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QUARKS

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Les quarks dans la chromodynamique quantique

Les approfondissements théoriques des années 1970 résolvent partiellement ce paradoxe. Les théoriciens s’attachent à généraliser l'électrodynamique quantique développée dans la première moitié du xxe siècle et qui décrit de façon très précise les forces électromagnétiques entre objets élémentaires, en l’étendant à des théories aptes à décrire d’autres forces obéissant à des principes d’invariance – dits « de jauge » – semblables mais fondées sur des groupes mathématiques plus grands. Au niveau subatomique, la transformation « de jauge » agit sur la fonction d'onde, expression mathématique qui décrit la probabilité de présence d'une particule. Introduire un déphasage arbitraire dans la fonction d'onde des électrons et imposer que la réalité physique ne dépend pas de ce choix, conduit à l'existence du champ électromagnétique, donc des photons, et fixe de façon détaillée comment électrons et photons interagissent. Si ce déphasage s’accompagne des transformations qui échangent des particules groupées à l'intérieur d'un multiplet (ensemble de plusieurs particules), on peut décrire d’autres forces. Cette démarche s'est révélée extraordinairement fructueuse, car elle a permis de proposer qu’une « chromodynamique quantique » décrive les interactions entre les quarks, pourvu que chaque quark existe sous trois avatars différents, des « couleurs » (rouge, vert ou bleu) qu’aucune expérience ne peut distinguer. Comme l’existence du photon – messager de l’électromagnétisme – résultait du principe d'invariance dans les déphasages de la fonction d’onde de l’électron, huit gluons capables de changer la couleur d’un quark sont les messagers de l’interaction forte.

Le proton et les autres hadrons sont ainsi formés d'une superposition d'états composés d’un nombre indéterminé de quarks, d'antiquarks et de gluons fortement liés entre eux. Les quarks présents dans les nucléons sont surtout les quarks les plus légers, up (u) et down (d), mais ils sont accompagnés de nombreux gluons et de paires quark-antiquark de différents types. Les hadrons sont des mélanges « blancs » de constituants colorés, dans le même sens que la lumière blanche est une superposition des couleurs de l'arc-en-ciel. La chromodynamique quantique, maintenant vérifiée par l'adéquation de nombre de ses conséquences à des mesures expérimentales, possède la remarquable propriété de « liberté asymptotique » : lorsqu'on éloigne deux quarks l'un de l'autre, leur attraction mutuelle croît en raison d'un phénomène surprenant d'antiécrantage dû au fait que les gluons sont eux-mêmes colorés ; l'interaction, ténue à courte distance, devient ainsi extraordinairement intense à l'échelle du femtomètre. Inversement, les quarks solidement liés à l'intérieur du proton réagissent comme des particules quasi libres lorsqu'un projectile très énergique vient sonder leur comportement à l'intérieur de leur prison : il s'agit exactement du comportement paradoxal observé expérimentalement au SLAC.

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Écrit par

  • : directeur de recherche émérite au CNRS, centre de physique théorique de l'École polytechnique, Palaiseau

Classification

Pour citer cet article

Bernard PIRE. QUARKS [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 21/03/2024

Média

Propriétés des quarks - crédits : Encyclopædia Universalis France

Propriétés des quarks

Autres références

  • DÉCOUVERTE DU QUARK CHARMÉ

    • Écrit par
    • 295 mots

    C'est en étudiant les paires électron-positon produites dans les collisions initiées par des protons, à l'accélérateur de particules de Brookhaven (Long Island, près de New York) que l'équipe menée par Samuel Ting (né en 1936) met en évidence en 1974 une nouvelle particule, qu'elle nomme « J »....

  • PREUVE EXPÉRIMENTALE DE LA STRUCTURE EN QUARKS

    • Écrit par
    • 168 mots

    L'expérience menée à l'accélérateur linéaire à électrons de Stanford (S.L.A.C) par Jerome Friedman, Henry Kendall et Richard Taylor permet de démontrer en 1968 la présence de structures ponctuelles chargées à l'intérieur du proton. Bien qu'on eût expliqué depuis plusieurs...

  • PARTICULES ÉLÉMENTAIRES

    • Écrit par et
    • 8 172 mots
    • 12 médias
    Continuant la descente au-delà de 10—15 m, on atteint le niveau des quarks, les constituants du proton et du neutron. Nous pouvons étudier avec précision la structure de la matière à l'échelle de 10—18 m : on distingue alors clairement les quarks. À la précision des mesures, le quark...
  • HADRONS

    • Écrit par
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    • 2 médias
    La spectroscopie des hadrons a été à la base de l'introduction du concept de quarks. Remarquant une régularité dans l'ordonnancement des masses des premiers mésons et baryons découverts dans les années 1950, Murray Gell Mann, George Zweig et Yuval Ne'eman proposaient indépendamment...
  • ANTIMATIÈRE

    • Écrit par et
    • 6 931 mots
    • 4 médias
    ...particulièrement les diffusions électron-proton au Slac (Stanford Linear Accelerator), ont montré que les hadrons sont composés de particules élémentaires, les quarks, liés entre eux par l'interaction forte (chromodynamique quantique). Dans ce schéma, à chaque quark est associé un antiquark. Si un baryon...
  • BARYONS

    • Écrit par
    • 195 mots

    Famille de particules sensibles à l'interaction forte et de moment angulaire intrinsèque (spin) multiple impair de h/4π (h = constante de Planck). On a longtemps considéré les baryons comme des particules élémentaires mais on comprend maintenant qu'ils sont des assemblages de ...

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