Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

MATHÉMATIQUES ENSEIGNEMENT DES

La mathématique, outil d'exploration du réel

Ce qui précède concerne l'enseignement de la mathématique en elle-même, de ce que l'on peut appeler la mathématique pure. Et cela nous amène à un autre problème crucial, extrêmement mal posé sous la forme d'une prétendue opposition entre les mathématiques dites pures et les mathématiques dites appliquées, ou entre ce que l'on baptise trop rapidement le concret et l'abstrait.

La mathématique n'est pas en elle-même une étude du monde réel, mais elle est un outil puissant pour aider à son exploration. Comment cette aide intervient-elle ? Telle est la question à laquelle il faut répondre pour expliquer que la mathématique n'est pas un pur jeu de l'esprit, pour comprendre comment elle est présente dans la plupart des activités humaines, à quelles conditions sa collaboration avec les autres sciences peut être féconde et, par suite, comment dans cette optique son enseignement doit être conçu.

Situations et modèles

Ce que l'on appelle la réalité, ou l'univers réel, ou le monde concret des phénomènes, dans lequel nous sommes plongés et dans lequel nous vivons, peut paraître simple, parce que familier sous certains de ses aspects, à l'observateur superficiel. La moindre réflexion le révèle immense, complexe, opaque et insondable. Le saisir dans sa totalité et dans toute sa profondeur est l'objet d'un souhait qui est peut-être légitime, mais qui n'a jamais été exaucé. Inconsciemment, le plus souvent, dans nos activités pratiques, consciemment dans l'investigation scientifique, nous restreignons notre ambition et nous limitons le domaine de notre exploration. La première démarche scientifique est en effet la détermination d'une situation, c'est-à-dire la délimitation d'un champ d'activité restreint à l'intérieur d'un champ plus vaste, la fixation des objectifs que l'on se propose d'atteindre et des aspects auxquels on accordera son attention. Le choix des situations caractérise une science, au moins à chaque stade important de son développement : distinction par exemple des propriétés physiques et chimiques, ou des propriétés macroscopiques et microscopiques.

Si la situation est dans la réalité, elle n'en est qu'une partie, et une première erreur consiste à oublier cet aspect partiel de la situation.

L'explication scientifique s'efforce de créer ensuite un modèle qui permettra de rendre compte de la situation, de la rendre intelligible et d'être capable de prévision à son sujet. Les modèles les plus maniables sont les modèles mathématiques, et il n'y a pas lieu de manifester à ce propos une quelconque fierté de mathématicien, car on pourrait prétendre, après tout, que c'est une infirmité de l'homme de ne vraiment comprendre que cette mathématique qu'il a faite et qu'il continue à faire. Un bon modèle doit avoir des propriétés intrinsèques de cohérence et de commodité ; les assurer est le propre du travail mathématique. Les propriétés de la situation concrète que l'on retient dans le modèle sont les points de départ, les axiomes, de la déduction que l'on opérera à ce propos et au cours de laquelle on devra soit utiliser des outils mathématiques déjà existants, soit en créer de nouveaux.

Mais il est une autre propriété que doit posséder le modèle – elle n'est pas du ressort de la mathématique, n'est jamais parfaite et doit pouvoir sans cesse être remise en question –, c'est d'être adéquat à la situation qu'il est censé représenter. Il est rare qu'il la représente sans simplification, ni distorsion : il faut savoir en évaluer l'importance et savoir décider, par exemple, s'il est plus avantageux d'utiliser un modèle simple mais relativement peu fidèle, ou un modèle moins maniable mais plus adéquat. Plusieurs modèles différents[...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : professeur à la faculté des sciences de Paris, directeur de l'Institut de recherche sur l'enseignement des mathématiques

Classification

Pour citer cet article

André REVUZ. MATHÉMATIQUES ENSEIGNEMENT DES [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 14/03/2009

Média

Enseignement des mathématiques, N. Berline - crédits : Encyclopædia Universalis France

Enseignement des mathématiques, N. Berline

Autres références

  • MATHÉMATIQUES (DIDACTIQUE DES)

    • Écrit par
    • 6 952 mots
    • 1 média

    Les problèmes posés par l'enseignement des mathématiques ne sont pas nouveaux. Au début du siècle, Henri Lebesgue était préoccupé par les conditions de l'enseignement et de la formation des professeurs. Des efforts plus récents se sont déployés dans tous les pays. Depuis les années 1960-1970,...

  • ALEXANDRIE ÉCOLE MATHÉMATIQUE D'

    • Écrit par
    • 1 754 mots
    • 1 média
    Une des principales activités des géomètres alexandrins fut l'enseignement. Cet enseignement poursuivait, en gros, trois buts distincts : la formation d'ingénieurs et de mécaniciens ; la formation d'astronomes ; enfin celle de mathématiciens purs. D'où trois niveaux d'enseignement sur lesquels il nous...
  • CALCUL MENTAL

    • Écrit par
    • 3 879 mots
    • 4 médias
    Cependant, en plus de ces qualités générales, le calcul mental est évidemment très utilepour enseigner les mathématiques elles-mêmes. Nous en donnons ici une idée rapide en listant simplement quelques formules permettant de se familiariser avec l'efficacité de la connaissance des structures numériques....
  • CHOQUET GUSTAVE (1915-2006)

    • Écrit par
    • 968 mots

    Trop jeune pour faire partie des fondateurs du groupe Bourbaki, mais trop vieux pour avoir été leur élève, Gustave Choquet est pourtant l'un de ceux qui, après la Seconde Guerre mondiale, modernisent la mathématique et son enseignement. Né à Solesmes (Nord) le 1er mars 1915, il est, dans...

  • CUISENAIRE GEORGES (1891-1976)

    • Écrit par
    • 694 mots

    Instituteur belge, Georges Cuisenaire, comme Adolphe Ferrière et Célestin Freinet, n'était pas véritablement un théoricien : c'était un praticien de génie qui a su, à partir d'intuitions simples, créer un matériel mathématique d'une grande puissance, comme l'ont montré les usages multiples et raffinés...

  • Afficher les 13 références