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GATTI ARMAND (1924-2017)

Possibilisme et déterminisme

En 1977, à Saint-Nazaire, lors d'une exposition-spectacle consacrée aux dissidents soviétiques, Gatti constate l'épuisement du « langage gauchiste ». Partout, l'espérance révolutionnaire reflue. Avec sa « tribu », il part travailler pour plusieurs années à Toulouse. C'est là qu'il systématise son travail avec les « loulous » : son éloignement de l'institution, des expériences malheureuses l'ont convaincu de cesser de faire du théâtre avec des acteurs professionnels. Ses créations, désormais, se feront avec des « exclus » : précaires, prisonniers, drogués, etc. Cela, toutefois, loin de toute volonté d'« animation sociale ». Gatti ne vient ni guérir ni panser les plaies d'une société inégalitaire. Ses recherches en font foi : sans abandonner ses précédentes solidarités, son inspiration (re)découvre de nouveaux continents. D'une part, il revient sur la question du génocide nazi, à laquelle il avait déjà consacré plusieurs pièces dans les années 1960 et un film (L'Enclos, 1960). Qu'est-ce qu'« Auschwitz » a fait au langage et à la pensée ? Comment le dire – et non le représenter – sur une aire de jeu (Le Chant d'amour des alphabets d'Auschwitz, 1993) ? D'autre part, il s'intéresse à la science, à ce que celle-ci transforme dans l'esprit, ébranlant les certitudes, les déterminismes, révélant les infinies possibilités qui bouleversent et l'existence et le monde (Kepler, le langage nécessaire 1994 ; Incertitudes de Weiner Heisenberg, 1999). Son théâtre adopte, dans ses formes, le cheminement d'une pensée, frayant entre science et mémoire une place possible pour les combats du présent. En 1987, Armand Gatti s'installe à Montreuil. En 1999, paraît un « livre-monstre » au titre emblématique, La Parole errante, une autobiographie à l'image de l’œuvre et de l'homme, démesurée, impossible à classifier et portée par une certitude : « Les mots me lisent. »  

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Écrit par

  • : maître de conférences en arts du spectacle à l'université de Strasbourg-II-Marc-Bloch

Classification

Pour citer cet article

Olivier NEVEUX. GATTI ARMAND (1924-2017) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Armand Gatti - crédits : Sophie Bassouls/ Sygma/ Getty Images

Armand Gatti

Autres références

  • DARDENNE JEAN-PIERRE (1951- ) et LUC (1954- )

    • Écrit par Frédéric STRAUSS
    • 1 069 mots
    • 1 média
    Peu après la fin de leurs études secondaires, les deux frères font une rencontre capitale :celle du dramaturge, poète et metteur en scène Armand Gatti. Jean-Pierre, qui suit des cours d'art dramatique à Bruxelles pour devenir comédien, joue dans deux de ses pièces, La Cigogne et La Colonne...
  • LA PROMESSE (J.-P. et L. Dardenne)

    • Écrit par Joël MAGNY
    • 1 331 mots

    La Promesse est arrivée sur les écrans comme surgie de nulle part. Ses auteurs, Jean-Pierre et Luc Dardenne semblaient ne se référer à aucune école particulière, ne se réclamer d'aucun maître et atteindre du premier coup une totale maîtrise de leurs moyens et de leur propos. Venue de nulle part ? En...

  • THÉÂTRE OCCIDENTAL - Le nouveau théâtre

    • Écrit par Bernard DORT
    • 5 451 mots
    • 4 médias
    ...théâtre documentaire (celui de Weiss bien plus que celui de Rolf Hochhuth qu'on a, abusivement, classé dans cette tendance). En France, le travail d'un Armand Gatti, sans être aussi étroitement rattaché à Brecht et à l'exemple du « théâtre épique », allait dans le même sens : l'éclatement des concepts...

Voir aussi