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TROTSKI LÉON (1879-1940) ET TROTSKISME

Le trotskisme

La IVe Internationale

En faisant assassiner Trotski, dans le même temps où les trotskistes d'Union soviétique, tous déportés, sont fusillés en masse dans les camps de concentration, Staline est-il parvenu à ses fins : écraser les derniers germes révolutionnaires susceptibles d'enrayer son emprise sur le mouvement ouvrier mondial ? Il pouvait le sembler à des observateurs superficiels. Les minuscules organisations de la IVe Internationale, déchirées par des scissions à la veille du second conflit mondial, vont être séparées par les murailles de feu de la guerre et subir la répression de tous les camps en présence : prison ou camp en tant que « communistes » dans les démocraties capitalistes (dirigeants du Socialist Workers Party aux États-Unis) et leurs colonies (Tha Thu-tau à Poulo-Condore), poteau d'exécution dans les pays dominés par le fascisme (Pouliopoulos en Grèce, Gueguen et Bourhis à Chateaubriant...), répression stalinienne qui s'exerce jusque dans les camps de concentration nazis ou les maquis (P. Tresso et ses compagnons en France).

Mais le travail acharné de clarification politique mené par Trotski n'a pas été vain. Dans ces conditions de répression jamais vues, les groupes trotskistes continuent ou se reconstituent, souvent avec de jeunes dirigeants, inconnus avant la guerre. Ainsi, en France, où La Vérité, organe du Parti ouvrier internationaliste, est le premier journal clandestin à paraître (à l'heure où L'Humanité sollicite sa parution légale auprès des autorités allemandes). Cela ne va pas sans quelques vacillations théoriques, mais, fait remarquable, elles sont toujours redressées. En Europe, un secrétariat européen se constitue dès 1942, dont deux des principaux dirigeants, Marcel Hic et Abram Léon, disparaîtront dans les camps de la mort. Hors du concert de la nouvelle union sacrée baptisée Résistance, les trotskistes luttent « pour que la défaite d'Hitler soit la victoire des travailleurs ». Se refusant à confondre le nazisme et le peuple allemand, ils sont les seuls à organiser des cellules communistes dans l'armée allemande. En France, les trois organisations trotskistes principales fusionnent au début de 1944 et forment le Parti communiste internationaliste.

Mais la fin de la Seconde Guerre mondiale n'est pas sa transformation en révolution. Le stalinisme semble même sortir renforcé du conflit, auréolé par la victoire militaire de l'U.R.S.S. Si les trotskistes constatent, dès 1946, qu'ils ont tenu bon et que la IVe Internationale existe réellement dans une trentaine de pays, ils ne sont toujours que des groupes, et à contre-courant. L'absence de décollage entraîne des séries de révisions. Le « schisme » yougoslave de 1948 puis la victoire de la révolution chinoise manifestent la fêlure du stalinisme ; cependant les scissions aboutissent, en 1952-1953, à une véritable explosion de la IVe Internationale dont les deux centres (Comité international et Secrétariat unifié de la IVe Internationale) sont d'une égale faiblesse.

Pourtant, l'année 1953 est précisément celle de la mort de Staline, bientôt suivie par la « déstalinisation ». 1956 voit successivement le XXe congrès du P.C. de l'U.R.S.S. avec le discours secret de Khrouchtchev qui confirme largement ce que les trotskistes disaient depuis trente ans, et la révolution hongroise, qui vérifie les pronostics de Trotski sur l'avenir de la bureaucratie. Les révolutions coloniales remettent aussi la révolution permanente à l'ordre du jour. Une lente remontée commence. Elle s'affirme en 1963 par une réunification mondiale de la IVe Internationale. Incomplète toutefois ; trois autres courants continuent à se réclamer du trotskisme : le courant latino-américain « posadiste » (du nom de son dirigeant Posadas) ; le courant anglo-français (« lambertiste-healyste[...]

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Pour citer cet article

Michel LEQUENNE. TROTSKI LÉON (1879-1940) ET TROTSKISME [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Trotski et l'Armée rouge - crédits : Topical Press Agency/ Hulton Archive/ Getty Images

Trotski et l'Armée rouge

Manifestation à Petrograd, juin 1917 - crédits : Central Press/ Getty Images

Manifestation à Petrograd, juin 1917

Le cabinet de Lenine et Trotski - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

Le cabinet de Lenine et Trotski

Autres références

  • ANTONOV-OVSEÏENKO VLADIMIR ALEXANDROVITCH (1884-1938)

    • Écrit par Claudie WEILL
    • 421 mots

    Fils d'officier, Antonov-Ovseïenko entre à l'école des cadets de Voroneje. Il quitte l'armée, adhère dès 1901 au mouvement révolutionnaire et se rapproche des mencheviks en 1903. Lors de la révolution de 1905, il est l'un des experts militaires de la social-démocratie russe. Il essaye de soulever...

  • ARMÉE ROUGE, URSS

    • Écrit par Georges HAUPT
    • 584 mots
    • 1 média

    Après la révolution d'Octobre, le Conseil des commissaires du peuple adopte un décret concernant l'armée : tout le pouvoir est confié aux soviets et aux comités militaires, le commandement devient éligible et une armée permanente de volontaires est instaurée. Entre le 15 et le 28 janvier 1918 est...

  • BENSAÏD DANIEL (1946-2010)

    • Écrit par Willy PELLETIER
    • 957 mots

    Daniel Bensaïd eut plusieurs vies, chacune recomposant l'autre, en la continuant. Né le 25 mars 1946 à Toulouse, il est mort le 12 janvier 2010 à Paris. Philosophe militant révolutionnaire, théoricien du mouvement trotskiste, il est l'une des rares incarnations du soixante-huitard resté...

  • BESANCENOT OLIVIER (1974- )

    • Écrit par Éric PHÉLIPPEAU
    • 901 mots
    • 1 média

    Homme politique français, militant trotskiste.

    Olivier Besancenot est né à Levallois-Perret (Hauts-de-Seine) le 18 avril 1974, d'une mère psychologue scolaire et d'un père enseignant de collège. Après une licence d'histoire obtenue à l'université de Paris X-Nanterre, il devient facteur à Neuilly-sur-Seine...

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Voir aussi