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ḤĀKIM BI-AMR ALLĀH AL- (985-1021) calife fātimide (996-1021)

Sixième calife fāṭimide et personnage central du système religieux druze, tantôt cruel et despotique, tantôt humble, généreux et juste. Les raisons profondes du comportement étrange de Ḥākim restent inexpliquées. Il est proclamé calife en 996, et les premières années de son règne sont fort agitées : guerre avec les Byzantins et troubles intérieurs provoqués par les luttes d'influence entre les troupes berbères et les troupes turques. En 1000, al-Ḥākim fait assassiner son tuteur, Bardjawān ; désormais, il va régner en despote, avec une totale incohérence. Ainsi prend-il des mesures vexatoires à l'égard des juifs et des chrétiens : démolition d'édifices religieux, entre autres celle de l'église du Saint-Sépulcre à Jérusalem, interdiction de célébrer diverses fêtes, exécutions arbitraires ; puis, en 1013, il fait restaurer églises, synagogues et monastères, il autorise même les chrétiens convertis de force à l'islām à retourner à leur religion primitive. Il édicte des mesures antisunnites et, en 1005, lance l'anathème contre les compagnons du Prophète, mais, en 1013, il autorise la restauration des rites sunnites et punit ceux qui insultaient les compagnons. De même, dans le domaine des mœurs, il fait par exemple interdire les instruments de musique, interdire aux chrétiens de boire du vin, interdire à quiconque de se promener la nuit dans les rues, promenades auxquelles lui-même prend grand plaisir. Il n'est pas étonnant que ces divers décrets aient soulevé l'indignation populaire et provoqué de nombreuses révoltes qu'il noie toutes dans le sang. Ces extravagances dans tous les domaines arrivent à leur paroxysme en 1017-1018 : « À ce moment deux Persans, Ḥamza et Darazī (duquel vient le nom : Druze), prêchaient une doctrine d'après laquelle Ḥākim incarnait l'Intellect divin, la plus haute manifestation de Dieu en dehors de son être ineffable : Ḥākim adopta la doctrine et tira une vengeance terrible d'émeutiers soulevés contre elle » (C. Cahen, L'Islam des origines au début de l'Empire ottoman, 1970). Sa mort survenue deux ans plus tard est tout aussi mystérieuse que sa vie : le 13 février 1021, il ne revient pas d'une de ses promenades nocturnes coutumières. On ne retrouva jamais son corps. Le plus vraisemblable est qu'il fut assassiné à l'instigation de sa sœur, Sitt al-mulk, qui craignait elle-même pour sa vie. Depuis ce jour, les Druzes attendent son retour.

— Georges BOHAS

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Écrit par

  • : docteur ès lettres, directeur de l'Institut français d'études arabes de Damas

Classification

Pour citer cet article

Georges BOHAS. ḤĀKIM BI-AMR ALLĀH AL- (985-1021) calife fātimide (996-1021) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • CALIFAT FATIMIDE DU CAIRE - (repères chronologiques)

    • Écrit par Pascal BURESI
    • 332 mots

    969 Djawhar conquiert l'Égypte pour le compte d'al-Mu‘izz, calife fatimide de Kairouan. Il fonde al-Qāhira (« la Victorieuse », Le Caire).

    972 La Grande Mosquée d'al-Azhar, au Caire, est achevée.

    973 Arrivée du calife et installation dans la nouvelle ville palatiale du...

  • DRUZES

    • Écrit par Universalis, Robert MANTRAN
    • 2 148 mots
    • 1 média
    L'origine de la secte druze se situe sous le règne du calife fatimide d'Égypte, al-Ḥākim (996-1021) qui, à la fin de sa vie, prétendit être une incarnation divine. Cette idée fut admise par un certain nombre de fidèles, qui se groupèrent autour de l'un de ses vizirs, al-Darazī ; celui-ci a donné son...
  • ÉGYPTE - L'Égypte arabe

    • Écrit par Gaston WIET
    • 8 924 mots
    • 2 médias
    Le troisième calife, Hakim, monté sur le trône à l'âge de onze ans, se livra bientôt à des fantaisies inquiétantes qui font douter de sa raison : « Toutes ses actions, dit un écrivain arabe, étaient sans motif, et tous les rêves que lui suggérait sa folie n'étaient susceptibles d'aucune interprétation...
  • FĀṬIMIDES

    • Écrit par Gaston WIET
    • 1 282 mots
    • 2 médias
    Une éclipse de cette tolérance envers la communauté chrétienne coïncide avec le règne du calife al-Ḥākim (996-1021) ; fanatique, celui-ci fit démolir l'église du Saint-Sépulcre à Jérusalem. Il se déclara dieu, et les auteurs musulmans rapportent que « tous les rêves que lui suggérait...