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LEDUC VIOLETTE (1907-1972)

Violette Leduc - crédits : Sophie Bassouls/ Sygma/ Getty Images

Violette Leduc

Reconnue précocement par des écrivains déjà célèbres comme Genet, Camus, Sartre et surtout Simone de Beauvoir qui l'aida avec persévérance, Violette Leduc ne rencontra le succès public que tardivement avec La Bâtarde (1964), premier volume de son autobiographie. Son œuvre, transgressive et audacieuse, a pu choquer, au moment de sa publication, par la prédilection qu'elle manifestait pour toutes les formes de marginalité sexuelle et affective. Avec le recul, ces caractéristiques lui confèrent une dimension novatrice et font de Violette Leduc une devancière tant dans le domaine de l'écriture de soi que dans la réflexion sur la sexualité.

Un espace autobiographie

Violette Leduc (née à Arras en 1907) est, en effet, elle-même la matière de ses livres. Si toutes ses œuvres ne relèvent pas au sens strict du genre autobiographique, presque toutes exploitent des matériaux autobiographiques récurrents, rétrospectivement désignés comme tels par l'auteur lui-même. Seuls échappent à cet « espace autobiographique » La Vieille Fille et le mort (1958), recueil de deux longues nouvelles, La Femme au petit renard (1965), récit à la troisième personne et Le Taxi ( 1971 ), bref texte dialogique, où fantasmes et obsessions se trouvent transposés sur le mode de la fiction.

Dans L'Asphyxie (1946), sous-titré roman, le récit se présente sous forme de séquences éclatées, elliptiques, sans lien chronologique ou thématique explicite. Le livre évoque l'enfance d'une petite « bâtarde », fille d'une servante et d'un fils de famille, rudoyée par une mère meurtrie, mais choyée par une grand-mère aimante trop tôt disparue, situation familiale que l'on retrouvera dans La Bâtarde. Autour de la fillette qui les observe gravitent des personnages insolites, héros malheureux d'histoires énigmatiques, dominées par une sexualité déviante. L'Affamée (1948) explore la passion que voua Violette Leduc à Simone de Beauvoir, mais sans la nommer. Amour sans espoir raconté par ailleurs dans La Folie en tête, deuxième volume de l'autobiographie. Par sa narration au présent où l'auteur évoque les paroxysmes affectifs que déclenchent la rencontre ou l'absence de la femme adorée, ce récit relève du journal remanié. Par son lyrisme soutenu et constamment métaphorique comme par sa composition en paragraphes, il s'apparente au poème en prose. Cet amour oblatif, voué par une créature qui s'abaisse à une divinité parfaite et inaccessible, revêt même une coloration mystique. Avec Trésors à prendre (1960), journal d'un voyage à pied effectué en 1951 dans le Midi de la France, à l'instigation de Simone de Beauvoir auquel il est adressé comme une offrande, Violette Leduc prolonge cette inspiration amoureuse. Le roman Ravages (1955) raconte les relations passionnées, complexes et douloureuses, qu'instaure l'héroïne avec une jeune institutrice et l'homme qu'elle épousera. Les paroles de la mère, mettant en garde contre l'amour et les hommes, jouent un rôle déterminant dans l'échec affectif de la fille qui les a intériorisées. Le début, qui évoquait avec précision et lyrisme un amour de collège, antérieur, pour une adolescente, censuré par l'éditeur au grand désespoir de l'auteur, sera publié séparément sous le titre Thérèse et Isabelle (1966). Violette Leduc attestera dans La Bâtarde l'exactitude vécue de ces événements.

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Écrit par

  • : ancienne élève de l'École normale supérieure de Sèvres, agrégée de lettres classiques, maître de conférences honoraire de littérature française à l'université de Lille-III

Classification

Pour citer cet article

Éliane LECARME-TABONE. LEDUC VIOLETTE (1907-1972) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Violette Leduc - crédits : Sophie Bassouls/ Sygma/ Getty Images

Violette Leduc

Autres références

  • GENET JEAN (1910-1986)

    • Écrit par René de CECCATTY
    • 3 111 mots
    • 2 médias
    ...devient un auteur de théâtre. Les Bonnes, inspirées du crime des sœurs Papin, sont créées à l'Athénée dans une mise en scène de Louis Jouvet. La romancière Violette Leduc, révélée simultanément par les mêmes protecteurs – Sartre, Beauvoir, Cocteau, Jouhandeau –, bâtarde elle aussi et si profondément...
  • LITTÉRATURE FRANÇAISE DU XXe SIÈCLE

    • Écrit par Dominique RABATÉ
    • 7 278 mots
    • 13 médias
    ...à l’existentialisme, l’œuvre autobiographique de Beauvoir montre l’exemplarité d’un parcours d’affranchissement et d’autonomie. C’est elle qui soutient Violette Leduc (1907-1972), et qui ouvre la voie aux écritures plus affirmativement féministes des années 1960 et 1970, notamment celle de Monique...

Voir aussi