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CIEL SYMBOLISME DU

La régularité des rythmes

Il n'y a qu'un pas, vite franchi, entre ce symbolisme déjà fort élaboré et celui du ciel comme gnomon, modèle de la « régularité » et de la règle profonde de l'univers ou de la création, car ces astres qui entrent en « conflit », ces luminaires et ces planètes qui dramatisent leur course en des phases, ces « planètes errantes », tout ce monde céleste est en mouvement absolument régulier. La réflexion astrologique fait alors place à la méditation astronomique. Elle n'en est pas moins fortement symbolique : de Platon à Ptolémée, de Ptolémée à Copernic, puis à Kepler, l'idée symbolique qui domine la méditation astronomique est celle de régularité. Pour Platon (Phèdre, Timée) la procession des planètes et des luminaires est le modèle archétypique et « régulier », donc divin, dont les destinées humaines ne sont que les imparfaites copies processionnaires. Pour Kepler, les « aspects », même les plus violemment opposés, constituent une « harmonie », et son système, tel qu'il l'expose à Tycho Brahé, conjoint cinq plans d'harmonie : la géométrie, l'arithmétique, la musique, l'astrologie et l'astronomie, ce dernier étant, grâce à l'expérimentation que Kepler mena en commun avec Tycho Brahé (1600), la « preuve » évidente et merveilleusement empirique de l'harmonie générale.

Ainsi la symbolique générale de la « pausophie » de Paracelse se trouve confirmée par l'astronomie képlérienne : le ciel est le modèle visible, le symbole sensible et mesurable, du principe de toute harmonie, de Dieu créateur. Dès lors, ce symbole de perfection se concrétisera dans la «  coupole » qui surmonte aussi bien le Ming tang chinois que la mosquée musulmane, le temple du Ciel de Rome (Panthéon) ou la basilique byzantine et romane (L. Hautecœur ; G. de Champeaux et dom Sébastien Sterckx) : la coupole repose sur la base quadrangulaire de l'édifice et l'ordonne ; cette base symbolise la terre et ses tensions contradictoires. Cercle, coupole, sphère – que l'on songe à la sphère parménidienne – symbolisent la perfection dans le mouvement, le principe d'harmonie de tout mouvement permettant d'organiser, de classer, de ranger les angles des orients terrestres.

Le Ciel constitue donc bien l'archétype des archétypes, le symbole majeur où se rassemblent, s'originent et s'expliquent tous les êtres et les choses de l'univers d'ici-bas. Il est le modèle gigantesque du nombre et de l'ordre, comme l'avaient bien vu, avant Kepler, les pythagoriciens. C'est le lieu métaphysique par excellence, le réservoir de la Toute-Puissance par son élévation exemplaire, le modèle de tout intelligible par son ordre exemplaire, le lieu de la maîtrise divine sur les destinées et les événements. Aussi, soutenues par ce symbolisme, les philosophies du Ciel sont-elles toujours des philosophies gnomiques, ascétiques, métaphysiques, opposant la pureté de la grâce à l'épaisseur terrestre de la pesanteur et de la chute.

— Gilbert DURAND

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Pour citer cet article

Gilbert DURAND. CIEL SYMBOLISME DU [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • AMATERASU-Ō-MI-KAMI

    • Écrit par René SIEFFERT
    • 858 mots

    Épithète du Soleil dans la mythologie japonaise (R. Sieffert, Les Religions du Japon, Paris, 1968), Amaterasu ō-mi-kami est la « grande auguste divinité qui luit au ciel ». Les chroniques du viiie siècle, Kojiki et Nihon-shoki, en font une divinité féminine, souveraine de la Plaine...

  • ASTROLOGIE

    • Écrit par Jacques HALBRONN
    • 13 311 mots
    ...comportement en rapport avec les significations qui seront données par la suite aux astres : une astrologie sans astres et des astres sans astrologie. L'homme a représenté le ciel à son image et non l'inverse, mais il est clair que, dès lors qu'il existait cinq astres, ou sept avec les luminaires,...
  • AURORE, mythologie

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    Si l'on en croit Hésiode (La Théogonie, 371-374), Aurore ou Èos aux doigts de rose et vêtue de safran est la fille du Titan Hypérion et de la Titanide Théia. Comme son frère Hélios, auquel elle ouvre les portes du ciel et qu'elle accompagne dans sa course, et comme sa sœur Sélénè, elle...

  • CHINOISE (CIVILISATION) - Symbolisme traditionnel et religions populaires

    • Écrit par Maxime KALTENMARK, Michel SOYMIÉ
    • 7 060 mots
    • 2 médias
    Le Ciel, conçu tantôt comme une sphère, tantôt comme un dais de char, est rond par essence, tandis que la Terre qu'il recouvre est carrée. Des colonnes ou des montagnes, situées au pourtour de l'univers, sont tout à la fois des supports du Ciel et des voies qui y accèdent. Ciel et Terre sont les deux...
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