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MONROE DOCTRINE DE

James Monroe, président des Etats-Unis - crédits : Library of Congress, Washington D.C.

James Monroe, président des Etats-Unis

On désigne sous l'expression « doctrine de Monroe » les principes énoncés par le président James Monroe dans son message du 2 décembre 1823 au Congrès. En réalité, Monroe n'a jamais songé à exprimer une doctrine quelconque, relative à la politique étrangère des États-Unis, mais seulement à affirmer ou réaffirmer les lignes générales de la conduite de son pays en matière diplomatique, reprenant en cela les termes essentiels du message d'adieu de George Washington, le 19 septembre 1796, et l'adresse inaugurale de Thomas Jefferson. Les principes exprimés par Monroe et ses prédécesseurs n'ont été érigés en doctrine qu'au milieu du xixe siècle, à l'occasion de conflits opposant, sur le continent américain, les États-Unis et les puissances européennes. L'expression « doctrine de Monroe » en tant que telle semble avoir été utilisée pour la première fois en 1854, dans une dépêche diplomatique américaine.

Les antécédents du message de Monroe sont maintenant bien connus grâce aux recherches des historiens américains D. Perkins et S. F. Bemis. Entre 1820 et 1823, le gouvernement des États-Unis s'inquiète de deux dangers : les ambitions russes sur l'Amérique du Nord ; les menaces d'intervention de la Sainte-Alliance sur l'ancien empire colonial espagnol. Le tsar avait, en 1821, lancé un oukase interdisant aux navires étrangers de s'avancer à moins de cent milles des côtes de l'Alaska, ce qui semblait cacher des visées impérialistes sur le Nord-Ouest du continent. Plus décisive semblait être la menace d'intervention des puissances de la Sainte-Alliance, inquiètes de la libération des colonies espagnoles d'Amérique du Sud et d'Amérique centrale. Menace réelle ou supposée ? La chose peut être discutée, mais le précédent du congrès de Vérone, donnant mission aux Français de restaurer Ferdinand VII sur le trône d'Espagne (1822-1823), peut expliquer les craintes exprimées par les diplomates des États-Unis.

Une réplique à l'impérialisme européen (1823-1895)

Devant cette double menace, et surtout celle de la Sainte-Alliance, G. Canning, alors secrétaire au Foreign Office, fit des ouvertures au gouvernement des États-Unis qui, fort embarrassé, consulta les deux anciens présidents encore en vie, Jefferson et Madison. Le besoin d'énoncer clairement les bases de la politique étrangère des États-Unis semblait à tous évident : mais il valait mieux ne pas se lier à l'Angleterre, pour ne pas se laisser entraîner par une puissance européenne, et il convenait en outre de ne pas donner à cette déclaration un caractère trop provocateur. C'est pourquoi ce qu'on appelle la doctrine de Monroe tient en quelques paragraphes à l'intérieur du long message sur l'état de l'Union, de décembre 1823.

Deux principes y sont définis : le premier affirme que le continent américain doit désormais être considéré comme fermé à toute tentative ultérieure de colonisation de la part de puissances européennes, ce qui visait à la fois les puissances de la Sainte-Alliance et la Russie, et le second, qui en découle, que toute intervention d'une puissance européenne sur le continent américain serait considérée comme une manifestation inamicale à l'égard des États-Unis. Ces derniers se posaient en défenseurs de l'intégrité et de l'indépendance du Nouveau Continent, mais ne possédaient aucun moyen de faire respecter leurs principes.

Dans l'immédiat, le message de Monroe n'eut aucun effet pratique. Si les nouvelles républiques d'Amérique centrale et d'Amérique du Sud l'accueillirent avec sympathie, elles étaient davantage portées à se tourner vers l'Angleterre, comme leur défenseur naturel, que vers les États-Unis, alors dénués de toute puissance militaire ou navale. En Europe, il passa pratiquement inaperçu,[...]

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Écrit par

  • : professeur à la faculté des lettres et sciences humaines de Paris

Classification

Pour citer cet article

Claude FOHLEN. MONROE DOCTRINE DE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

James Monroe, président des Etats-Unis - crédits : Library of Congress, Washington D.C.

James Monroe, président des Etats-Unis

Autres références

  • ADAMS JOHN QUINCY (1767-1848)

    • Écrit par Marie-France TOINET
    • 1 082 mots

    Sixième président des États-Unis, de 1825 à 1829, John Quincy Adams a eu par ailleurs une remarquable carrière de diplomate, puis, à l'expiration de son mandat présidentiel, de député.

    Né à Braintree (actuellement Quincy) dans le Massachusetts, fils aîné du deuxième président des États-Unis,...

  • AMÉRIQUE LATINE - Évolution géopolitique

    • Écrit par Georges COUFFIGNAL
    • 7 514 mots
    ...s'installa profondément dans les imaginaires collectifs, avec une double acception : celle de Monroe (non à la présence de l'Europe sur le continent), et celle dont la montée en puissance des États-Unis à partir de la fin du xixe siècle va retenir sous le nom de « doctrine Monroe » : l'ensemble du...
  • ÉTATS-UNIS D'AMÉRIQUE (Le territoire et les hommes) - Histoire

    • Écrit par Universalis, Claude FOHLEN, Annick FOUCRIER, Marie-France TOINET
    • 33 218 mots
    • 62 médias
    ...impérialiste commence à se manifester, soutenu par des milieux d'affaires, des politiciens, pour l'essentiel républicains, des théoriciens comme A. T. Mahan. La doctrine de Monroe, soigneusement défensive jusque-là, se transforme insidieusement en un instrument d'expansion confiant aux États-Unis la mission de...
  • ISOLATIONNISME

    • Écrit par Alexandre KISS
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    Ligne de conduite suivie dans les relations extérieures par un État qui entend ne pas participer à la vie politique internationale en dehors des affaires par lesquelles il s'estime être directement concerné, l'isolationnisme semble se borner essentiellement aux questions politiques et n'exclut...

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Voir aussi