APHRODITE

Naissance d'Aphrodite, face principale du trône Ludovisi

Naissance d'Aphrodite, face principale du trône Ludovisi

Naissance d'Aphrodite, face principale du trône Ludovisi

Naissance d'Aphrodite, face principale du «Trône Ludovisi», 470-460 av. J.-C., relief en marbre.…

Née de Zeus et de Dionè, selon Homère (Iliade, V, 365), la déesse grecque Aphrodite est, selon la tradition hésiodique, surgie de la semence écumeuse jaillie des parties sexuelles d'Ouranos mutilé, que son fils Kronos avait jetées dans la mer (Théogonie, 173 et suiv.). Le flot la porte alors vers Cythère et Chypre (Odyssée, II, 288 ; XVIII, 193), ce qui explique l'hypothèse de l'origine orientale de la déesse (cf. H. Hester, Éléments orientaux dans la religion de la Grèce ancienne). Marine par sa naissance, elle reste pontia et thalassios (Euripide, Hippolyte, 734). Mais l'élément central de cette figure grecque est son pouvoir de séduction ; divinité de l'amour, elle est à la fois celle qui inspire l'éros améchanos (qui peut conduire aux pires folies) et celle à qui l'on doit les « douces œuvres du mariage » (Iliade, V, 429 ; Odyssée, XX, 74), qu'elle partage avec Héra et la conjonction des époux. Apparaît ainsi l'ambiguïté d'Aphrodite, qui, d'un côté bénéfique, est l'Aphrodite de la bonne Peitho et, de l'autre, préside au leurre séducteur de la femme.

Aphrodite de Cnide

Aphrodite de Cnide

Aphrodite de Cnide

Créée par Praxitèle (env. 390-335 av. J.-C.), cette première représentation d'un nu féminin fascina…

Vénus d'Arles

Vénus d'Arles

Vénus d'Arles

Vénus d'Arles, copie romaine d'une œuvre de Praxitèle datée des années 360 av. J.-C. : l'Aphrodite…

Cette ambiguïté est celle-là même de la peithô grecque (cf. M. Detienne, Les Maîtres de vérité dans la Grèce archaïque, Paris, 1967), celle aussi des atours chatoyants et bariolés de son strophion, ceinture qu'elle remet en particulier à Héra, afin que celle-ci séduise Zeus pour le tromper (Dios Apatè, Iliade, XIV, 212 et suiv.). L'ambiguïté d'Aphrodite peut aussi bien protéger l'union conjugale et veiller sur le bonheur des époux (Théocrite, Épigrammes, 13) que devenir l'autre et le contraire des valeurs civiques et matrimoniales ; elle s'avère alors représenter le désordre érotique et la séduction pleine de parfums (cf. M. Detienne, Les Jardins d'Adonis, Paris, 1972 — ouvrage qui, à partir du mythe d'Adonis, qu'il interprète en particulier en termes de code végétal, décrit les axes qui opposent symétriquement à la fête des Adonies celle des Thesmophories, marquées par le jeûne et l'abstinence des femmes athéniennes).

Arès et Aphrodite

Arès et Aphrodite

Arès et Aphrodite

Fils de Zeus et d'Héra, Arès est un dieu guerrier, violent. Souvent représenté avec les armes d'un…

