ANNÉLIDES
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Annélides Achètes ou Hirudinées
Les Hirudinées ou Sangsues ont beaucoup d'affinités avec les Oligochètes. Le qualificatif d'Achètes indique bien le caractère retenu pour singulariser la classe, mais cette absence totale de soies connaît quelques exceptions.
Les Hirudinées représentent un groupe animal homogène dont les caractères essentiels peuvent être étudiés sur la Sangsue médicinale, Hirudo medicinalis.
Organisation générale
La Sangsue médicinale est un ver très contractile d'environ 12 cm de long en extension. L'extrémité antérieure du corps est pourvue ventralement d'une ventouse formant un organe de succion, entourant la bouche. Une autre ventouse ventrale, servant à la fixation, est située à l'extrémité postérieure du corps où s'ouvre dorsalement l'anus. L'ensemble du corps se compose, chez toutes les Sangsues, de 33 segments, plus un prostomium. La présence constante de ces 34 métamères est seulement identifiable par l'examen de la chaîne nerveuse qui compte toujours ce nombre de ganglions.
Parmi ces 34 métamères, 5 plus le prostomium participent à la constitution de la ventouse antérieure, 7 à celle de la ventouse postérieure ; les 21 segments restants, constituant la partie moyenne du corps, présentent une annelure superficielle qui donne l'apparence d'un nombre bien plus considérable de métamères, de l'ordre d'une centaine. Ces 21 vrais segments sont dépourvus de parapodes et de soies ; seul un genre parasite aberrant, Acanthobdella, présente une double rangée de soies sur quelques segments, marquant par là les affinités des Sangsues avec les autres Annélides. Dans la région moyenne du corps et en position fixe (les segments IX à XI), se trouve un clitellum qui, au moment de la ponte, sécrète un anneau muqueux constituant un cocon. Par ce dernier caractère, Oligochètes et Hirudinées sont parfois réunis dans la classe commune des Clitellates.
Appareils et fonctions
Le trait le plus frappant que présente une coupe transversale dans la région moyenne du corps d'une Sangsue est l'absence de cavité cœlomique. Présent chez la larve, le cœlome, au cours du développement, est envahi par un tissu conjonctif d'origine mésodermique, creusé de cavités contenant les organes génitaux, et un système compliqué de sinus.
Ce tissu particulier est appelé tissu botryoïdal ; les cellules qui le composent sont sans doute homologues des cellules chloragogènes des Oligochètes et jouent le rôle de rein d'accumulation. Le corps est revêtu d'une cuticule sous laquelle se trouve l'assise unique des cellules épidermiques qui la sécrètent. Entre l'épiderme et la couche musculaire circulaire sous-jacente se trouve une couche de tissu conjonctif riche en cellules glandulaires et pigmentaires : le derme.
Les Sangsues sont pourvues d'une musculature puissante. Outre les deux assises musculaires circulaires et longitudinales communes à toutes les Annélides, des muscles obliques et dorso-ventraux concourent à assurer des capacités contractiles exceptionnelles.
Le tube digestif est pourvu de cæcums latéraux où s'effectue la digestion des aliments. L'extrémité antérieure du canal alimentaire présente les différenciations les plus intéressantes au niveau de la bouche et du pharynx. Chez Hirudo, la bouche s'ouvre au fond de la ventouse antérieure et est armée de trois mâchoires chitineuses en forme de demi-lunes, denticulées sur leur bord libre. Le jeu de scie de ces mâchoires entame la peau des proies, dessinant une incision en Y à travers laquelle le sang est aspiré. Le pharynx est pourvu d'une puissante musculature qui assure une succion efficace. Des glandes salivaires sécrétant une substance anticoagulante, l'hirudine, débouchent à ce niveau. Ce dispositif pharyngien n'est pas du tout commun à toutes les Sangsues ; il est propre à l'ordre des Gnathobdelliformes. Dans les autres ordres, le pharynx peut être dépourvu de mâchoires ou bien constituer une trompe dévaginable.
L' appareil circulatoire chez Hirudo est composé essentiellement d'un système de quatre sinus, un dorsal, deux latéro-dorsaux et un ventral (contenant également la chaîne nerveuse) et d'un réseau capillaire extrêmement dense. Le sang est coloré en rouge par de l'hémoglobine en solution dans le plasma. L'oxygénation s'effectue à travers l'épiderme par l'intermédiaire des capillaires.
L' excrétion, outre le rôle joué par le tissu botryoïde, est assurée par 17 paires de néphridies chez la Sangsue médicinale. Le néphrostome est absent, l'extrémité interne du tube néphridien contractant des rapports étroits avec l'appareil circulatoire.
