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SOMMARUGA GIUSEPPE (1867-1917)

Né à Milan dans une famille d'artisans, Giuseppe Sommaruga fait ses études d'architecte (1883-1887) à l'Académie de Brera alors dominée par l'enseignement de Camillo Boito. Ce maître milanais, adversaire du néo-gothique, prône le retour au roman qui serait le véritable style national de l'Italie. Son goût pour les surfaces nues ne sera pas sans influencer Sommaruga qui se classera deuxième du concours international lancé par la République argentine pour l'édification du palais du Congrès (1895). Le projet de Sommaruga s'insère dans l'éclectisme ambiant sans aucune note particulière. Mais on retrouve l'esprit de Boito dans la villa Aletti édifiée à Rome en 1897. C'est un bloc simple, sans décoration ni trace du « végétalisme » de l'Art nouveau qui commence alors à s'imposer en Europe.

Le projet très néo-grec que Sommaruga présente pour l'Exposition internationale de Saint Louis (1903) ne se distingue pas de la production courante des tenants de l'académisme. Ce sera à Milan, la même année, qu'il va faire un geste de bravade aussitôt interprété comme tel par l'opinion publique. Le palais Castiglioni, 47, corso Venezia, s'affirme comme une œuvre fortement marquée par tous les tics du baroque. Sur un soubassement d'énormes pierres brutes à peine épannelées, s'élève un bâtiment de trois niveaux dont la façade est percée d'ouvertures symétriques. Il est dominé par un attique surmontant une large corniche, rappel évident d'un motif cher au classicisme européen. L'inquiétante originalité de cette construction réside dans la suppression des frontons surmontant les fenêtres. Avec la collaboration du sculpteur Ernesto Bazzaro, Sommaruga les a remplacés par des groupes en ronde bosse où s'ébattent de grasses nudités mêlées à des putti empruntés à l'art de la Renaissance. Le scandale fut grand et divisa la bourgeoisie milanaise en deux camps, le plus enthousiaste se réjouissant de voir apparaître un nouveau Bernin. On peut se demander comment certains réussirent à exalter cette fantaisie néo-baroque au nom de l'Art nouveau.

Sommaruga poursuit sa carrière dans la même voie d'outrance. Que ce soit dans le palais Viviani (Trieste, 1906) où des cariatides s'agrippent aux balcons, ou bien encore à la villa Romeo (Milan, 1908) : cette dernière se signale comme au palais Castiglioni par de charmants putti mais aussi par des motifs floraux. À la différence des « floralistes » de l'Art nouveau, Sommaruga n'abusera jamais de ces derniers, pas plus d'ailleurs que de la ligne « serpentine ». Celle-ci est particulièrement absente de plusieurs gigantesques mausolées dont il aura la commande : leurs droites rigoureuses semblent annoncer une « nouvelle tendance ». Dénomination qu'un groupe de jeunes architectes milanais va justement choisir en 1914, groupe animé par Antonio Sant'Elia, lui aussi ancien élève de l'Académie de Brera. Avec ces « futuristes » – ils sont soutenus par le poète Marinetti, fondateur du mouvement –, le rejet de la tradition et des « styles historiques » devient la règle. Pour faciliter l'adoption des nouvelles techniques au service des nouveaux matériaux, tout le bric-à-brac légué par l'Antiquité ainsi que les fantaisies naturalistes de l'Art nouveau ne sont d'aucune utilité. La voie est ouverte au « rationalisme » architectural prosterné devant le mur nu. Boito l'avait redécouvert mais Sommaruga en fait un emploi trop mesuré pour être considéré comme un précurseur.

— Roger-Henri GUERRAND

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Roger-Henri GUERRAND. SOMMARUGA GIUSEPPE (1867-1917) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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