Aphrodite est ainsi le principe nécessaire à la conjonction des époux, par laquelle l'homme assure sa reproduction et qui passe par la séduction et l'intervention d'Éros, son perpétuel compagnon et son fils (Hésiode, Théogonie, 20 et 64 ; Eschyle, Les Suppliantes, 1040) ainsi que par sa charis (puissance de don, d'échange dans la séduction), en même temps qu'une divinité de la ruse (apatè) et de la méchanè (Aphrodite Machanatis dans Pausanias, Description de la Grèce, VII, xxxi, 6). Ce sont les Charites qui, avec les Heures, tissent ses voiles (Iliade, V, 338 ; Hésiode, Théogonie, 64). Elle est le principe primordial de la conjonction amoureuse et de l'union désirée, qui submerge aussi bien les dieux que les hommes (Hymne homérique à Aphrodite, 36, où elle apparaît comme la « déesse qui égare même la raison de Zeus »). « Tout est né d'elle » (Euripide, Hippolyte, 447) et c'est elle qui réveille au printemps les forces reproductrices de la nature avec les Heures (Hymne homérique à Aphrodite, 2, 5 ; Pausanias, V, xv, 3). Elle est la cause première de la fécondation (Eschyle, Danaïdes) et c'est aussi au titre d'eukarpos (Sophocle) et de doritis (Pausanias, I, i, 3) qu'elle châtie Hippolyte d'avoir refusé de se soumettre à ce principe premier de la nature, pour ne se consacrer qu'aux œuvres d'Artémis dans la chasteté, comme on le voit aussi dans Eschyle (Danaïdes). Mais Aphrodite peut, d'autre part, avoir un rôle de principe perturbateur en inspirant des sentiments démesurés et incoercibles (tel l'amour d'Hélène et de Pâris, Odyssée, IV, 261), porteurs d'illusion et d'irréalité, bouleversant l'ordre social de[...]

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    Écrit par

    • Laurence KAHN : docteur en histoire, diplômée d'études supérieures spécialisées en psychopathologie clinique, psychanalyste

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    Pour citer cet article

    Laurence KAHN, « APHRODITE », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le . URL :

    Médias

    Naissance d'Aphrodite, face principale du trône Ludovisi

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    Naissance d'Aphrodite, face principale du trône Ludovisi

    Naissance d'Aphrodite, face principale du «Trône Ludovisi», 470-460 av. J.-C., relief en marbre.…

    Aphrodite de Cnide

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    Créée par Praxitèle (env. 390-335 av. J.-C.), cette première représentation d'un nu féminin fascina…

    Vénus d'Arles

    Vénus d'Arles

    Vénus d'Arles

    Vénus d'Arles, copie romaine d'une œuvre de Praxitèle datée des années 360 av. J.-C. : l'Aphrodite…

    Autres références

    • ADONIS, mythologie

      • Écrit par Marcel DETIENNE
      • 531 mots
      • 1 média

      Smyrna (Myrrha) ayant conçu par tromperie Adonis (Adônis) de son père Théias, roi de Syrie, les dieux la font échapper à la colère paternelle en la changeant en arbuste. Adonis est recueilli par Aphrodite (la phénicienne Ashtart, Astarté), mais il est élevé par Perséphone. Il est blessé mortellement...

    • ANCHISE

      • Écrit par Universalis
      • 95 mots
      • 2 médias

      Personnage de la légende grecque qui appartenait à la branche cadette de la famille royale de Troie. Il gardait ses troupeaux sur le mont Ida où Aphrodite le rencontra et s'éprit de lui, touchée par sa beauté. Elle s'unit à lui et lui donna un fils, Énée. Pour avoir révélé...

    • ATARGATIS

      • Écrit par Universalis
      • 199 mots

      Grande déesse du nord de la Syrie ; son principal sanctuaire se trouvait à Hiérapolis-Bambyce (moderne Membidj) au nord d'Alep, où elle était vénérée avec son parèdre Hadad. Son ancien temple fut reconstruit en ~ 300 environ par la reine Stratonice, et ce fut sans doute en partie grâce à ce patronage...

    • GRÈCE ANTIQUE (Civilisation) - La religion grecque

      • Écrit par André-Jean FESTUGIÈRE, Pierre LÉVÊQUE
      • 17 674 mots
      • 8 médias
      Aphrodite n'est autre que la transposition de la Phénicienne Astarté, une déesse sémitique de l'amour, des énergies vitales, fertilisantes et fécondantes, et de la mer. Les Grecs la connaissent à Chypre, véritable creuset des diverses civilisations de la Méditerranée orientale, où ils placeront...
    • HÉLÈNE DE TROIE

      • Écrit par Barbara CASSIN
      • 370 mots
      • 1 média

      « Le blâme ne peut rétribuer Troyens et Achéens aux bonnes jambières de souffrir de si longs maux autour d'une telle femme : elle ressemble trop terriblement aux déesses immortelles », murmurent les Troyens en voyant Hélène aux bras blancs s'avancer sur leurs remparts (Homère, ...

    • Afficher les 12 références

    Voir aussi