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CAITANYA ou CHAÏTANYA (1485-1534)

Né dans une famille de brahmanes orthodoxes du Bengale, Caitanya (Chaïtanya) devint fameux lorsqu'il prêcha une forme nouvelle de religion de bhakti(« dévotion ardente ») dans laquelle Krishna n'était plus présenté comme un simple avatar de Vishnu, mais comme le dieu suprême dont les autres divinités (y compris Vishnu lui-même) ne sont que des manifestations secondaires.

Fondant sa prédication sur la méthode du kîrtan (kīrtana), sorte de réunion populaire où alternent prêches et chants, il insistait sur l'idée que l'amour de Krishna (et celui que le fidèle voue à Krishna) transcende les différences de castes : ainsi donnait-il l'initiation non seulement à des brahmanes mais aussi à des parias, à des femmes et même à des non-hindous (surtout des musulmans). Cette attitude faisait scandale dans les milieux traditionalistes, mais elle élargissait son audience à des milieux qui, autrement, n'eussent pas été touchés par son enseignement.

Avec le temps, le comportement de Chaïtanya devint de plus en plus extravagant : il tombait continuellement en transes, délirait en public, ne se déplaçait qu'en dansant. À diverses reprises, il expliqua, cependant, que la vraie sagesse était de ressembler aux simples d'esprit, aussi est-il difficile de savoir s'il était épileptique (comme on l'a soutenu) ou s'il agissait comme ces « fous de Dieu » que le Moyen Âge occidental a connus.

Après sa mort (il se noya en mer, face au grand temple de Purî, en Orissa), sa secte se perpétua, non sans querelles intestines ; elle est encore vivante de nos jours ; certains des maîtres de ce mouvement continuent d'initier des non-hindous et vont jusqu'à prêcher en Occident.

L'originalité de la doctrine de Chaïtanya réside surtout dans la volonté de conserver les formes traditionnelles du culte hindou en les combinant avec des éléments nettement « hérétiques » tels que l'initiation de parias ou de femmes. C'est sans doute ce qui irrita le plus les contemporains ; et, de nos jours encore, les fidèles de la secte prennent bien soin de célébrer le culte quotidien dans les formes requises par la tradition brahmanique, alors qu'ils devraient pour la plupart en être exclus, en raison de leur naissance (selon le dharma, en effet, seuls les mâles des trois premières castes ont droit à participer à la liturgie régulière).

L'influence de Chaïtanya a été grande en dehors du cercle sectaire qui le regarde comme la dernière incarnation de Krishna ; il a donné une vigoureuse impulsion à la religion de bhakti dans l'est de l'Inde ; et, à sa suite, la dévotion à Krishna tend à devenir prépondérante dans l'hindouisme, n'étant concurrencée que par le culte des divinités féminines.

— Jean VARENNE

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Écrit par

  • : docteur ès lettres, professeur à l'université de Lyon-III

Classification

Pour citer cet article

Jean VARENNE. CAITANYA ou CHAÏTANYA (1485-1534) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • BENGALI LITTÉRATURE

    • Écrit par France BHATTACHARYA, Jharna BOSE
    • 5 132 mots
    • 1 média
    Le courant poétique persiste, parallèlement à la tendance érudite : c'est le mouvement Vaishnava, qui devait s'épanouir autour du sage et savant Chaitanya. Plus que d'un mouvement littéraire, il s'agit d'un mouvement social et religieux. Bien que brahmane, Chaitanya ne reconnaissait ni les castes...
  • HINDOUISME

    • Écrit par Anne-Marie ESNOUL
    • 9 148 mots
    • 4 médias
    ...fils Viṭṭhal ; les maîtres qui ont succédé à celui-ci ont cessé d'utiliser le sanskrit et ont composé leurs œuvres religieuses en langues vernaculaires. Caitanya, presque contemporain de Vallabha, est l'une des figures les plus marquantes des mystiques du Bengale ; plutôt que la bhakti, ou même que...
  • VIṢṆU ou VISHNU ET VICHNOUISME

    • Écrit par Anne-Marie ESNOUL
    • 8 909 mots
    • 2 médias
    Presque en même temps que Vallabha vivait, d'abord au Bengale, puis en Orisā, Caitanya, qui fonda une autre secte tout imprégnée d'affectivité. Il ne parle plus de bhakti ni même de prapatti mais de preman, l'amour passionné que le dévot doit vouer à Dieu. Dans le culte, il accorde une...

Voir aussi