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MORET NORBERT (1921-1998)

La vie musicale suisse est d'une extraordinaire richesse mais les compositeurs de la Confédération helvétique tardent souvent à connaître la notoriété internationale. Il en est ainsi de Norbert Moret, créateur engagé dans une voie étroite et solitaire, dont il ne faut sans doute pas attendre de descendance, mais dont l'œuvre mérite de sortir du purgatoire où elle demeure enfermée, malgré l'action de ses compatriotes Paul Sacher et Heinrich Sutermeister.

Norbert Moret naît à Ménières, village de la Haute-Broye fribourgeoise, le 20 novembre 1921. Au Conservatoire de Fribourg, il étudie le piano, l'orgue, la composition, découvre le chant grégorien et Jean-Sébastien Bach. En 1948, alors que résonnent les premiers bruits apprivoisés de la musique concrète, il part pour Paris, où il va travailler jusqu'en 1950 avec Olivier Messiaen, Arthur Honegger et René Leibowitz. En 1950 et 1951, il bénéficie d'une bourse afin de se perfectionner à Vienne dans l'art de la direction d'orchestre auprès de Wilhelm Furtwängler et de Clemens Krauss. Il regagne ensuite Fribourg, où il vivra jusqu'à sa mort, le 17 novembre 1998. Il sera professeur de musique instrumentale à l'École normale cantonale d'instituteurs de 1965 à 1982.

Norbert Moret commence à écrire au début des années 1960, d'abord dans la manière sérielle, avant de s'apercevoir que là n'est pas sa voie. Sentant que la musique a trouvé son « chemin intérieur », il compose une œuvre de musique sacrée, Psaume 85, pour ténor, chœur, deux trompettes et orgue (1966), un Concerto pour cordes, trompette et piano (1970). Déjà son art exprime, même maladroitement, le rêve, l'amour, le destin de l'homme. Dans la solitude, l'écriture s'étaie, s'aiguise, se cherche et s'affirme. Le compositeur Heinrich Sutermeister découvre ses œuvres et l'exécution, le 18 mai 1974, de Germes en éveil, pour soprano, flûte, chœur mixte et deux percussionnistes, sur un texte de Thérèse Harvey-Loup, lui apporte soudainement la notoriété.

Avec Germes en éveil, Moret est parvenu à se forger son propre langage, sa propre esthétique ; c'est pourquoi il reconnaîtra cette œuvre comme son opus 1. Dès lors, il ne déviera plus de la route qu'il s'est trouvée et qui correspond au plus profond de son être musicien. Sa musique donnera la priorité au message, à l'expression. Romantique dans l'âme, Moret n'aura, en outre, que faire des modes, de la modernité, des avant-gardes, des nostalgies néo-classiques ou postmodernes. La Nature sera pour lui le levain d'une expérience métaphysique qu'il transcrira en sons. Il écoutera le bruit des ruisseaux, tentera de capter le passage des nuages, le frémissement des blés sous l'orage, la lumière d'un sous-bois, la clarté d'une nuit étoilée. L'Étoile, précisément, est à ses yeux le symbole de la pureté originelle, le principe de vie incarnant l'amour. Cette allégorie de l'espoir, qui parcourt toute son œuvre, se « réalise », musicalement parlant, par l'accord de majeur, un accord qui, utilisé comme un « objet sonore » sans fonctionnalité tonale, est chargé d'un sens extramusical puissamment expressif.

Son catalogue, restreint, comprend de la musique de chambre, des pièces pour orchestre et de la musique vocale. Dans la première catégorie se détachent Immortelles de Jean (1981-1982), sur des poèmes de Tristan Corbière, pour récitant et ensemble instrumental (orgue portatif, orgue régale, clavecin, violon, contrebasse, trompette, clarinette basse), Sacher-Serenade (1982), pour quatuor instrumental (vibraphone, clarinette basse, orgue régale, orgue positif), et quatre pièces pour soliste : Gastlosen, pour orgue (1974), Couleurs de temps changées, pour piano (1975), Rituels, pour clavecin[...]

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Écrit par

  • : compositeur, critique, musicologue, producteur de radio

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Pour citer cet article

Alain FÉRON. MORET NORBERT (1921-1998) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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