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BÖLL HEINRICH (1917-1985)

« Où étais-tu, Adam ? – J'étais à la guerre. »

La guerre interrompt ses premiers essais littéraires, qui resteront inédits, et la lecture des écrivains dont il se sent proche : Hebbel, Kleist, Dickens, Dostoïevski, Bloy, Mauriac et Bernanos. Fantassin et soldat de première classe, Böll connaît les garnisons de Pologne, les fronts de France et de Russie, les hôpitaux de Roumanie et les dangereuses péripéties de la désertion. Fait prisonnier par les Américains, puis libéré en novembre 1945, il retrouve à Cologne Anne-Marie Cech, qu'il a épousée en 1942 et qui lui donnera trois fils. Plongé dans des études de germanistique, il travaille aussi dans l'atelier de menuiserie de son frère et au bureau des statistiques de Cologne. Il ne vivra librement de sa plume qu'à partir de 1951. Comme celle de Wolfgang Borchert, son œuvre est d'abord littérature de la guerre et des ruines (Trümmerliteratur). Les premières short stories de 1947 où l'on sent l'influence de Hemingway, réunies ensuite sous le titre La Mort de Lohengrin (Wanderer, kommst du nach Spa..., 1950), le premier long récit en prose, Le train était à l'heure (Der Zug war pünktlich, 1949), et les trois romans suivants, Où étais-tu, Adam ? (Wo warst du, Adam ?, 1951), Rentrez chez vous, Bogner (Und sagte kein einziges Wort, 1953), Les Enfants des morts (Haus ohne Hüter, 1954), concentrent leur thématique autour de la « monstrueuse machinerie d'ennui sanglant ». Tragique alibi de la responsabilité déléguée, la guerre substitue au principe de la réalité un ordre absurde et inhumain. C'est aussi le cortège de la misère, du marché noir, de la solitude, le désarroi du retour, les difficultés de la réadaptation. La reconstruction de l'Allemagne, le redressement économique creusent encore le fossé entre victimes et profiteurs, amènent l'établissement d'une société « restaurative », et Böll considère comme « manquée » la « grande chance » qu'aurait représentée pour son pays un recommencement à partir d'une alliance marxiste-catholique.

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Écrit par

  • : agrégée de l'Université, maître assistante à l'U.E.R. d'études germaniques de l'université de Paris-IV-Sorbonne

Classification

Pour citer cet article

Michèle MONTEIL. BÖLL HEINRICH (1917-1985) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Heinrich Böll et Soljénitsyne - crédits : Jean-Claude Francolon/ Gamma-Rapho/ Getty Images

Heinrich Böll et Soljénitsyne

Autres références

  • ALLEMANDES (LANGUE ET LITTÉRATURES) - Littératures

    • Écrit par Nicole BARY, Claude DAVID, Claude LECOUTEUX, Étienne MAZINGUE, Claude PORCELL
    • 24 585 mots
    • 29 médias
    ...du « miracle économique ». L'antihéros de cette période, le personnage qui incarne la persistance d'une certaine Allemagne, c'est le petit-bourgeois, Heinrich Böll peint les milieux catholiques rhénans en morcelant et en multipliant les perspectives, comme dans Billard à neuf heures et demie (1959)....
  • GROUPE 47

    • Écrit par Pierre GIRAUD
    • 2 698 mots
    • 1 média
    ...langue doit être épurée. Il faut, selon l'expression de Weyrauch, bannir la « langue de l'esclavage », tourner le dos à la « calligraphie ». À ses débuts, Heinrich Böll confie ses difficultés à écrire, ne serait-ce qu'une demi-page de prose. Pratiquer la « table rase » (Kahlschlag) pour reconquérir...
  • SHOAH LITTÉRATURE DE LA

    • Écrit par Rachel ERTEL
    • 12 469 mots
    • 15 médias
    En Allemagne, Heinrich Böll dit, dans des romans, comme Rentrez chez vous, Bogner (1953) et Les Enfants des morts (1954) quelles sont les répercussions de la catastrophe : la mise à mort de l'humain, le mensonge et le déni, l'inconscient trouble d'une Allemagne qui refuse d'assumer sa culpabilité, qui...

Voir aussi