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CANOSSA (1077)

Épisode célèbre de la lutte entre le pape Grégoire VII et l'empereur Henri IV. Depuis le milieu du xie siècle, les papes tentent de réformer l'Église pour la débarrasser de la simonie et du nicolaïsme et la soustraire à l'emprise laïque. Ils rompent ainsi avec la tradition constantinienne, reprise par les Carolingiens et les Ottoniens, de collaboration étroite des deux pouvoirs. Or, les empereurs germaniques tiennent à la nomination des évêques, l'un des fondements de leur pouvoir en Germanie et en Italie. D'où l'exaltation théorique par le pape de sa propre puissance, en particulier dans les vingt-sept propositions du Dictatus papae de 1075. La « lutte du sacerdoce et de l'empire » n'est qu'une conséquence politique de la réforme. En février 1075, un synode romain interdit toute investiture laïque pour les ecclésiastiques ; en décembre 1075, Grégoire VII se prononce en faveur de l'archevêque élu de Milan contre les prétentions d'un concurrent nommé par l'empereur. Mais Henri IV, victorieux en Germanie, fait déposer le pape par les évêques allemands réunis à Worms (24 janv. 1076), puis par les évêques lombards réunis à Plaisance. Dans la ligne du Dictatus papae, Grégoire VII répond en déposant Henri IV et en déliant ses sujets de leur serment de fidélité (concile romain de février 1076), ce qui provoque des remous en Germanie : le 16 octobre, à Tribur, les princes invitent le pape à venir juger le roi déchu. Henri IV veut alors devancer les événements : il part pour l'Italie par le Mont-Cenis. Le pape s'est arrêté à Canossa, château de la comtesse Mathilde de Toscane situé au sud-ouest de Reggio d'Émilie ; le roi y arrive le 25 janvier 1077 avec une faible escorte ; pendant trois jours, pieds nus, en costume de pénitent, il implore le pardon du pape, qui se laisse fléchir par Mathilde et par Hugues de Cluny, exigeant seulement de Henri IV un vague serment. Le 13 mars, cependant, Henri IV est déposé par les princes allemands qui élisent pour roi Rodolphe de Souabe. Henri vainc Rodolphe en 1078 et 1080, et Grégoire dépose Henri de nouveau le 7 mars 1080 : Canossa n'a servi pratiquement à rien. L'événement montre, cependant, le changement des rapports entre pape et empereur, qui se manifeste à partir du pontificat de Grégoire VII.

— Jean-Marie MARTIN

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Pour citer cet article

Jean-Marie MARTIN. CANOSSA (1077) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • DICTATUS PAPAE

    • Écrit par Jean-Urbain COMBY
    • 213 mots

    En 1074, le pape Grégoire VII condamne la simonie (trafic des choses saintes et des fonctions ecclésiastiques) et le nicolaïsme (mariage ou concubinage des prêtres). Comme ces réformes sont mal acceptées, le pape pense que le mal vient de l'investiture laïque – la désignation des évêques par les...

  • HENRI IV (1050-1106) empereur germanique (1056-1106)

    • Écrit par Anne BEN KHEMIS
    • 1 011 mots

    Fils de l'empereur Henri III et d'Agnès de Poitiers, élu roi des Romains à trois ans, héritier légitime du trône d'Allemagne, Henri IV était le petit-fils du puissant duc d'Aquitaine qui avait décliné la couronne d'Italie et protégeait Cluny. Le plus grand des abbés de Cluny, Hugues (1049-1109),...

  • INVESTITURES QUERELLE DES

    • Écrit par Marcel PACAUT
    • 477 mots

    Conflit qui, au milieu du xie siècle, éclata entre le pape et l'empereur à propos de la pratique de l'investiture accordée aux évêques par les pouvoirs laïcs (investiture ecclésiastique). Des clercs réformateurs, désireux de lutter contre la simonie dans le clergé et contre le concubinage des...

  • MATHILDE DE TOSCANE (1046-1115)

    • Écrit par Gérard RIPPE
    • 220 mots

    Fille du marquis Boniface de Toscane, épouse, tout d'abord de Geoffroi le Bossu, duc de Lorraine, puis du duc Guelf V de Bavière, Mathilde de Toscane n'eut qu'un enfant, mort en bas âge. Liée aux plus grandes familles de l'Europe féodale, dont celle de l'empereur, la comtesse Mathilde disposait elle-même...

Voir aussi