MEMBRANES CELLULAIRES

Toute cellule vivante est délimitée par une membrane, dite indifféremment cellulaire ou plasmique. Cette membrane est d’abord une barrière qui sépare l'intérieur de l'extérieur de la cellule. La membrane plasmique est indispensable à la vie ; sa rupture signe la mort de la cellule par perte des équilibres du milieu intracellulaire. Cette fonction de limite se double de la capacité d’assurer le passage des molécules nécessaires à la vie cellulaire, d’éliminer des produits toxiques et, de manière plus générale, d’assurer l’homéostasie cellulaire.

Première observation microscopique de la structure de l’écorce d’un arbre (1655) - crédits : Bettmann/ Getty Images

Première observation microscopique de la structure de l’écorce d’un arbre (1655)

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Par ailleurs, chaque cellule – sauf dans le monde bactérien – est traversée par des réseaux de membranes, d’apparence très voisine de celle de la membrane plasmique, en contact les unes avec les autres, reliant les organites et pouvant s’ouvrir à l'extérieur. Les organites contenus dans la cellule – noyau, mitochondries, appareil de Golgi, chloroplastes – sont eux-mêmes également entourés d’une membrane. La découverte de l'organisation interne de la cellule, des mouvements coordonnés qui l’animent, et l’étude des fonctions des membranes imposent l’image d’une cellule très organisée, siège de remaniements permanents, dans laquelle la membrane plasmique constitue une interface dynamique qui met en contact l'intérieur et l'extérieur de la cellule sans pour autant rompre la nécessaire séparation des deux milieux.

La double couche de lipides, une structure commune à toutes les membranes biologiques

La membrane plasmatique, qui sépare le contenu intracellulaire du milieu extracellulaire, est la condition d’existence de la cellule. Quelles qu’aient été les compositions de ces deux milieux lors de l'apparition des premières cellules, ils diffèrent actuellement par la concentration en différentes molécules, ions, protéines, etc. Le maintien de cette différence est lié à la nature et aux propriétés de la membrane. Les hypothèses sur sa nature ont varié. Au début du xxe siècle, on estimait qu’elle était surtout constituée de protéines. En 1925, partant de membranes de globules rouges purifiées – on avait fait éclater ces cellules sans noyau et on les avait lavées de leur cytoplasme –, on a montré que les membranes résiduelles étaient constituées, en parties égales, de protéines et de lipides.

En 1935, s’appuyant sur des études antérieures portant sur la structure des films de lipides en interface avec l’eau, James F. Danielli et Hugh Davson proposent le modèle de la bicouche de phospholipides pour rendre compte de la structure générale des membranes biologiques. Ces molécules sont constituées invariablement d'une tête hydrophile composée de phosphate et de glycérol (ou d'autres polyalcools), et d'une queue hydrophobe, composée d'acides gras de structures très différentes. Aux phospholipides s’ajoutent les glycolipides d’organisation similaire. En milieu aqueux salin, ces molécules vont spontanément s’organiser de façon à minimiser le contact de l'eau avec la partie lipidique. Plusieurs structures peuvent se former, mais l'organisation spontanée en deux couches est la base structurale de la membrane plasmatique qui est en interface avec deux compartiments aqueux : les têtes hydrophiles du feuillet externe sont en contact avec le milieu extracellulaire, celles du feuillet interne le sont avec le milieu intracellulaire. Les queues lipidiques des deux feuillets sont en contact les unes avec les autres et forment un milieu hydrophobe. L’épaisseur de la membrane varie de 6 à 8 nanomètres (1 nm = 109 m). Le modèle de Danielli et Davson se fonde sur la stabilité thermodynamique  de la bicouche. Cette organisation de base a été sans cesse vérifiée : par la microscopie électronique sur des coupes colorées à l’acide osmique et, dans les années 1960, par la diffraction des rayons X. Elle a été complétée au fur et à mesure des développements de la biologie cellulaire. On a appris, vers 1950, que le cholestérol, dans les cellules animales du moins, est en solution dans la phase hydrophobe de la membrane plasmique, qu’il stabilise, mais absent de la plupart des membranes intracellulaires. D'autres lipides ou substances liposolubles sont également ancrés dans la phase lipidique des différents types de membranes, comme des protéines hydrophobes et des quinones, essentielles au métabolisme des mitochondries, par exemple. Les différences dans la nature des lipides déterminent les propriétés physico-chimiques de la membrane des divers types cellulaires : plus ou moins grande viscosité, mobilité latérale de ses composants, épaisseur, etc. Enfin, les deux couches lipidiques ne sont pas équivalentes ; la membrane plasmique est profondément asymétrique. Divers types de molécules hydrophiles, en particulier des sucres complexes, sont greffés sur les glycolipides, les phosphates de la couche externe des phospholides et des protéines transmembranaires ; c’est le cas, par exemple, des sucres qui déterminent les groupes sanguins. Aussi, le phospholipide phosphaditylsérine est surtout présent dans le feuillet interne. La surface externe de la membrane est ainsi couverte de sucres complexes remplissant de nombreuses fonctions, au contraire de la couche interne, qui est entièrement glabre. L’asymétrie des deux faces de la membrane cellulaire est déterminante pour l’ensemble de son fonctionnement.

Types de lipides de la membrane cellulaire - crédits : Encyclopædia Universalis France

Types de lipides de la membrane cellulaire

Visualisation de la membrane cellulaire - crédits : Biophoto Associates/ SPL

Visualisation de la membrane cellulaire

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Écrit par

  • : chercheur en histoire des sciences, université Paris VII-Denis-Diderot, ancien chef de service à l'Institut Pasteur

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Première observation microscopique de la structure de l’écorce d’un arbre (1655) - crédits : Bettmann/ Getty Images

Première observation microscopique de la structure de l’écorce d’un arbre (1655)

Types de lipides de la membrane cellulaire - crédits : Encyclopædia Universalis France

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