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BIEDERMEIER, DE L'ARTISANAT AU DESIGN (exposition)

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Historiens de l'art et conservateurs de collections qui ont collaboré au catalogue de l'exposition Biedermeier, de l'artisanat au design. Vienne et Prague 1815-1830 au Musée du Louvre (18 oct. 2007-14 janv. 2008), préalablement présentée à Milwaukee, Berlin et Vienne sous le titre L'Invention de la simplicité, semblent unanimes pour contredire désormais la thèse qui a longtemps présenté le style Biedermeier comme l'expression du goût de la petite bourgeoisie germanique du début du xixe siècle, mis en œuvre par une production industrielle expéditive et bon marché.

Dans le catalogue, Laurie Winters, conservatrice des collections d'art européen du Milwaukee Art Museum, retrace l'historique des expositions et textes consacrés au Biedermeier jusqu'à ce qu'à partir de 1987 « les recherches de Hans Ottomeyer à Berlin, et Christian Witt-Döring à Vienne rappellent que la simplicité et le raffinement du style Biedermeier ont leurs racines dans les commandes aristocratiques et royales de la fin du xviiie siècle », et, comme le précise Christian Witt-Döring, dans un artisanat encore organisé en corporations. Le style Biedermeier émergerait alors avec la différenciation des appartements privés et des espaces officiels, « avec le souci de répondre aux besoins personnels sans désir d'ostentation ». C'est donc l'émergence même de la notion de style Biedermeier à la fin du xixe siècle et son application tardive à la culture et aux arts germaniques de la période antérieure aux révolutions de 1848 qui est ici revue et corrigée. À commencer par son nom emprunté à monsieur Biedermaier, personnage fictif créé en 1855 pour un hebdomadaire satirique, avec les mots Bieder qui désigne péjorativement une modestie sans ambition et Maier qui est l'équivalent de notre monsieur Dupont.

Le Biedermeier est situé par Hans Ottomeyer, directeur général du Deutsches Historisches Museum de Berlin, dans un contexte foncièrement éclectique. Il apparaît dans les appartements privés et dans les cabinets de travail des princes, tandis que le style néo-classique ou Empire et les styles historicistes, néo-Renaissance, néo-gothique, néo-baroque sont propagés par les académies des Beaux-Arts dans les palais officiels. Le style Biedermeier se différencie du style Empire par le refus de l'ornement, la planéité des surfaces, le refus du monumentalisme, le déni du pathos matériel, et également par le refus des matériaux coûteux (marbre, marqueterie, dorures) réservés aux souverains dans les salles d'apparat. Mais ce n'est pas tout, puisqu'il n'est pas sans lien, par exemple, avec le néo-classicisme répandu en France pendant le troisième quart du xviiie siècle. L'écheveau des influences européennes, trop complexe pour être rapporté ici, contredit l'idée qui préside à l'invention de la notion de « style Biedermeier » à la fin du xixe siècle, selon laquelle il est la source d'une ambition nationale. Reste que le style Biedermeier semble « indissociable du contexte politique de la restauration en Europe centrale après les guerres napoléoniennes ». Réaction contre le style Empire, il est également la conséquence d'une économie affaiblie par quinze années de guerre : « les ébénistes sont bien obligés de se contenter des bois indigènes ». Ceux qui s'étonnent de la « modernité » de ce style ne songent pas à faire ce rapprochement : les grandes écoles modernes du design du xxe siècle (Bauhaus et Ulm) ont également été des écoles d'après guerre.

Les auteurs et les commissaires évoquent la simplicité des formes architecturées d'inspiration néo-classique, les couleurs vives notamment dans les tissus et les céramiques, la beauté du matériau (qui n'exclut pas, paradoxalement, les placages ou les imitations de matériaux en trompe[...]

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Écrit par

  • : experte en design à la direction générale de la création artistique, ministère de la Culture et de la Communication, service d'inspection de la création artistique

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Pour citer cet article

Christine COLIN. BIEDERMEIER, DE L'ARTISANAT AU DESIGN (exposition) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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