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MORISOT BERTHE (1841-1895)

Un peu à l'écart du groupe impressionniste, comme le remarque Paul Valéry dans un texte publié à l'occasion de la rétrospective de 1941 au musée de l'Orangerie, se tient une dame : Berthe Morisot. Dans cet écart, fait de modestie et de contraintes liées à son identité de femme, tiennent toute l'ambiguïté et les défis de ce statut nouveau : être femme et peintre. Longtemps connue comme le modèle préféré d'Édouard Manet, son beau-frère, et longtemps demeurée à l'ombre de ses confrères impressionnistes, Berthe Morisot fut pourtant considérée par eux comme leur égale. C'est la place que le musée Marmottan Monet à Paris a voulu mettre en évidence du 8 mars au 1er juillet 2012, plus de cinquante ans après la dernière rétrospective parisienne qui lui fut consacrée et dix ans après celle de Lille. Possesseur de la plus importante collection d'œuvres de l'artiste, le musée Marmottan Monet était sans doute le plus apte à retracer ce parcours, en quelque cent cinquante œuvres (peintures, aquarelles et dessins), venues également de musées internationaux et de collections privées.

L'apprentissage de la peinture

<it>Au bal</it>, B. Morisot - crédits : AKG-images

Au bal, B. Morisot

Fille du préfet de la Haute-Vienne et avant-dernière d'une fratrie de quatre enfants, Berthe Morisot, née en 1841 à Bourges, hérite à la fois des contraintes et des largesses de vue de son milieu bourgeois. Si sa mère encourage les premiers pas de sa cadette en peinture, aux côtés de sa sœur Edma, elle désapprouve son choix de s'y consacrer entièrement, au risque d'y sacrifier sa vie de femme. Mais la jeune Berthe Morisot reste inflexible, elle veut devenir peintre. À Paris où la famille s'installe en 1852, une éducation classique lui est prodiguée chez le peintre Geoffroy-Alphonse Chocarne, puis chez Joseph Guichard, un élève d'Ingres, qui lui inculque un sens de la rigueur dans la composition du dessin.

C'est Camille Corot, sur les conseils mêmes de Guichard, qui l'initie au plein air et lui fait partager cette vision nouvelle d'un paysage naturel. Entre Ville-d'Avray et Auvers, Berthe Morisot passe ses étés, de 1861 à 1863, en compagnie de peintres paysagistes : Corot, Achille Oudinot ou Charles-François Daubigny. Des œuvres des débuts, nous conservons malheureusement peu de choses ; dans son exigence, elle s'acharna à en détruire la plupart.

Par l'entremise d'Henri Fantin-Latour, avec qui elle se lie au Louvre alors qu'elle y travaille comme copiste, elle rencontre le milieu impressionniste : Manet, dont elle devient le modèle, incarnant la jeune femme brune et mélancolique du Balcon (1868). Puis Edgar Degas, Pierre Puvis de Chavannes et Stéphane Mallarmé, amis des impressionnistes, Émile Zola, l'un des premiers à soutenir Manet et Claude Monet par son œuvre de critique, nouent avec elle des liens d'amitié lors des jeudis de Mme Manet, et des mardis de Mme Morisot. Les premières œuvres et pastels réalisés au début des années 1870 (Portrait de Mme Pontillon, 1871) révèlent une compréhension du dessin et une facture qui la rapprochent de Fantin-Latour, de Manet et même de Degas.

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Écrit par

  • : docteure en histoire de l'art, professeure à l'Institut d'études supérieures des arts, chargée de cours à l'université de Paris-Sorbonne

Classification

Pour citer cet article

Emmanuelle AMIOT-SAULNIER. MORISOT BERTHE (1841-1895) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

<it>Au bal</it>, B. Morisot - crédits : AKG-images

Au bal, B. Morisot

<it>Le Berceau</it>, B. Morisot - crédits : Peter Willi/  Bridgeman Images

Le Berceau, B. Morisot

Autres références

  • FEMMES ARTISTES / ARTISTES FEMMES (C. Gonnard et É. Lebovici)

    • Écrit par Maïten BOUISSET
    • 1 239 mots

    Catherine Gonnard et Élisabeth Lebovici ont associé leur savoir et leur talent pour nous livrer le premier ouvrage thématique et historique sur les artistes femmes à Paris, de 1880 à nos jours (Femmes artistes/Artistes femmes, Hazan, 2007). Le théâtre en est d'abord le Paris très cosmopolite de...

  • IMPRESSIONNISME

    • Écrit par Jean CASSOU
    • 9 484 mots
    • 32 médias
    ...souvent du sombre et du noir. Surtout ce qui contribua à ce renouvellement de son art, l'un des plus puissants arts de peintre qui ait jamais été, ce fut la rencontre d'une créature merveilleuse dont la peinture était féminine par excellence, toute en blancheurs et en clartés, Berthe Morisot (1841-1895)....
  • MANET. LES NATURES MORTES (exposition)

    • Écrit par Barthélémy JOBERT
    • 954 mots

    Les natures mortes occupent dans l'œuvre de Manet une place considérable : un cinquième de ses tableaux relèvent spécifiquement de ce genre, qui est également présent dans certains portraits ou certaines compositions plus ambitieuses de l'artiste. L'une de ses œuvres les plus célèbres, ...

Voir aussi