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SANTILLANA ÍÑIGO LÓPEZ DE MENDOZA marquis de (1398-1458)

Íñigo López de Mendoza, premier marquis de Santillana, jouit d'une vie aussi longue que bien remplie. Grand seigneur (ce qui veut dire, dans l'Espagne du xve siècle, guerrier et politicien à la fois), poète, et curieux de toutes les choses de l'esprit, il apparaît, selon l'heureuse formule de Menéndez Pidal, comme la « cime la plus lointaine, et qui reçoit, la première, la lueur de ce jour nouveau : la Renaissance ».

Prémices d'une poésie nouvelle

Íñigo López de Mendoza, fils de l'amiral de Castille Diego Hurtado de Mendoza et de Leonor de la Vega, naquit à Carrión de los Condes. Diego Hurtado disparut lorsque son fils n'avait que sept ans ; Íñigo fut élevé par sa mère, une maîtresse femme qui sut faire face à tous les ennemis (et même à bien des parents) qui prétendaient intervenir dans l'héritage de son fils. Cette circonstance explique aussi que la première jeunesse du futur poète se passa en Aragon plutôt qu'en Castille ; dans cette contrée plus sûre, il fit office de grand échanson du prince de Gérone, celui qui devint plus tard Alphonse V le Savant ou le Magnanime, roi d'Aragon, puis de Naples.

Ces premières années marquent aussi la position particulière du marquis vis-à-vis de la Castille : opposé, d'abord, à son roi légitime, Jean II, il lui prêtera ensuite son aide contre ces Aragonais qu'on le suspecte de trop chérir. Et telle sera désormais sa conduite : souvent en conflit avec la volonté royale, il redevient un vassal accompli lorsqu'il s'agit de guerroyer contre le roi de Grenade (1431 et 1455), celui de Navarre (1444) ou encore celui d'Aragon. Le marquis, encore en pleine activité guerrière et diplomatique, meurt à Guadalajara.

Santillana n'était point le premier poète de son lignage. De l'œuvre de son grand-père, Pedro González de Mendoza, il nous reste quelque fragment, et son père, l'amiral, est l'auteur d'une chanson à danser qui figure, à juste titre, dans toutes les anthologies. Rafael Lapesa, qui a étudié mieux que quiconque L'Œuvre littéraire du marquis de Santillana, montre qu'après une première période caractérisée par l'influence du marquis de Villena, le poète acquiert sa pleine maîtrise et devient le premier écrivain de son époque ; dans une période finale, de maturité assagie, il penche vers la doctrine stoïque, puis vers la dévotion ; il continue à être l'arbitre des lettres de son temps, mais il n'est plus seul – Juan de Mena, plus jeune, son ancien disciple, est maintenant à ses côtés.

L'œuvre poétique de Santillana s'épanouit en plusieurs genres différents. Paradoxalement, ce sont ses poèmes mineurs – et parmi ceux-ci les serranillas, pastorales en vers courts qui mettent en scène des serranas (filles montagnardes), d'où leur nom – qui lui ont valu et lui conservent aujourd'hui son renom. Ses allégories dans le goût italien de Dante, de Pétrarque et de Boccace – rêves et voyages eschatologiques, triomphes et couronnements – sont moins près du lecteur « non prévenu ». Parmi ses écrits moraux, les poèmes inspirés par don Álvaro de Luna gardent une place à part, surtout le Doctrinal de privados (qu'on pourrait traduire assez approximativement par « École des favoris »), écrit après la mort de son ennemi et empreint d'une haute noblesse, où la rancune est apaisée presque entièrement, et où les réflexions sur cette destinée tragique l'emportent sur les anciens griefs. Les « Sonnets faits à la manière italienne » (al itálico modo) méritent une considération toute spéciale : il s'agit de quarante-deux pièces composées pendant les vingt dernières années du poète, et leur nombre relativement restreint montre, contrairement à ce qu'on pourrait penser tout d'abord, la constance d'un effort dans l'adaptation[...]

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Écrit par

  • : docteur ès lettres, universités de Buenos Aires et de Paris-Sorbonne, directeur de recherche au C.N.R.S.

Classification

Pour citer cet article

Daniel DEVOTO. SANTILLANA ÍÑIGO LÓPEZ DE MENDOZA marquis de (1398-1458) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • CANCIONEROS

    • Écrit par Madeleine PARDO
    • 1 962 mots
    ...qui appartint à l'interprète de François Ier, le Cancionero de Salvá, de la deuxième moitié du xve siècle, qui renferme des pièces du marquis de Santillana, de Juan de Mena, de Montoro, de Gomez Manrique ; le Cancionero dit de Rennert ou de Garci Sanchez de Badajoz, le Cancionero de Valera, le...

Voir aussi