FREINET CÉLESTIN (1896-1966)
La classe coopérative
La coopérative ne s'insère pas plus ou moins harmonieusement dans la vie de la classe, elle est la classe même, écrit Fernand Oury, disciple direct de Freinet et fondateur du mouvement de pédagogie institutionnelle. Matrice démocratique d'apprentissage de « haut niveau », la classe est alors ce laboratoire de savoirs où des élèves en chair et en os cherchent à comprendre le monde. On y écrit beaucoup, des journaux, des textes libres, à son gré, on y correspond, avec une ou plusieurs classes plus ou moins lointaines, seul ou en groupe, on en sort pour des enquêtes, des visites, des travaux guidés, dans des institutions, des usines, ou pour des voyages, à la rencontre des correspondants. C'est la « classe hors les murs ». Michel Barré nous donne, dans sa proximité avec Freinet, les lignes directrices de ce projet pédagogique :
– Dialectiser l'oral et l'écrit, écrire pour parler à distance ou en différé.
– L'école est du travail, c'est là que se « travaille » la vie.
– Le savoir n'est pas hiérarchique, nous « faisons ensemble ».
– L'individuel se ressource en collectif, nous savons aujourd'hui que la jeunesse se socialise en groupes. Mieux vaut des groupes « d'école » !
– Coopérer.
– S'appuyer sur « l'espace public », et donc le quartier, le village, la ville...
– Rompre avec la scolastique « médiévale » : le « par cœur », le commentaire des textes, sans retour au terrain, la « glose » en université, loin du monde.
Fernand Oury, quant à lui, résume ainsi la pédagogie Freinet : embrayer sur la vie, de l'enfant, du quartier, de la ville... ; éviter la scolastique, « tout comportement, toute réaction, tout travail spécifique au milieu scolaire » ; inventer, ne jamais répéter ! Nous enseignons à des sujets en construction ; utiliser l'acquis, « la marche et le langage parlé ont été acquis par des processus qui, même s'ils sont mal connus, se sont révélés efficaces » ; retrouver les désirs profonds ; « on ne fait pas boire un cheval qui n'a pas soif », disait Freinet ; donner du tirage, c'est-à-dire placer les élèves dans des situations où lire, écrire, compter, deviennent des nécessités.
Cette façon de faire, de penser, d'apprendre, peut se transposer dans d'autres secteurs de la recherche sociale, non plus seulement au niveau de la classe, mais aussi à celui de l'école, du centre social, de l'antenne « jeune », du foyer de placement ou d'accueil, du quartier. C'est le grand défi de l'éducation : vivre ensemble, et apprendre de la vie, être vivant, pour vivre.
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Écrit par
- Jacques PAIN : professeur des Universités en sciences de l'éducation à l'université de Paris-X-Nanterre
Classification
Média
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