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WENDERS WIM (1945- )

Parti d'un cinéma d'auteur, couronné deux fois au festival de Cannes, Wim Wenders a su élargir son univers aux dimensions de la planète et, sans rien perdre de sa singularité, intégrer à sa démarche le plaisir du récit. Wilhelm – dit Wim – Wenders est né à Düsseldorf le 14 août 1945. Fils de médecin, il commence tout naturellement sa médecine avant de suivre une année de philosophie dans sa ville natale. À Oberhausen, où se tient chaque année un important festival de cinéma, il se lie d'amitié avec Peter Handke. Fasciné par l'Amérique, passionné par la musique rock et la peinture, il passe une année à Paris (1966-1967), où il fréquente assidûment la Cinémathèque française. C'est là qu'il découvre Lang, Murnau, Ozu et se passionne pour les grands auteurs du cinéma américain. Sa candidature à l'I.D.H.E.C. rejetée, il rentre en Allemagne. Dans la foulée du manifeste d'Oberhausen (1962), le « jeune cinéma allemand » a commencé à se développer autour de Berlin, Hambourg et Munich. C'est dans cette dernière ville que Wenders suit, de 1967 à 1970, les cours de l'École supérieure de télévision et de cinéma, qui ouvre ses portes. De 1968 à 1971, il collabore également comme critique aux revues Film (où écrit Handke), et Filmkritik, ainsi qu'au quotidien Süddeutsche Zeitung

Éloge de la fuite

C'est au cours de ces études que Wenders réalise six courts-métrages qui mettent en place quelques-unes de ses préoccupations : mouvement (Same Player shoots again, 1967), lieu générateur d'angoisse et de fiction (Silver City, 1968), présence de la mort à travers celle de la caméra (Alabama : 2 000 Light Years, 1968-1969), relations entre musique américaine et paysage allemand (AmerikanischeLP's, 1969). Polizeifilm (1969-1970) tranche sur ces expériences : ce faux reportage sur les méthodes policières face aux manifestations étudiantes montre le peu d'intérêt de Wenders pour un discours politique direct. Enfin, Summer in the City (1970) synthétise ces essais en dressant le bilan des espoirs déçus des années 1960.

Devant la difficulté des jeunes cinéastes allemands à produire et distribuer leurs films se crée à Munich le Film-Verlag der Autoren, conçu sur le principe d'une maison d'édition autogérée. Wim Wenders fait partie des fondateurs. C'est dans ce cadre, et grâce à des coproductions avec la télévision, qu'il accède au stade professionnel en adaptant le roman de son ami Handke, L'Angoisse du gardien de but au moment du penalty (Die Angst des TormannsbeimElfmeter, 1971). S'y inscrit définitivement la figure fondatrice du cinéma wendersien : l'errance, à travers le personnage de Joseph Bloch devenu soudainement étranger au monde qui l'entoure. La Lettre écarlate (Der ScharlachroteBuchtabe, 1972), d'après le roman de Nathaniel Hawthorne, n'est qu'une commande dont Wenders s'acquitte à contrecœur.

Alice dans les villes (Alice in demStädten, 1973), lointainement inspiré d'une chanson de Chuck Berry (Memphis), témoigne de la fascination de Wenders pour l'Amérique en même temps que de ses premières désillusions au contact de ce pays. Après un reportage avorté aux États-Unis, Philip Winter (Rüdiger Vogler) erre à travers la Ruhr, à la recherche de l'hypothétique grand-mère d'une fillette qu'on lui a confiée. À la découverte réciproque de l'homme et de l'enfant se superpose une réflexion sur le cinéma, l'image et la communication, par le biais des photos que ne cesse de prendre Philip. Faux Mouvement (FalscheBewegung, 1974) est la transposition moderne, par Peter Handke, des Années d'apprentissage de Wilhelm Meister de Goethe. Mais la conclusion est ici inversée : dans l'Allemagne de 1974, le voyage ne saurait permettre à l'aspirant-écrivain[...]

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Écrit par

  • : critique et historien de cinéma, chargé de cours à l'université de Paris-VIII, directeur de collection aux Cahiers du cinéma

Classification

Pour citer cet article

Joël MAGNY. WENDERS WIM (1945- ) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • LES AILES DU DÉSIR, film de Wim Wenders

    • Écrit par Kristian FEIGELSON
    • 871 mots
    • 1 média

    Né en 1945 à Düsseldorf, Wim Wenders devient critique de cinéma à la fin des années 1960 tout en entamant, dès 1967, un parcours de cinéaste. Après trois films remarqués L'Angoisse du gardien de but au moment du penalty (Die Angst des Tormanns beim Elfmeter, 1971), Alice dans les villes...

  • PINA (W. Wenders)

    • Écrit par Agnès IZRINE
    • 1 146 mots

    Présenté hors compétition, Pina, le film en 3 dimensions (3D) de Wim Wenders, a créé l'événement lors du festival international du film de Berlin en février 2011, et ce à plusieurs titres. Tout d'abord, il y a eu la curiosité de connaître quel regard portait ce réalisateur allemand sur l'œuvre...

  • ALLEMAND CINÉMA

    • Écrit par Pierre GRAS, Daniel SAUVAGET
    • 10 274 mots
    • 7 médias
    De 1966 à 1984, le prestige dont jouit ce cinéma d'auteur laisse penser qu'on assiste à un nouvel âge d'or du cinéma allemand.Wim Wenders atteint la renommée internationale avec sa trilogie : Alice dans les villes (Alice in den Städten, 1973), Faux Mouvement (FalscheBewegung, 1975), Au fil...
  • CAVE NICK (1957- )

    • Écrit par Michel P. SCHMITT
    • 1 309 mots
    • 1 média
    ...Parmi ses romans, on retiendra Et l’âne vit l’ange (1989), qui raconte la folie d’un jeune muet. Au cinéma, il signe le scénario dewesterns et participe à plusieurs films du réalisateur allemand Wim Wenders dont Les Ailes du désir (1987) et The Soul of man (2003) ou Les Beaux Jours d’Aranjuez...
  • CINÉMA (Aspects généraux) - Histoire

    • Écrit par Marc CERISUELO, Jean COLLET, Claude-Jean PHILIPPE
    • 21 694 mots
    • 41 médias
    ...Fassbinder, en 1982, a renvoyé le pays à son propre vide. Le poids de l'histoire permit cependant à l'Allemagne de se réconcilier avec son cinéma, ce qu'un Wim Wenders, né en 1945 – par ailleurs la grande déception de la période –, a su percevoir avec beaucoup de lucidité dans Les Ailes du désir...
  • FERRER IBRAHIM (1927-2005)

    • Écrit par Universalis
    • 161 mots

    Chanteur cubain. Orphelin à douze ans, Ibrahim Ferrer doit gagner tôt sa vie en vendant des journaux et en chantant dans la rue. Sa peau noire ne facilite pas son intégration sous le régime raciste de Batista. Après un passage furtif dans divers groupes, il finit par intégrer l'Orquesta Chepín-Chovén,...

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Voir aussi