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DAVID JACQUES LOUIS (1748-1825)

L'épisode révolutionnaire

<it>Le Serment de La Fayette à la fête de la Fédération</it>, J. L. David - crédits : Paris Musées ; CC0

Le Serment de La Fayette à la fête de la Fédération, J. L. David

Si David se rangea dès l'origine parmi les partisans de la Révolution, il ne se rapprocha que progressivement des Jacobins. Élu à la Convention, siégeant parmi les Montagnards, il vota la mort du roi, fut membre du Comité de sûreté générale et du Comité d'instruction publique. Il eut, à ce dernier titre, un rôle important dans l'administration des arts, en particulier dans la suppression de l'Académie, dans la mise en place du Muséum et plus généralement dans la sauvegarde des richesses artistiques menacées par les événements. Il participa également à l'organisation des fêtes révolutionnaires (son influence fut grande dans le théâtre de son temps) – commémoration du 10-Août, glorification des armées de la République, fête de l'être suprême – réglant le déroulement des cortèges, donnant le dessin des décors et des costumes.

Il fit aussi des projets pour vêtir les différents corps de l'État, travailla à des sceaux et à des médailles et fournit le dessin de caricatures contre les ennemis de la Révolution. L'engagement de David se concrétisa donc dans une activité de propagandiste, liée cependant pour l'essentiel à ses préoccupations artistiques. Il en alla de même de sa peinture proprement dite, qui prit alors un tour nettement politique. Les tableaux antérieurs à 1789 désignaient naturellement David pour l'exécution d'œuvres commémoratives de la Révolution. Un projet en ce sens avorta à Nantes durant l'été 1790 et, curieusement, il fut aussi question de lui pour la réalisation d'un portrait de Louis XVI présentant la Constitution à son fils, qui aurait été placé dans la salle des séances de l'Assemblée et auquel David travailla jusqu'au printemps de 1792. Le projet le plus abouti de cette première période est Le Serment du Jeu de paume, dont l'idée, lancée en octobre 1790 au club des Jacobins – traiter directement et non par l'allégorie un événement contemporain, mais en le hissant au niveau de la grande peinture d'histoire –, était très nouvelle en France. Le projet devait être réalisé par souscription. David exposa un dessin d'ensemble au Salon de 1791 (Louvre) avant de s'engager dans la réalisation de la toile définitive (Musée national du château de Versailles), mais celle-ci resta inachevée, à l'état d'ébauche, abandonnée très probablement au printemps de 1792 : les fonds réunis étaient maigres et, surtout, la marche des événements rendait problématique la représentation de l'unanimité manifestée en 1789. Mirabeau, Barnave, Jean Sylvain Bailly, Rabaut-Saint-Étienne, d'autres encore n'avaient-ils pas plus ou moins failli depuis cette date ? Il en alla tout autrement lorsqu'il s'agit de glorifier les martyrs de la Révolution : Le Peletier de Saint-Fargeau, régicide tué par un ancien garde du roi (1793, tableau disparu), Marat assassiné (1793, musée des Beaux-Arts, Bruxelles). Dérivant à l'évidence du thème traditionnel de la déposition de croix, ces tableaux, tous deux placés à la Convention, s'inspiraient aussi étroitement de l'antique (les deux hommes sont représentés nus dans un décor très dépouillé), mais les quelques éléments narratifs suffisent à en faire des modèles de vertu modernes. David exécuta également, selon des principes analogues, une Mort de Bara (inachevée, 1793, musée Calvet, Avignon). L'aspect militant de ces icônes ne doit pas, toutefois, faire oublier leurs éminentes qualités artistiques. David servait la Révolution, mais il était d'abord peintre. Après Thermidor, les contemporains retinrent essentiellement le premier aspect : l'artiste, trop engagé du côté de Robespierre, fut arrêté puis emprisonné plusieurs mois au Luxembourg. Mais, la tempête passée, il ne fut pas autrement inquiété[...]

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Écrit par

  • : ancien élève de l'École normale supérieure, professeur à l'université de Paris-IV-Sorbonne

Classification

Pour citer cet article

Barthélémy JOBERT. DAVID JACQUES LOUIS (1748-1825) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Jacques Louis David - crédits : Fine Art Images/ Heritage Images/ Getty Images

Jacques Louis David

Étude d'ensemble pour le «Serment des Horaces», J. L. David, 1 - crédits : École nationale supérieure des beaux-arts, Paris

Étude d'ensemble pour le «Serment des Horaces», J. L. David, 1

<it>Portrait d'Antoine Laurent Lavoisier et de sa femme</it>, J.-L. David - crédits : Erich Lessing/ AKG-images

Portrait d'Antoine Laurent Lavoisier et de sa femme, J.-L. David

Autres références

  • LE SERMENT DES HORACES (J. L. David)

    • Écrit par Barthélémy JOBERT
    • 219 mots

    Après avoir obtenu le prix de Rome en 1775, David (1748-1825) séjourna dans la métropole italienne et voyagea dans la péninsule jusqu'en 1780. Cette période fut cruciale pour lui : c'est à Rome, alors un des principaux foyers artistiques européens et le berceau du néo-classicisme...

  • BOUCHER FRANÇOIS (1703-1770)

    • Écrit par Marianne ROLAND MICHEL
    • 3 747 mots
    • 2 médias
    ...expliquer les sujets peints et dessinés par Jean-Baptiste Huet au début de sa carrière sans Boucher, dont il a transposé, voire pastiché les modèles ? Comment comprendre, même, les œuvres de jeunesse de David, ses morceaux de concours pour les Prix, sans rappeler qu'il fut l'élève de Boucher, dont il...
  • ROMANTISME

    • Écrit par Henri PEYRE, Henri ZERNER
    • 22 170 mots
    • 24 médias
    ...efficace chez les littérateurs, elle jeta dans l'art une grande confusion. En effet, on assimilait volontiers le concept de classicisme à l'école de David. Or David avait justement opéré une révolution, volontaire et brutale, pour détruire la tradition académique, et l'on voit à l'intérieur de ce que...
  • CLASSIQUE ARCHITECTURE

    • Écrit par Claude MIGNOT
    • 4 847 mots
    • 5 médias
    ... siècle, du champ de la littérature dans celui des beaux-arts. On parle d'« école classique » pour désigner la « nouvelle école » de David, « imitatrice des Grecs et régulière dans ses compositions », et, dans la bataille romantique, le mot est employé pour désigner les artistes qui...
  • DELÉCLUZE ÉTIENNE JEAN (1781-1863)

    • Écrit par Jean-Pierre MOUILLESEAUX
    • 749 mots

    Critique d'art. Témoin lucide des événements — et des bouleversements artistiques — qui ont marqué la France de la Révolution au second Empire, Delécluze a, tout au long de sa très abondante production de critiques (plus d'un millier d'articles), manifesté une inlassable fidélité aux valeurs...

  • Afficher les 15 références

Voir aussi