Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

LE BARBIER DE SÉVILLE, Pierre-Augustin Caron de Beaumarchais Fiche de lecture

Le Barbier de Séville, ou la Précaution inutilefut créé à la Comédie-Française le 23 février 1775 dans une version en cinq actes et connut un échec retentissant. Mais Beaumarchais (1732-1799) sut revoir rapidement sa pièce pour la resserrer en quatre actes. Ce fut alors un triomphe mémorable, et le premier grand succès au théâtre de l'auteur. Le parfum de scandale qui flottait autour de Beaumarchais à la suite de diverses affaires et son goût immodéré pour les allusions piquantes donnèrent des armes à la censure qui tarda à autoriser la première représentation. La pièce est publiée avec une Préface, un morceau de bravoure, insolent, vif et drôle, la Lettre modérée sur la chute et la critique du « Barbier de Séville », où Beaumarchais dessine également les contours de son projet littéraire. Le Barbier de Séville frappe par son originalité : c'est une comédie qui, sur un canevas très classique, voire banal, brode des incidents, un suspense et une poésie comiques d'une radicale nouveauté.

L'imbroglio

Le Barbier de Séville constitue le premier épisode d'une trilogie dramatique qui comprendra ensuite Le Mariage de Figaro (1784) et La Mère coupable (1792). Ses protagonistes reviennent dans ces deux pièces (auxquelles il faudrait adjoindre, en toute rigueur, le Compliment de clôture), fictivement séparées dans le temps par quelques années. « Un vieillard amoureux prétend épouser demain sa pupille ; un jeune amant plus adroit le prévient, et ce jour même en fait sa femme, à la barbe et dans la maison du tuteur. Voilà le fond... », tel que le résume Beaumarchais. Rien de plus simple en apparence que cette intrigue. Voyons sa mise en œuvre.

Nous sommes dans une rue de Séville, à l'aube. Un jeune homme fait le guet sous le balcon de la jolie Rosine dont il espère être remarqué. C'est le comte Almaviva qui est tombé amoureux de la jeune fille sans lui avoir jamais parlé, et qui a quitté Madrid pour la suivre. Apparaît un personnage au costume pittoresque, Figaro, ancienne connaissance du comte et présentement « barbier de Séville », qui officie précisément chez le docteur Bartholo, tuteur de Rosine. Il apprend au comte que le vieillard s'apprête à épouser sa pupille – le soir même, on le saura plus tard –, mais se fait fort d'aider le galant à s'introduire dans la place. De sa fenêtre, Rosine laisse échapper un papier, une chanson au titre symbolique, La Précaution inutile, au grand dam de Bartholo. Elle y demande au jeune homme de se faire connaître en chantant une romance. Il se présente sous le nom de Lindor, bachelier de son état.

Dans les actes suivants, qui se déroulent à l'intérieur de la maison du docteur, nous assistons aux tentatives successives du comte, déguisé en soldat, puis en bachelier maître de musique, pour tromper la surveillance du barbon et entrer en contact avec Rosine – manœuvres facilitées par Figaro mais intelligemment contrées par Bartholo et son allié don Bazile, le maître de musique de la jeune fille. Au fil des scènes, Beaumarchais emmêle les fils de l'intrigue en un imbroglio d'une éblouissante virtuosité, qui atteint son sommet avec la « scène de la stupéfaction » : le comte affirme être envoyé par don Bazile, malade, pour donner une leçon de musique à Rosine ; il a convaincu Bartholo qu'il était dans son camp grâce à un stratagème complexe et compromettant (il lui a remis une lettre de Rosine) mais doit en informer Rosine de toute urgence. Les amoureux jouissent à peine d'un instant d'entretien, ménagé par Figaro, lorsque arrive inopinément don Bazile. Stupéfaction générale. Tension extrême. Chacun a intérêt, ou croit avoir intérêt, à éviter une explication générale. Le comte, sans aucun doute le plus directement menacé d'une révélation, manœuvre de telle façon qu'il réussit à pousser Bartholo contre Bazile, finalement renvoyé dans son[...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : professeur à l'université de Paris-IV-Sorbonne

Classification

Pour citer cet article

Pierre FRANTZ. LE BARBIER DE SÉVILLE, Pierre-Augustin Caron de Beaumarchais - Fiche de lecture [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • BEAUMARCHAIS PIERRE-AUGUSTIN CARON DE (1732-1799)

    • Écrit par Pierre FRANTZ
    • 4 172 mots
    • 1 média
    Au milieu de toute cette agitation, Beaumarchais trouve le temps d'écrire un second drame, Les Deux Amis (1770) et une comédie, Le Barbier de Séville, qui est représentée pour la première fois le 23 février 1775. Il achève Le Mariage de Figaro en 1778. Il lance en 1780 (le prospectus paraît...
  • COMIQUE

    • Écrit par Elsa MARPEAU
    • 1 069 mots

    Le comique transcende les genres, et notamment la comédie. Il désigne plus généralement la qualité d'un personnage, d'une situation ou d'un texte, qui suscite le rire chez le lecteur ou le spectateur. Mais plutôt que du comique, on devrait parler de « comiques ». On en distingue généralement trois...

Voir aussi