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AFL-CIO (American Federation of Labor-Congress of Industrial Organizations)

La fusion

Ainsi, le problème du communisme ne séparait plus l'A.F.L. du C.I.O., ce dernier ayant d'autre part quitté la F.S.M. En outre, le conflit de structures était sinon éliminé, du moins très atténué. En effet, l'A.F.L. avait été amenée par les circonstances à créer certains « syndicats d'industries », et le C.I.O. certains « syndicats de métiers ». Enfin, un conflit de personnes était à son tour écarté : en 1952, George Meany succédait à William Green à la présidence de l'A.F.L., et Walter Reuther prenait la place de Philip Murray à la tête du C.I.O. Trois ans plus tard, la fusion put avoir lieu. Mais les traditions conservatrices représentées par Meany et les traditions de lutte personnalisées en Reuther allaient continuer à entretenir des dissensions à l'intérieur de la centrale unifiée. En 1967, W. Reuther abandonnait la vice-présidence de l'A.F.L.-C.I.O.

La loi Taft-Hartley

L'A.F.L.-C.I.O. se heurte alors à la loi Taft-Hartley qui interdit le closed shop (entreprise fermée aux ouvriers non syndiqués) et exige un vote favorable de la majorité des salariés pour autoriser l'union shop (obligation pour un ouvrier nouvellement embauché d'adhérer au syndicat). De surcroît, le check off (retenue de la cotisation syndicale par l'employeur qui la reverse au syndicat) ne peut être utilisé qu'avec l'assentiment écrit de l'intéressé. Les syndicats perdent le droit de contribuer financièrement à une campagne électorale présidentielle ou législative, mais tournent cet obstacle en créant un Comité pour l'éducation politique. Enfin, et surtout, la loi Taft-Hartley retire aux fonctionnaires le droit de grève et, dans l'industrie privée, soumet la grève à une réglementation stricte : préavis de soixante jours pouvant être prolongé de quatre-vingts jours par décision judiciaire à la demande de l'exécutif. La loi autorise aussi les États de l'Union à voter des right-to-work laws (lois sur le droit au travail) qui limitent encore la liberté d'action syndicale, notamment en interdisant formellement l'union shop. De telles lois ont été votées dans dix-neuf États, où le salaire horaire moyen n'atteint que 70 p. 100 de la norme nationale.

L'évolution technologique

Le syndicalisme américain se trouve aussi confronté à la désindustrialisation et à l'évolution technologique. Des emplois industriels ont été perdus par centaines de milliers depuis les années soixante en raison de l'affaiblissement industriel des États-Unis. Bien des entreprises ont en effet préféré investir à l'étranger, pour bénéficier de moindres coûts salariaux, que dans le pays lui-même. Comme l'ont souligné Barry Bluestone et Bennett Harrison (The De-Industrialization of America, 1982), les investissements directs à l'étranger des grandes entreprises sont passés de 12 milliards de dollars en 1950 à 192 milliards en 1980, alors que les investissements internes ont crû deux fois moins vite, passant de 54 à 400 milliards de dollars dans la même période. Ainsi, bon nombre d'entreprises ont « délocalisé » vers l'étranger la fabrication d'une part de leur production : pour n'en donner qu'un exemple, 30 p. 100 environ des pièces nécessaires à la fabrication d'une voiture américaine seraient dorénavant fabriquées à l'étranger et doivent donc être réimportées. Cette politique d'exportation de l'emploi à l'étranger a évidemment diminué le nombre d'emplois locaux et, par conséquent, de syndiqués. Cette évolution est accentuée par la modernisation de l'industrie : mécanisation, automatisation et robotisation permettent une productivité plus élevée – et nécessitent moins d'hommes. Ainsi a-t-on vu les mines de charbon de l'Ouest, hautement mécanisées, produire en 1981 les deux tiers du charbon extrait avec 72 000 mineurs seulement contre 120 000 à l'Est. Enfin,[...]

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Écrit par

  • : rédacteur en chef du journal "Le Monde diplomatique".
  • : directeur de recherche au Centre d'études et de recherches internationales de la Fondation nationale des sciences politiques

Classification

Pour citer cet article

Claude JULIEN et Marie-France TOINET. AFL-CIO (American Federation of Labor-Congress of Industrial Organizations) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 14/03/2009

Médias

Manifestation de Haymarket - crédits : AKG-images

Manifestation de Haymarket

A.F.L.-C.I.O. : évolution du nombre de syndiqués - crédits : Encyclopædia Universalis France

A.F.L.-C.I.O. : évolution du nombre de syndiqués

Autres références

  • ALTERMONDIALISME

    • Écrit par , et
    • 6 805 mots
    • 1 média
    Aux États-Unis, le syndicalisme, organisé en confédération dans l'AFL-CIO, était présent massivement à Seattle et à Washington. C'est une rupture importante avec une histoire récente où les syndicats restaient centrés sur l'entreprise et se tenaient très proches du Parti démocrate : à la fin...
  • CONFÉDÉRATION INTERNATIONALE DES SYNDICATS LIBRES (CISL)

    • Écrit par
    • 517 mots

    Environ un an après la scission intervenue à la Fédération syndicale mondiale (F.S.M.) en janvier 1949, les organisations qui ont rompu tiennent la conférence constitutive d'une nouvelle Internationale syndicale. L'anticommunisme est commun aux centrales américaine, anglaise et européennes qui...

  • FÉDÉRATION SYNDICALE MONDIALE (FSM)

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    La montée des fascismes avive, à la fin des années 1930, le désir d'unité des forces syndicales à l'échelle mondiale ; aussi l'Internationale syndicale rouge décide-t-elle de disparaître en vue de rejoindre la Fédération syndicale internationale (F.S.I.). Mais survient...

  • GOMPERS SAMUEL (1850-1924)

    • Écrit par
    • 754 mots

    Né à Londres, de parents d'origine hollandaise qui émigrent en 1863 à New York, Samuel Gompers, après avoir suivi jusqu'à l'âge de dix ans des études dans une école libre israélite, devient ouvrier cigarier.

    C'est en travaillant dans les petites entreprises de fabrication de...

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