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MARJOLIN ROBERT (1911-1986)

À l'époque du Front populaire, Robert Marjolin se définit « à la fois comme socialiste et libéral ». Il explique : « Le socialisme me paraissait essentiel parce que nous vivions dans une société inégalitaire qui ne comportait ni salaire minimal, ni sécurité sociale, ni éducation gratuite. Et j'étais libéral parce que, au fond, j'avais vu les États-Unis, et j'étais convaincu qu'il n'y avait qu'un seul moyen d'améliorer le sort des gens, c'était de résoudre le problème de la production. » L'originalité de la position, qui chez tout autre ne révélerait qu'un solide goût du paradoxe, constitue chez Robert Marjolin un résumé réfléchi de sa vie. Né le 27 juillet 1911 dans une famille modeste – son père était employé de commerce –, il quitte l'école à quatorze ans « comme il était normal dans le milieu où je vivais ». Pendant cinq ans, le jeune homme exerce différents métiers jusqu'à subir le contrecoup de la grande crise de 1929. À dix-neuf ans, Robert Marjolin perd son emploi et décide de reprendre ses études, s'orientant vers la philosophie à la Sorbonne. Trois certificats de licence, grâce à sa mère « qui se remet à faire des ménages pour me permettre de poursuivre des études ».

Étudiant passionné, il est remarqué par le directeur de l'École normale supérieure qui lui fait obtenir une bourse de la fondation Rockefeller. En 1932, il part pour une année aux États-Unis. Une expérience unique qui le marquera à tout jamais et en fera un américanophile convaincu. À dix-huit ans, Robert Marjolin a adhéré aux Jeunesses socialistes. À son retour des États-Unis, un petit texte qu'il publie sur « Les Expériences Roosevelt » tombe dans les mains de Léon Blum qui lui propose, à vingt-deux ans, de prendre la responsabilité de la page économique du Populaire. Marc Joubert, c'est son pseudonyme, commente les événements pendant que Robert Marjolin poursuit ses études d'économie avec Charles Rist, qui a fondé l'Institut de recherches économiques et sociales. Licence, doctorat, agrégation de droit couronnent les brillantes études de ce non-bachelier.

Avec le Front populaire, Robert Marjolin va commencer à travailler dans le monde politique. Léon Blum propose à ce jeune et brillant économiste libéral de venir au secrétariat général de la Présidence du Conseil, où il collabore avec Jules Moch. La rupture se fait quelque temps plus tard sur la loi des 40 heures : « Réduire la durée du travail quand les Allemands travaillaient 72 heures par semaine pour préparer la guerre me semblait conduire à la catastrophe ! » En mars 1941, Robert Marjolin rejoint Londres. Ce ne sera jamais un gaulliste de conviction, mais il reconnaît au chef de la France libre sa prééminence dans le combat contre l'occupation nazie. Il y prend part à sa façon, au côté de Jean Monnet, en préparant aux États-Unis la reconstruction de la France par le plan Marshall. Peu après la Libération, il devient l'adjoint de Jean Monnet qui vient d'être nommé commissaire général au Plan. Plus que jamais, Robert Marjolin est obsédé par la « production ». Il découvre aussi que « la reconstruction francaise passe par la reconstruction de l'Europe ».

La période européenne commence pour Robert Marjolin avec la création de l'Organisation européenne de coopération économique (O.E.C.E.) qui donnera naissance plus tard à l'O.C.D.E. De 1948 à 1955, il est secrétaire général de cet organisme. « L'Europe est en train de se faire avec l'aide de l'Amérique », observe-t-il. En 1955, il quitte 1'O.E.C.E. qui lui paraît tourner en rond pour devenir, un temps, professeur d'économie politique à Nancy. Dès 1956, il revient aux affaires en collaborant au cabinet de Christian Pineau puis à celui de Maurice Faure, dans le gouvernement [...]

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Pour citer cet article

Christian SAUVAGE. MARJOLIN ROBERT (1911-1986) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • CHANGE - L'intégration monétaire européenne

    • Écrit par Christian BORDES
    • 14 365 mots
    • 6 médias
    L'idée d'un système de parités de change fixe entre les Six commence à cheminer dans les esprits. La Commission lance le débat en octobre 1962. Le 24 octobre 1962 est présenté par Robert Marjolin un mémorandum indiquant la volonté d'adopter la fixité des taux de change, et ce en vue de créer une...

Voir aussi