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ECCLÉSIASTIQUE JURIDICTION

Expression désignant le pouvoir de gouverner selon sa fin propre la communauté chrétienne, pouvoir tel que, sans lui, les actes de régence seraient nuls. Selon une tradition canonique assez récente, on le distingue du pouvoir d'ordre, sur lequel repose l'ordination et qui est tourné vers les actes de sanctification. L'emploi du terme « juridiction » (synonyme de faculté, de pouvoir, de compétence) est ici plus large qu'en droit français, où cette notion n'est utilisée que pour l'exercice de la compétence judiciaire. Dans sa nature profonde, ce pouvoir est de type « vicarial » : sa légitimité vient de ce qu'il est exercé au nom de Jésus-Christ, chef et tête de l'Église, ainsi qu'au nom de celle-ci. Des lois en fixent les modalités de transmission et d'exercice.

La juridiction ordinaire, inhérente à la fonction, est exercée soit personnellement par son titulaire (par exemple, le pontife romain sur l'ensemble des Églises, l'évêque sur son diocèse, le supérieur religieux sur ses sujets ; on parle alors de juridiction ordinaire propre) soit au nom d'un autre (par exemple par le vicaire général, qui agit au nom de l'évêque ; c'est alors la juridiction ordinaire vicaire ou vicariale). La juridiction ordinaire est, en général, globale et comprend toutes les fonctions, l'Église ne connaissant pas la séparation des pouvoirs, mais seulement une répartition des fonctions, rendue possible notamment par la juridiction ordinaire vicariale. La juridiction ordinaire est le plus souvent territoriale, ses titulaires sont alors appelés « ordinaires » des lieux. Elle peut appartenir à un collège, tels le concile œcuménique ou bien la conférence épiscopale. La juridiction est déléguée, lorsqu'elle est accordée par un titulaire de la juridiction ordinaire pour un ensemble de fonctions ou pour un acte déterminé. La juridiction se distingue du pouvoir dominatif des supérieurs religieux, car elle est fondée sur la puissance publique, tandis que celui-ci s'exerce en relation avec le vœu d'obéissance des sujets. Elle concerne le for externe, c'est-à-dire le comportement extérieur du sujet, ou seulement le for interne de la conscience (dans le sacrement de pénitence ou dans d'autres cas, de plus en plus rares). Mais la juridiction au for externe comprend en principe le for interne (cette distinction, inconnue dans les autres systèmes de droit, correspond à la nature, avant tout spirituelle, de l'Église).

Le droit canonique prévoit des suppléances dans les cas où la juridiction vient à manquer, par exemple, dans le cas d'une « erreur commune » ou d'un doute qualifié ; cet aménagement intéresse surtout le for interne, en fonction des exigences du bien spirituel des fidèles ou du bien commun de la communauté.

— Jean PASSICOS

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Pour citer cet article

Jean PASSICOS. ECCLÉSIASTIQUE JURIDICTION [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • ABBÉ

    • Écrit par Patrice SICARD
    • 1 197 mots

    Le mot abbé vient vraisemblablement du syriaque abba, signifiant père, où il traduisait le respect porté à un dignitaire de la société civile ou religieuse. Du syriaque le mot passa, vers le IIIe siècle, dans la langue du monachisme ancien de l'Orient chrétien.

    On est alors...

  • ARCHEVÊQUE

    • Écrit par Jacques PONS
    • 348 mots

    Titre fréquemment donné dans les Églises chrétiennes à un évêque ayant sur les autres évêques d'une province une certaine juridiction, qu'il exerce en plus de son pouvoir diocésain, mais qui n'implique pas une supériorité d'ordre. L'archevêque est l'héritier des anciens évêques métropolitains,...

  • AUTOCÉPHALES ÉGLISES

    • Écrit par Hervé LEGRAND
    • 1 043 mots

    L'autocéphalie (du grec autoképhalos, « qui est sa propre tête ») est le régime canonique qui règle les rapports institutionnels existant entre les diverses Églises sœurs dont se compose l'Église orthodoxe. Deux traits caractérisent ce régime : le refus d'une primauté de...

  • CANONIQUE DROIT

    • Écrit par Patrick VALDRINI
    • 8 003 mots
    ...évêques sont les chefs des Églises particulières qui leur sont confiées, toutefois sans jouir d'une autonomie totale, en raison de leur appartenance au collège des évêques, lequel existe et exerce son pouvoir en communion avec le pontife romain. L'autorité du collège s'exerce par le moyen d'actes collégiaux...
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Voir aussi