Toutes les Sangsues sont hermaphrodites mais l'appareil génital connaît diverses modalités de réalisation. Chez Hirudo, il existe 9 paires de testicules (segments XII à XX) dont les courts canaux testiculaires débouchent dans un canal déférent de chaque côté. Les deux canaux déférents latéraux s'unissent sur la ligne médiane du corps au niveau du 10e segment en un atrium. Celui-ci se différencie discalement en un pénis exsertile, cependant qu'il constitue, proximalement, une glande prostatique élaborant les spermatophores.
Les organes génitaux femelles se composent d'une paire d'ovaires, dans le 11e segment, dont les oviductes se rejoignent pour déboucher dans un vagin médian.
On a donc, au total, un orifice unique pour chaque sexe, sur chaque individu ; ce caractère distingue ainsi nettement Oligochètes et Hirudinées.
Au moment de l'accouplement, qui n'est pas toujours réciproque, le pénis d'un individu dépose dans le vagin de l'autre les spermatozoïdes groupés en spermatophores. La ponte peut avoir lieu plusieurs mois après l'accouplement ; les œufs fécondés sont groupés dans un cocon sécrété par le clitellum, où s'effectue le développement. La segmentation de type spiral aboutit à la formation d'une larve qui n'est pas du type trochophore et qui poursuivra tout son développement dans le cocon.
Le système nerveux, comme chez toutes les Annélides, se compose fondamentalement d'une chaîne nerveuse ventrale et d'un ganglion cérébroïde, reliés l'un à l'autre par un collier périœsophagien. L'équipement sensoriel comporte des terminaisons nerveuses libres et des papilles de cellules sensorielles, dont les cils traversant la cuticule sont sans doute sensibles à divers stimuli, chimiques, tactiles, etc.
D'autre part, des cellules photoréceptrices groupées en ocelles assurent la sensibilité de l'animal à la lumière.
Biologie
Habitat et nutrition
Les Sangsues sont essentiellement aquatiques, elles peuplent aussi bien les eaux douces que le milieu marin ; quelques espèces tropicales sont franchement terrestres.
Beaucoup sont des parasites hématophages, mais les espèces prédatrices ne manquent pas. La très jeune Sangsue médicinale elle-même dévore des larves d'insectes ou de petits Oligochètes.
Le plus grand nombre d'espèces sanguinivores ne se fixent sur leur hôte que pour la durée de leur repas, mais d'autres sont des parasites permanents. Beaucoup s'attaquent aux vertébrés – mammifères, oiseaux, reptiles, amphibiens, poissons – mais d'autres comme les Glossiphonia parasitent des invertébrés (mollusques).
Pour les espèces prédatrices telles que les Haemopis, les proies sont surtout les vers de terre, les limaces, les larves d'insectes.
Rapports avec l'homme
La Sangsue médicinale (Hirudo medicinalis) a fait autrefois l'objet d'un élevage intensif, en raison de son usage médical comme mode de spoliation sanguine. En fait, diverses espèces peuvent être utilisées à cette fin. En Afrique, on a eu recours au genre Limnatis, aux États-Unis à Macrobdella decora, au Japon et en Chine à Hirudo nipponica.
En face de ce rôle utile des Sangsues, on connaît dans les pays tropicaux un certain nombre d'espèces terrestres qui représentent un redoutable danger. Se laissant tomber des arbres sur leurs proies, elles provoquent de dangereuses hémorragies. Enfin, certaines petites espèces du genre Limnatis, avalées avec l'eau de boisson, se fixent dans le pharynx, provoquant des hémorragies et une toux persistante.
Systématique
Les Hirudinées comportent quelque 300 espèces réparties en 4 ordres. La structure du pharynx est le principal caractère retenu pour établir cette systématique.
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Écrit par
- Robert MANARANCHE : docteur ès sciences, maître assistant à l'université de Paris-VII
Classification
Médias
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Voir aussi
- SCISSIPARITÉ
- CIRRE
- LOMBRIC ou VER DE TERRE
- LIMNATIS
- MYZOSTOMIDES
- ACHÈTES ou SANGSUES ou HIRUDINÉES
- ARCHIANNÉLIDES
- DINOPHILUS
- ARÉNICOLE
- POLYGORDIUS
- PALOLO
- SABELLE
- POLYCHÈTES
- PERINEREIS
- CŒLOME
- OLIGOCHÈTES
- CŒLOMATES
- GEMMIPARITÉ
- SENSORIELS ORGANES
- REPRODUCTION SEXUÉE
- REPRODUCTION ASEXUÉE
- ANIMAL RÈGNE
- ANATOMIE ANIMALE
- MÉTAMÈRE ou SEGMENT
- LARVE
- SOIES, zoologie
- NÉPHRIDIES
- TROCHOSPHÈRE ou TROCHOPHORE
- CIRCULATION
- AQUATIQUE VIE
- NEREIS
- PARAPODES