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CHROMODYNAMIQUE QUANTIQUE

Dès le début des années 1930, les physiciens se sont interrogés sur les raisons de la stabilité des noyaux atomiques formés de protons, de charge électrique positive, et de neutrons, de charge nulle. La force responsable de cette cohésion, plus intense que les forces électriques qui causent une répulsion entre les protons de charges identiques, est appelée interaction forte. Elleapparaît comme une force à courte portée, agissant presque de la même façon sur le proton que sur le neutron pour assurer la stabilité des noyaux. En 1935, le théoricien japonais Hideki Yukawa (1907-1981) propose l’existence de médiateurs de l’interaction forte. Ce sont les mésons π, particules qu’on découvre effectivement en 1947 parmi les rayons cosmiques ayant impressionné des émulsions photographiques. Conformément aux prédictions de Yukawa, cette particule existe sous trois états de charge (π+, π0, π), a une masse intermédiaire entre l’électron et le proton et est copieusement produite dans les collisions entre noyaux. La première théorie des interactions fortes tente de les expliquer par des échanges de mésons π entre protons et neutrons. Cependant, la théorie est peu prédictive et échoue à rendre compte des nombreux résultats expérimentaux récoltés près des premiers accélérateurs de particules dans les années 1950-1960. Elle est remplacée au cours des années 1970 par la chromodynamique quantique (CDQ, en anglais QCD pour quantum chromodynamics), une théorie quantique des champs qui décrit avec succès de nombreux aspects du monde subatomique, et en particulier rend mieux compte des interactions nucléaires fortes par les propriétés de champs élémentaires fondamentaux qui n’ont jamais été observés directement, les quarks et les gluons, qui restent confinés en particulier dans les protons et les neutrons des noyaux atomiques.

Classification des particules

Dans les expériences de collision entre protons réalisées auprès des accélérateurs de particules des années 1950-1960, les physiciens sont décontenancés par la multiplication des types de particules sensibles aux interactions fortes qui sont produites alors ; on leur donne le nom d’hadrons (du grec hadros, « fort »). Ces hadrons sont de deux types bien distincts :

– les baryons (du grec barus, « lourd »), de masse supérieure à celle du proton se désintégrant finalement en un proton ou un neutron accompagné de photons ou de mésons. Ils apparaissent comme des fermions (du nom du physicien italien Enrico Fermi), c’est-à-dire des particules de spin (moment angulaire intrinsèque de la particule) demi-entier (en unité h/2π, h étant la constante de Planck) ;

– les mésons (du grec mesos, « moyen »), plus légers, qui sont au contraire des bosons (du nom du physicien Satyendranath Bose), c’est-à-dire des particules de spin nul ou entier. Les mésons appelés π, K, ρ, ω sont les plus légers, mais chaque expérience en fait découvrir de nouveaux.

Les théoriciens ont été amenés à grouper en multiplets les particules dont les comportements par rapport aux interactions fortes sont quasiment identiques. Le proton pet le neutron ndeviennent les deux membres d’un doublet : le nucléon, avec ses deux états de charge (p, n). Les trois états de charge du méson π deviennent les membres d’un triplet (π+, π0, π).Si l’interaction électromagnétique distingue chacune des particules du multiplet puisqu’elles ont des charges électriques différentes, on observe que la transformation qui remplace un membre d’un multiplet par un autre laisse invariantes la plupart de leurs caractéristiques vis-à-vis de l’interaction forte. Cette dernière respecte donc une symétrie, qu’on appelle symétrie d’isospin. La structure mathématique – au sens de la théorie des groupes – de cette symétrie est proche de celle de la symétrie de rotation dans l’espace, mais il s’agit[...]

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Écrit par

  • : directeur de recherche émérite au CNRS, centre de physique théorique de l'École polytechnique, Palaiseau

Classification

Pour citer cet article

Bernard PIRE. CHROMODYNAMIQUE QUANTIQUE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Les particules élémentaires - crédits : Encyclopædia Universalis France

Les particules élémentaires

Intérieur d’un proton - crédits : Encyclopædia Universalis France

Intérieur d’un proton

Couplages élémentaires de la chromodynamique quantique - crédits : Encyclopædia Universalis France

Couplages élémentaires de la chromodynamique quantique

Autres références

  • PARTICULES ÉLÉMENTAIRES

    • Écrit par Maurice JACOB, Bernard PIRE
    • 8 172 mots
    • 12 médias
    ...C'est le cas de la théorie électrofaible qui regroupe l'électrodynamique quantique et l'interaction faible. C'est aussi le cas de la chromodynamique quantique qui décrit l'interaction forte au niveau des quarks et des gluons. Ces théories sont plus complexes et généralisent l'électrodynamique...
  • AXIONS

    • Écrit par Bernard PIRE
    • 2 118 mots
    • 2 médias
    ...catalogue des objets élémentaires n’est pas la conséquence d’une observation, mais au contraire, de l’analyse des propriétés mathématiques d’une théorie, la chromodynamique quantique (QCD, pour Quantum ChromoDynamics), construite au début des années 1970 pour rendre compte des manifestations de l’interaction...
  • BOSONS ET FERMIONS

    • Écrit par Bernard PIRE
    • 1 709 mots
    ...électromagnétique et le gluon celui des interactions nucléaires fortes selon leurs descriptions modernes par, respectivement, l’électrodynamique et la chromodynamique quantiques. Leurs masses nulles semblent liées à une propriété de symétrie (dite de jauge) des forces qu’ils véhiculent. Avec les bosons...
  • CHAMPS THÉORIE DES

    • Écrit par Bernard PIRE
    • 4 463 mots
    • 1 média
    La chromodynamique, théorie des interactions fortes dont les champs fondamentaux sont les triplets de quarks et un octet de gluons est construite sur le même principe, l'invariance de jauge étant cette fois fondée sur le groupe SU(3). Une de ses intéressantes propriétés est que le phénomène...
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Voir aussi