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LA THÉORIE ÉCONOMIQUE DU SOCIALISME, Oskar Lange Fiche de lecture

En publiant en 1938, La Théorie économique du socialisme, Oskar Lange affine et précise deux articles de 1936 et 1937 où il amorçait une rupture nette avec la théorie marxiste de la valeur travail. Alors que déjà, au pays du « socialisme réel », les planificateurs soviétiques se débattent pour éviter les pénuries, il tente de leur donner les moyens de retrouver l'allocation optimale des ressources.

Le socialisme de marché

Lange part du constat que les programmes économiques socialistes reposent sur deux propositions : l'abolition de la propriété privée, la disparition de la concurrence et du marché. Pour lui, cette deuxième revendication constitue une erreur, car si le marché est insupportable quand il permet aux propriétaires privés d'accumuler des profits, il constitue le meilleur moyen de favoriser la production et d'assurer l'équilibre entre l'offre et la demande. Ce qui est fondamental pour mener une politique socialiste, c'est d'abolir la propriété privée. Il propose donc de conserver les mécanismes du marché, devenant ainsi le théoricien du « socialisme de marché ». Pour appuyer sa thèse, il part des travaux de Léon Walras, dont il fait son maître à penser à l'égal de Karl Marx. Pour Walras, le système d'équations qui décrit l'économie concurrentielle permet de trouver un système de prix unique réalisant l'équilibre entre l'offre et la demande. Ses idées, fondées sur un constat purement mathématique de l'existence de prix d'équilibre, suscitent deux types de critiques : comment le marché peut-il atteindre ce système de prix idéal quand on sait que les consommateurs sont susceptibles d'acheter à tout moment, même à un prix qui n'est pas celui de l'équilibre ? Comment cet équilibre peut-il être stable quand la concurrence se détruit d'elle-même ?

Walras a tenté de répondre à ces critiques en imaginant un personnage fictif, le peu convaincant « commissaire-priseur walrasien », chargé de faire émerger les prix d'équilibre. Lange en reprend l'idée mais substitue au commissaire-priseur virtuel le bureau central de planification. Il écrit notamment : « notre étude de la détermination des prix d'équilibre dans une économie socialiste a montré que le processus de la détermination des prix est tout à fait analogue à celui que l'on trouve sur un marché concurrentiel. Le bureau central de planification remplit les fonctions du marché ». Les enchères qui conduisent au système de prix d'équilibre sont de sa responsabilité. Affichant un système de prix, il demande aux autorités locales de collecter les demandes des consommateurs, lesquels doivent se comporter librement et adopter de ce fait des attitudes conformes au modèle néo-classique. De même, les planificateurs demandent aux responsables des usines combien ils sont prêts à produire pour le prix affiché, en leur demandant de se comporter également comme s'ils étaient en situation de concurrence. Les réponses sont centralisées et on réitère ces demandes jusqu'à l'égalité de l'offre et de la demande. Le socialisme permet ainsi de trouver un système de prix stable. Par ailleurs, l'État, unique propriétaire des moyens de production, récupère les profits. Il les emploie à deux choses : la couverture des besoins d'investissement nécessaire au financement de la croissance ; la distribution de revenus complémentaires du salaire en faveur de certaines catégories d'ouvriers aux conditions de travail particulièrement difficiles, complément de revenu que Lange appelle le dividende social.

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