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STARETS

Dans l'Église russe, le mot starets (au pluriel startsy) désigne un moine qui, rempli des lumières du Saint-Esprit, est un guide dans la voie de la perfection. Le starets peut être prêtre, mais il ne l'est pas toujours ; il peut recevoir la charge de gouverner un monastère, mais ce n'est ni fréquent ni habituellement souhaité ; son rôle est de vivre une expérience spirituelle telle que les autres sentent en lui la présence de Dieu.

Bien que le mot « starets » soit employé pour qualifier des moines plus anciens, l'initiateur du mouvement fut Nil Sorski, né en 1435 d'une famille noble de la région de Moscou. Au monastère de Cyrille Belozerski, il pratiqua une rude ascèse, mais sans satisfaire ses élans mystiques. Il partit donc pour l'Athos, où il rencontra des moines qui lui apprirent la prière spirituelle, la garde du cœur et la clarté de jugement. Il lut les œuvres des Pères, retenant toute doctrine qui tente de donner des fondements mystiques à l'ascèse de la vie monastique. Il rentra en Russie et se fixa à quelque distance de son ancien monastère. Voulant une stricte pauvreté, un détachement total et une vie humble, Nil Sorski proposa de rendre à l'État les propriétés des monastères. Un tel projet heurta les dirigeants de l'Église russe, parmi lesquels se rencontraient des saints. Ils combattirent si violemment Nil Sorski que le mouvement qu'il avait lancé parut complètement aboli lors de sa mort, le 7 mai 1508.

Cependant, l'« état angélique » resta un idéal pour les moines et, deux siècles plus tard, le starets Païssi Velitchkovski lui donna un nouvel essor. Né en 1722 à Poltava, Païssi commença très jeune des études ecclésiastiques et passa quatre ans à l'école de Kiev. Moine à dix-sept ans, il ne trouva pas ce qu'il cherchait et passa par plusieurs monastères avant de gagner l'Athos, où il se pénétra des traditions de l'ancien monachisme. Il revint en Moldavie, où il séjourna dans plusieurs monastères et où il mourut le 15 novembre 1794. Païssi avait remis en lumière la parenté spirituelle qui avait toujours existé entre le monachisme russe et l'idéal de la sainte montagne de l'Athos ; son influence fut profonde et durable.

Le starets Léonide (1768-1841) fonda l'ermitage d'Optino qui joua un rôle très important durant tout le xixe siècle. Le starets Séraphin de Sarov (1759-1833) fut le plus célèbre de tous : thaumaturge, prophète, confesseur et directeur spirituel qui lisait dans les cœurs, grand dévot de la Vierge Marie, il enseignait que le but de la vie était d'obtenir du Saint-Esprit la grâce de sentir la présence de Dieu en nous.

Les startsy sont les héros de nombreuses anecdotes, souvent étonnantes, quelquefois cocasses. Ils n'ont jamais écarté l'idée de la folie pour Dieu, mais leurs originalités n'étaient pour eux qu'un moyen d'atteindre leur but : élever les fidèles au-dessus du ritualisme et du formalisme, au-delà des cérémonies les plus magnifiques, par l'humilité et l'obéissance, jusqu'à la plus authentique vie intérieure.

— Jacques DUBOIS

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Écrit par

  • : moine bénédictin, directeur d'études à l'École pratique des hautes études (IVe section)

Classification

Pour citer cet article

Jacques DUBOIS. STARETS [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • NIL DE LA SORA saint (1433-1508)

    • Écrit par Olivier CLÉMENT
    • 765 mots

    Moine orthodoxe que l'hagiographie russe appelle le Grand Starets. Nil de la Sora fut le témoin de la pauvreté et de la liberté évangéliques, d'un christianisme de transfiguration, au moment où la Russie, au seuil des Temps modernes, s'immobilisait dans une sorte de totalitarisme sacral....

  • SÉRAPHIN DE SAROV saint (1759-1833)

    • Écrit par Olivier CLÉMENT
    • 244 mots

    Saint russe de la première moitié du xixe siècle, véritable icône de la spiritualité orthodoxe. Né à Koursk dans une famille de marchands, Prokhore Mochine entre à dix-neuf ans au monastère de Sarov. Il y reçoit le nom de Séraphin (« de feu »). En 1794, il se retire en ermite dans la forêt, s'enferme...

  • VELITCHKOVSKI PAÏSSI (1722-1794)

    • Écrit par Olivier CLÉMENT
    • 340 mots

    Starets par qui le mouvement philocalique, à la fin du xviiie siècle, est passé du monde grec dans le monde russe. Païssi Velitchkovski, né à Poltava (Ukraine), abandonne à quatorze ans les écoles de Kiev, où une scolastique décadente, d'origine latine, dénature la tradition orthodoxe, pour recommencer...