas de provocation de la part de ceux-ci », à compter du 25 juin 1863. À cette date, Chōshū, fief situé à l'extrémité ouest de Honshū, fit canonner un navire américain sans défense, de passage dans le détroit de Shimonoseki ; par la suite,...
  • SAIGŌ TAKAMORI (1828-1877)

    • Écrit par Paul AKAMATSU
    • 470 mots

    Homme d'État japonais. Né dans une famille d'humbles officiers de Satsuma, Saigō Takamori bénéficia néanmoins d'une promotion rapide et fut revêtu de missions spéciales par son daimyō pour œuvrer en faveur de l'entrée des daimyō dans le gouvernement shōgunal. C'est ainsi qu'il...

Voir aussi