NANOTECHNOLOGIES

Nanotechnologies et éthique

Les nanotechnologies, comme toutes les technologies, ont leur part de risque, d'inconnu et d'incertitude, qu'il faut tenter de prévoir et de contrôler. Encore faut-il garder la tête froide. La création d'un être vivant artificiel, même des plus élémentaires, relève de la fiction la plus totale : la nature est plus douée que nous. Et pourtant, la nature elle-même ne sait pas « faire » des êtres intelligents microscopiques. C'est qu'elle obéit aux lois de la physique, dans le contexte de la théorie de l'information, qui introduisent des grandeurs physiques incontournables telles que l'énergie, l'entropie, le bruit, etc. Les discours, parfois délirants, sur les dangers des nanotechnologies, liés à l'apparition de matière intelligente constituée d'objets microcoscopiques intelligents et qui échapperait au contrôle humain, sont du ressort de la science-fiction et le resteront. L'argument de l'émergence d'une intelligence collective de ces multiples objets ignore les limites de cette intelligence collective (ainsi que l'on peut l'observer dans les sociétés animales telles que les fourmilières), quand elle n'est pas accompagnée d'échanges massifs d'informations (eux aussi soumis aux lois physiques, c'est-à-dire en particulier nécessitant énormément d'énergie), comme cela se passe dans le cerveau entre les neurones.

Il n'en est pas moins vrai qu'en nanotechnologies, comme dans tout nouveau domaine, il faut être vigilant sur les effets imprévus et nuisibles. Si les effets bénéfiques attendus des nanotechnologies sont très importants, en premier lieu la moindre ponction sur les ressources naturelles obtenue par l'amélioration des performances, la dimension nanométrique permet à des objets libres (à l'état libre de nanoparticules, c'est-à-dire non assemblés dans des matériaux ou des composants) de cette échelle de franchir des filtres artificiels ou des barrières naturelles comme la peau. Les systèmes incorporant des nanoparticules doivent faire l'objet d'études d'impact détaillées, que ce soit lors de leur élaboration, de leur utilisation ou encore de leur mise au rebut. Mais cela n'est pas, à nos yeux, très différent des précautions qu'il faut prendre dans tous les secteurs, comme cela est imposé par la directive européenne REACH (Registration, Evaluation and Authorization of Chemicals) sur les produits chimiques. La biologie est un cas particulier, avec ses progrès extraordinaires, déjà à l'origine de soulagement pour beaucoup de souffrances humaines, encore porteuse de beaucoup d'espérance (que l'on songe aux espoirs de vaincre les grands fléaux tels que les maladies d'Alzheimer et de Parkinson, le sida), mais aussi source de nouveaux dangers, par détournement des objectifs ou par effets secondaires non prévus. Les réglementations des médicaments intègrent déjà l'analyse des effets secondaires par des essais cliniques très longs et détaillés, qu'ils soient à base de nanotechnologies ou non.

Les nanotechnologies devraient avoir un impact immense dans l'ensemble des secteurs d'activité et en particulier pour relever les grands défis posés par l'énergie, l'environnement et la santé. C'est pour cela qu'elles font l'objet de beaucoup d'attention de la part des gouvernements et que les laboratoires se sont largement mobilisés. Par leurs promesses et leurs mystères, ces structures nanométriques constituent en outre de fascinants objets de recherche.