Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

TURKANA

Population nilotique, les Turkana appartiennent au groupe Karamojong dont ils constituent la tribu la plus importante. Ils occupent une vaste région aride de plaines et de plateaux — le Turkana —, située dans le nord-ouest du Kenya, entre le lac Turkana (ancien lac Rodolphe) et l'escarpement qui marque la frontière avec l'Ouganda. Des reliefs vigoureux au sud, une zone désertique au nord donnent au pays Turkana un caractère d'insularité naturelle ; la pénétration coloniale s'y est faite très tard et s'est heurtée jusqu'en 1926 à une vive résistance.

Le milieu naturel est caractérisé par une aridité extrême : nulle part les précipitations ne dépassent 100 millimètres en moyenne annuelle. L'eau est essentiellement fournie par les rivières qui coulent depuis les montagnes environnantes et par quelques points d'eau permanents. Le mode de vie des Turkana repose sur l'élevage : chaque famille possède un troupeau diversifié comprenant à la fois du bétail, quelques chameaux, des chèvres et des moutons, des ânes ; les vaches fournissent le lait qui forme la base de l'alimentation. Les chameaux sont également élevés pour le lait et la viande ; ils ne servent jamais pour le transport, ce rôle étant dévolu aux ânes. Tous les animaux sont périodiquement saignés : le sang est consommé mélangé à du lait. La transhumance est pratiquée ainsi que la castration du bétail. La trypanosomiase et les épidémies sont rares, la sécheresse constitue le grand ennemi des troupeaux. À proximité des cours d'eau, les femmes cultivent des jardins qui fournissent un appoint alimentaire. Les activités de cueillette sont développées. L'habitat est dispersé ; l'enclos familial, entouré de palissades, enferme les cases des différents membres d'une famille étendue et des kraal pour le bétail.

La filiation se fait en ligne paternelle, mais l'héritage se fait dans les deux lignes, selon le type de biens transmis. Le mariage s'accompagne d'une très importante contribution matrimoniale en bétail. Les règles d'exogamie sont très strictes et le mariage entre cousins est prohibé. La polygamie est largement pratiquée. Au-delà du groupe familial, la famille étendue, les clans — au nombre de vingt — et les sections territoriales à fonction rituelle ne jouent qu'un rôle restreint dans la vie sociale. L'unité la plus significative est représentée par des groupes constitués sur la base du voisinage, qui partagent des points d'eau ou pratiquent ensemble la transhumance. Le système des classes d'âge est moins développé que dans d'autres populations du même groupe : il se réduit à un système de moitiés, les Pierre et les Léopard, organisés en fonction des générations, le fils appartenant à la moitié opposée à celle du père. L'initiation des jeunes gens se fait entre seize et vingt ans ; elle sanctionne le passage à l'âge adulte, et donne lieu à d'importantes cérémonies.

Les Turkana ne sont pas un peuple très religieux, ils croient en un dieu suprême auprès duquel les devins jouent le rôle d'intercesseurs. Vivant souvent en ermites, les devins jouaient autrefois un rôle politique important ; ils étaient universellement craints et respectés. Les fréquentes accusations de sorcellerie donnent lieu à des ordalies.

— Roger MEUNIER

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : chargé de cours à l'université de Paris-VIII, assistant de recherche à l'École pratique des hautes études

Classification

Pour citer cet article

Roger MEUNIER. TURKANA [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • KENYA

    • Écrit par Bernard CALAS, Universalis, Denis Constant MARTIN, Marie-Christine MARTIN, Hervé MAUPEU
    • 13 794 mots
    • 13 médias
    ...leur répartition sur le territoire du Kenya contemporain ne se stabilisera que très lentement, et toujours avec fragilité. Au nord-ouest, progression des Turkana (Nilotiques orientaux) ; au nord-est, domination des Somali ; entre les deux, des groupes couchites orientaux (Rendille, Gabbra, Boran) et nilotiques...

Voir aussi