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MAYNARD SMITH JOHN (1920-2004)

Théorie des jeux et évolution

Les premiers travaux scientifiques de Maynard Smith portent sur la biologie du vieillissement chez la mouche Drosophilasubobscura. Ils montrent que, si l’on réduit artificiellement l’énergie dépensée par les femelles pour la reproduction, leur durée de vie est considérablement accrue. Cette étude, pionnière pour l’époque, fait écho aux recherches qui interprètent le vieillissement en termes de coûts biologiques engendrés lors de la période de reproduction.

À partir des années 1960, il commence à développer ses travaux théoriques qui feront sa notoriété. La contribution la plus importante est sans doute l’application de la théorie des jeux au domaine de l’évolution. Dans Game Theory and the Evolution of Fighting (La théorie des jeux et l’évolution du combat, 1972), il montre que l’évolution par sélection naturelle ne favorise pas systématiquement les individus les plus agressifs. En fait, un animal qui se montre agressif dans un but de pouvoir (en l’occurrence, l’accès aux femelles) met sa vie en péril et prend le risque de ne pas transmettre ses gènes. Il en résulte des stratégies comportementales de compromis qui limitent ce risque et se traduisent par des rituels qui préviennent un affrontement physique à l’issue fatale. L’originalité de Maynard Smith est d’avoir offert une modélisation mathématique de ce genre de spéculation avec l’aide de la théorie des jeux. Un autre exemple d’utilisation de cette méthode est connu sous l’expression « modèle des faucons et des colombes ». Une population animale entièrement constituée de « colombes » (dans le sens d’individus pacifiques) est instable, car un seul mutant « faucon » (dans le sens d’un individu agressif) dominerait vite et répandrait ses gènes dans la population. Mais une population entièrement composée de « faucons » sera désavantagée, en termes reproductifs, relativement à une population entièrement composée de « colombes ». Maynard Smith montre comment, sous certaines conditions, au sein d’une population donnée, il existe une proportion de « faucons et de colombes »  qui constitue une stratégie évolutionnaire stable. Ce concept est sans doute la contribution la plus importante de Maynard Smith. D’une grande généralité, il a été utilisé, non seulement dans de nombreuses situations biologiques, mais aussi en théorie économique. Il s’agit de l’une des solutions les plus convaincantes à l’énigme de l’évolution de la coopération, tant au cours de l’histoire de la vie que dans la théorie économique : comment un comportement altruiste peut-il venir à dominer alors que tout « tricheur » est avantagé, puisqu’il est libéré du coût de la coopération ? La théorie des jeux a de nombreuses autres applications en théorie de l’évolution. Maynard Smith les a développées dans Evolution and the Theory of Games (L’évolution et la théorie des jeux, 1982), livre difficile mais incontournable pour quiconque veut aujourd’hui se familiariser avec la théorie de l’évolution. Ces ouvrages ont été l’aboutissement d’une expertise acquise de longue date en biologie théorique (mathématiques appliquées à la biologie).

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Écrit par

  • : professeur à l'université de Paris-I-Panthéon-Sorbonne

Classification

Pour citer cet article

Jean GAYON. MAYNARD SMITH JOHN (1920-2004) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • POPULATIONS ANIMALES (DYNAMIQUE DES)

    • Écrit par Robert BARBAULT, Jean-Dominique LEBRETON
    • 12 002 mots
    • 15 médias
    ...évolutifs à l'aide de modèles théoriques d'optimalité, issus notamment de la théorie des jeux. Un rôle essentiel dans cette approche est joué par la notion de stratégie « évolutivement » stable, due au britannique John Maynard-Smith, qui correspond à une stratégie qui ne peut être envahie par aucune...

Voir aussi