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REMONTRANCES DROIT DE

Dans la monarchie française, les remontrances ne sont pas tant définies comme un droit que comme un devoir, devoir qui incombe aux parlements et cours souveraines, mais aussi à tous les officiers royaux qui portent d'ailleurs un titre commun, celui de conseiller du roi. C'est au titre de conseillers qu'ils doivent présenter au roi des objections lorsqu'un texte de loi ne leur paraît pas conforme à l'intérêt de l'État ou au bien public, lorsqu'il viole la coutume ou encore lorsqu'il leur paraît contredire une loi antérieure ou être contraire aux lois fondamentales du royaume que le roi ne peut modifier. C'est au xive siècle que le roi de France demanda à son Parlement d'examiner les lois avant de les enregistrer, enregistrement qui était nécessaire pour rendre applicables ordonnances, édits ou règlements, mais ce n'est qu'au xve siècle que le Parlement commença à présenter des remontrances. Le texte jugé irrecevable par la cour des magistrats était renvoyé au roi, accompagné de considérations motivant les réticences et priant le roi de procéder à un nouvel examen de son texte. Si alors le roi le retirait ou l'amendait dans le sens indiqué, le Parlement s'estimait satisfait ; mais le roi pouvait aussi ordonner l'enregistrement sans modifications et le Parlement réitérer ses remontrances jusqu'à ce que le roi vînt en personne procéder à l'enregistrement (lit de justice), retirant ainsi aux magistrats la délégation de pouvoirs dont ils étaient investis. Avec le temps, cette procédure se compliqua, multipliant les remontrances jusqu'à dix fois consécutives avant et même après l'enregistrement. Dès la seconde moitié du xvie siècle, les cours souveraines entrent fréquemment en opposition avec le souverain ; celui-ci s'est entouré d'un conseil qui forme un corps distinct de celui des magistrats et dont il nomme directement les membres, qu'ils soient titulaires ou non d'un office. De ce fait, les cours estiment être lésées dans leurs prérogatives. D'autre part, en temps de guerre ou de troubles, les décisions royales doivent être appliquées rapidement. Une ordonnance de 1559, un édit de 1641, entre autres, limitent et réglementent le droit de remontrances. Mais c'est Louis XIV qui réduit les parlements au silence par l'ordonnance du 20 avril 1667 : ordonnances, règlements, édits et arrêts doivent être enregistrés sans aucun retard et être applicables immédiatement. Le devoir de remontrances est pourtant rappelé, mais réduit à sa plus simple expression. Humiliées, les cours souveraines garderont le silence jusqu'au jour où, le Roi-Soleil étant mort, le Régent, Philippe d'Orléans, leur rendra leurs prérogatives. Dès lors, les magistrats useront sans mesure de ce qui est devenu un droit et feront des remontrances un moyen d'opposition systématique à la monarchie, et ce, avec l'intermède de la réforme Maupeou, jusqu'à la fin de l'Ancien Régime.

— Armel MARIN

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Écrit par

  • : metteur en scène, conseiller en éducation populaire et techniques d'expression

Classification

Pour citer cet article

Armel MARIN. REMONTRANCES DROIT DE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • FRANCE (Histoire et institutions) - L'État monarchique

    • Écrit par Jehan de MALAFOSSE
    • 7 592 mots
    • 1 média
    ...respectif. À l'occasion de cette formalité, un réel contrôle s'exerce sur les actes royaux, pouvant aller jusqu'au refus d'enregistrement motivé dans des «   remontrances ». Certes, le souverain garde toujours le dernier mot. Il dispose, pour ce faire, de tout un arsenal de moyens de pression (lettre de jussion,...
  • LIT DE JUSTICE

    • Écrit par Pierre-Robert LECLERCQ
    • 287 mots

    À l'origine, le lit de justice, ou lit de parement, était le lieu de la chambre royale où le roi recevait lors des séances solennelles. Plus tard, le terme a désigné à la fois le trône du roi au parlement de Paris, quand il y présidait une séance, et la séance elle-même.

    Au milieu...

Voir aussi