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PINDARE (517 av. J.-C./518-apr. 446 av. J.-C.)

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Images et symboles

Il est banal de parler de Pindare comme d'un grand visuel, voire d'un visionnaire. Cela est loin d'être faux. Mais il y a bien plus. Pour en juger, il faut se replacer dans la perspective religieuse archaïque, au temps où les dieux anthropomorphes n'occupaient pas encore le devant de la scène, où les forces de vie restaient au premier plan, où l'or et la lumière étaient en eux-mêmes sentis comme divins.

L'or et la lumière

Le début de la Ire Olympique à Hiéron, à l'occasion de la victoire du célèbre étalon Phérénikos, met en parallèle l'or avec l'eau, le premier des biens : « L'or, semblable au feu flamboyant, répand son éclat dans la nuit. » La IIIe Olympique, en écho, répond que « l'eau est le premier des biens et l'or la plus noble entre les richesses ». Cette noblesse – faut-il le dire ? – n'a rien de vénal : le terme grec est un terme de vénération, employé pour les dieux et les rois. L'éclat de l'or est constamment associé chez Pindare aux couleurs les plus chaudes, le jaune et le rouge et leurs composés. « Blond » comme la chevelure des dieux et « d'or » ou « doré » sont à peu près synonymes. La pourpre et le safran s'y associent (cf. VIe Olympique), ainsi que l'éclair fulgurant de Zeus. Le souci du pittoresque est amplement dépassé, et l'on est amené à donner leur vraie valeur, une valeur sacrale, aux innombrables épithètes formées sur le nom de l'or, et que la poésie homérique connaît bien, mais avec une valeur affaiblie. Les mythologies de l'Égypte et du Proche-Orient ancien fournissent ici des rapprochements éclairants.

Le symbolisme des métaphores

Si l'on fait une revue rapide des métaphores pindariques, si nombreuses et magnifiques, on est frappé de voir s'établir des séries au symbolisme suggestif, en rapport encore avec les forces sacrées de la vie. Telles les images évoquant le symbolisme vivifiant ou magique de la toison, appliqué à la fleur des guerriers ou à l'éclat de la musique. Telles les métaphores végétales, fleurs éclatantes, verts feuillages figurant le renouvellement des générations humaines ou suggérant l'immortalité divine. Au reste, les couronnes de Delphes ou d'Olympie ne sont-elles pas empruntées à des feuillages pérennes, le laurier, l'olivier ? On connaît le rite de la phyllobolia, feuilles lancées en hommage sur le vainqueur, analogue à l'anthobolia (des fleurs, cette fois) ou à certaines lumières en l'honneur des morts, dont a parlé F. Cumont (Lux perpetua). D'autres images, autour des symboles du nectar et de l'ambroisie, de la coupe ou de l'eau vive, évoquent les boissons et nourritures d'immortalité. Le thème du voyage dans l'autre monde et chez les dieux présente les métaphores des ailes, du char, du navire : char des Muses ou nef Argo s'avancent sur la voie lumineuse du bonheur divin. On ne peut tout énumérer. Mais il est sûr que ces images, orientées dans le sens de la vie intégrale, divine ou cosmique, à l'instar des religions archaïques, du Proche-Orient notamment, sont bien plus que des images.

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Écrit par

  • : ancienne élève de l'École normale supérieure, professeur à l'université de Paris-X

Classification

Pour citer cet article

Jacqueline DUCHEMIN. PINDARE (517 av. J.-C./518-apr. 446 av. J.-C.) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 14/03/2009

Autres références

  • OLYMPIQUES, Pindare - Fiche de lecture

    • Écrit par
    • 825 mots

    Les Olympiques font partie des Épinicies de Pindare (518/517-446 av. J.-C.), ensemble d'odes destinées à célébrer les vainqueurs des compétitions athlétiques. La grande majorité de l'œuvre du poète grec, né à Thèbes, nous est inconnue ; ne nous sont parvenus que quatre livres des ...

  • GRÈCE ANTIQUE (Civilisation) - Langue et littérature

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    • 8 259 mots
    • 2 médias
    ...dans les guerres médiques. Cependant, c'est en dehors de l'Attique, mais non sans rapport avec elle, que naît et se développe la lyrique chorale, dont Pindare et Bacchylide sont les plus illustres représentants. Leur œuvre conservée est surtout faite de cantates chantées à l'occasion des victoires remportées...
  • JEUX OLYMPIQUES, Grèce antique

    • Écrit par
    • 8 385 mots
    Une autre tradition (Pindare, Olympiques) attribue non la création mais la restauration des Jeux à Héraclès : le héros-dieu réinstaure les jeux Olympiques après qu'il eut tué Augias, roi d'Élis, qui refusa de lui donner le dixième de son troupeau comme il s'y était engagé après qu'il eut...
  • JEUX OLYMPIQUES - La renaissance des Jeux

    • Écrit par
    • 5 087 mots
    L' existence des jeux Olympiques de l'Antiquité est attestée par plusieurs écrits, notamment les Olympiques de Pindare (ve siècle avant J.-C.) : celles-ci font partie des Épinicies, un ensemble d'odes destinées à célébrer les vainqueurs des compétitions sportives de la Grèce antique. Quatre...
  • LYRISME

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    Un tout autre aspect du lyrisme s'impose avec Pindare (env. vie-ve s. av. J.-C.). D'inspiration dorienne, les épinicies pindariques retentissent comme des hymnes aux dieux et à la cité des hommes. Par-delà l'éloge des athlètes vainqueurs, l'ordre du monde est célébré. La circonstance devient prétexte...