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TOPONYMIE

Méthode

Dans son emploi primitif, le toponyme décrit. C'est un nom commun (toutefois, certains noms de lieux paraissent être des noms de personnes pris en fonction toponymique) auquel peuvent s'appliquer les procédés habituels de dérivation (suffixes, etc.) et de composition avec un déterminant (épithète, etc.). Quelle que soit sa formation, le toponyme peu à peu se fige sur un unique objet, dans un contexte linguistique en constante évolution. Il importe donc de remonter aussi loin que possible dans le processus de cette lente pétrification, afin de retrouver à quel moment le toponyme était encore un mot vivant et, par conséquent, à quelle couche de langage il appartient. Ainsi, l'examen des formes anciennes, graphies sous lesquelles un toponyme apparaît dans les inscriptions et les textes au cours des siècles, est essentiel ; comme l'évolution d'un même mot est fort différente selon les dialectes, il faut, de plus, une bonne connaissance des lois de la phonétique historique vernaculaire et de la dialectologie régionale, faute de quoi cet examen reste lettre morte ou mène à des errements. Inversement, ces formes évolutives d'un mot peuvent constituer une précieuse source d'information sur les états successifs de la phonétique locale. Pour qui sait interpréter, même les latinisations, fréquentes dans les textes dès la renaissance carolingienne, même les attractions paronymiques, qui sont de tous les temps, peuvent permettre de percevoir un état de langue. L'enquête sur place (prononciations locales et contexte géographique) oriente également la recherche. D'autre part, si l' archéologie est l'un des principaux auxiliaires de la toponymie, parce qu'elle est susceptible de lui fournir des indications sur l'apparition d'un peuplement (ateliers préhistoriques, oppidum celtique, villa romaine, sépultures mérovingiennes), en revanche l'examen toponymique permet de déceler des habitats disparus, des vestiges enfouis, mais dont le souvenir est perpétué, inconsciemment, par les noms de lieux. Cependant, malgré l'observation conjointe des formes anciennes, de la topographie, des données historiques et archéologiques, le sens des toponymes reste souvent obscur. Plus on remonte dans le temps, plus la recherche a un caractère conjectural. Cela, joint au fait qu'il n'existe par exemple aucune liste exhaustive des noms de lieux de France, empêche qu'on puisse établir des statistiques sérieuses dans la nomenclature actuelle et, à plus forte raison, dans les phénomènes du passé. Il n'en reste pas moins qu'un certain nombre de critères linguistiques et chronologiques ont pu être dégagés et que, appliqués à bon escient, ils peuvent suppléer le silence ou l'absence des textes pour éclairer l'histoire du peuplement et des modes de vie.

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Écrit par

  • : archiviste-paléographe, conservateur aux Archives nationales

Classification

Pour citer cet article

Marianne MULON. TOPONYMIE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • AMÉNAGEMENT LINGUISTIQUE

    • Écrit par Loïc DEPECKER
    • 4 745 mots
    En ce qui concerne les noms propres, la question des noms de lieux ou toponymes est particulièrement vive. Car nommer un lieu est un geste éminemment politique, la langue semblant rendre propriétaire de l'objet désigné. Il peut en résulter des conflits endémiques dans des pays ou des régions où cohabitent...
  • GALLO-ROMAINE RELIGION

    • Écrit par Christian-Joseph GUYONVARC'H
    • 731 mots

    Les documents directs que nous ont laissés les Celtes (et donc les Gaulois) antérieurement à la conquête romaine sont archéologiques et relèvent de la protohistoire. Ils excluent également les témoignages littéraires et la sculpture monumentale. La civilisation matérielle des Celtes a...

  • LUG(US), irl. LUG

    • Écrit par Christian-Joseph GUYONVARC'H
    • 436 mots

    Désignant l'équivalent de Mercure dans le schéma religieux de César, le théonyme gaulois Lug(us) est attesté : par le toponyme latinisé Lugu-dunum (« forteresse de Lugus »), dont on connaît une quinzaine d'exemplaires — les principaux sont Lyon (Rhône), Laon (Aisne), Laudun (Gard),...

  • LUNE

    • Écrit par Pierre THOMAS
    • 8 433 mots
    • 17 médias
    La toponymie lunaire a plusieurs origines. Celle de la face visible date du xviie siècle et est due en partie à Johannes Hevelius et surtout à Giambattista Riccioli et Francesco Maria Grimaldi. Ces astronomes ont donné aux mers des noms de qualités humaines ou de phénomènes météorologiques (Mare Serenitatis,...

Voir aussi