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CAVALCANTI GUIDO (1255 env.-1300)

Poète du dolce stil novo appelé par Dante « le premier de mes amis », Cavalcanti naît à Florence d'une noble famille guelfe. Il se mêle aux luttes politiques qui divisent alors la ville, prenant le parti des blancs ; il est exilé à Sarzana en 1300. Malade, on l'autorise à revenir à Florence où il meurt presque aussitôt.

Il a dominé la jeunesse intellectuelle de son temps : Lapo Gianni, Dino Compagni, Cino da Pistoia... Ses amis, et plus tard Boccace, le décrivent comme un personnage courtois mais dédaigneux, solitaire, intransigeant, doutant même des vérités de la foi : l'ottimo laico, le parfait laïc. Son canzoniere, composé surtout de sonnets et de ballades (cinquante-deux poésies), ne reflète guère sa participation à la vie politique, mais plutôt son expérience sentimentale, liée à deux femmes : Giovanna et Mandetta. Il traite donc de l'amour, comme Guinizelli à qui il emprunte certaines idées fondamentales : le lien amour-noblesse où l'amour sert de révélateur à la vertu de l'amant, le thème de la femme angélique dont il fait la louange (comme dans la ballade Fresca rosa novella) ; il ne s'en tient cependant pas qu'à la conception de Guinizelli. Pour lui, la dame aimée ne peut être qu'un idéal lointain, inaccessible, et cet amour-adoration n'a de fin qu'en soi : la dame n'est qu'une image parée de vertus, décevante et indigne de l'amour qu'on lui porte. L'amour exclut toute idée de possession matérielle et tout véritable rapport de communication. Cavalcanti examine, d'une part, la nature et le contenu de l'amour et, d'autre part, sa phénoménologie. Influencé par sa culture philosophique, il procède de façon scientifique, se voulant objectif : ainsi dans son texte doctrinal le plus célèbre, Donna me prega, où il établit une distinction entre les diverses puissances organiques, il fait de l'amour une force liée à l'âme sensitive, une force irrationnelle, bouleversante, destructrice. L'amant ressent d'abord les effets de l'amour dans son corps : les yeux, l'esprit, le cœur sont atteints. Tiraillé par des forces contradictoires, devenues personnages du drame qu'est le texte (l'Amour, la Pitié, la Mort, les Spiritelli, petits esprits personnifiant les facultés de l'âme), l'amant perd sa raison, son identité ; l'amour le mène ainsi à la mort. Cavalcanti passe du bonheur à la mélancolie et au désespoir. Dans une ballade, Perch'i'non spero di tornar giammai, il mêle avec tendresse les deux motifs de sa poésie, extase et angoisse, pour s'adresser à sa dame et à sa « patrie » en se servant de l'écriture comme intermédiaire. Cavalcanti utilise habituellement un langage raffiné, précis, parfois hermétique mais puissant ; la douleur et la violence se purifient au niveau du langage, qui reste choquant par son intensité et son vécu, caractères peu courants dans la poésie de cette époque.

— Claude MINOT

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Pour citer cet article

Claude MINOT. CAVALCANTI GUIDO (1255 env.-1300) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • DOLCE STIL NOVO

    • Écrit par Paul RENUCCI
    • 1 426 mots
    ...historique d'une sorte de « pléiade » toscane réunie a posteriori sous l'étiquette dolce stil novo. Une tradition unanime y fait entrer, aux côtés de Dante, Guido Cavalcanti, Lapo Gianni, Gianni Alfani, Cino da Pistoia, Dino Frescobaldi, tandis que d'autres poètes tels que Chiaro Davanzati, Dante da Maiano,...

Voir aussi