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GRABAR ANDRÉ (1896-1990)

Historien de l'art byzantin d'une exceptionnelle puissance, André Grabar a façonné durant plus d'un demi-siècle la perception des documents artistiques de cette civilisation.

Né en 1896 à Kiev, il se destine très vite, après des études secondaires dans sa ville natale, à l'histoire de l'art russe et byzantin qu'il a la chance de découvrir à Petrograd (l'actuelle Saint-Pétersbourg) sous la direction de N. Kondakov, à qui il rendra hommage dans un recueil d'articles paru en 1979. Il quitte la Russie en 1920 et passe deux ans en Bulgarie comme attaché au Musée archéologique bulgare. Il fait de nombreux voyages dans ce pays, visite et photographie de nombreux monuments alors inconnus. Il en tire deux livres qui font date, une monographie sur L'Église de Boïana et La Peinture religieuse en Bulgarie qui est resté pendant plusieurs décennies un livre exemplaire. Il s'établit définitivement en France en 1922 et devient français en 1928. De 1922 à 1937, il enseigne à l'université de Strasbourg, l'une des plus stimulantes et des plus collégiales. Il est l'élève à Paris de Gabriel Millet, qui est en train de doter la byzantinologie française d'instruments matériels (chaires, photothèque) et intellectuels de valeur internationale. Durant cette période strasbourgeoise, il publie un livre remarquable, non dépassé et qui sera à la source de nombreuses études beaucoup plus récentes, L'Empereur dans l'art byzantin, qui faisait le lien non seulement entre toutes les images de la propagande impériale et religieuse, y compris les austères monnaies, mais aussi avec les textes décrivant le cérémonial de cour. Il insistera plus tard sur la ressemblance, « assez étroite », qu'il y a entre les cérémonies auliques et la liturgie religieuse, ajoutant qu'elle s'explique facilement car « il s'agit de deux cultes pratiqués au sein de la même société, qui ont été dotés d'un ensemble de rites, à la même époque, principalement au ive siècle ».

Quand il succède à Gabriel Millet comme directeur d'études à la IVe section de l'École des hautes études, en 1937, André Grabar entame la partie parisienne de sa carrière qui le mènera rapidement au Collège de France (1946), puis à l'Académie des inscriptions et belles-lettres (1956). La publication de Martyrium. Recherches sur le culte des reliques et l'art chrétien antique eut un très grand écho chez tous ceux qui se penchent sur les origines des édifices chrétiens.

Grabar y affirme le lien indissoluble entre les édifices où étaient exaltés les martyrs et l'architecture funéraire antérieure où ce culte prit naissance. Il ajoute que ce lien aboutit à deux bâtiments types, l'un occidental, l'autre oriental : « Les martyria-basiliques avec autel fixé sur le tombeau du saint définissent les principales caractéristiques de l'architecture ecclésiastique latine, tandis que les martyria à plan central dédiés au Christ en font autant pour l'Orient » Dans l'iconographie, second volet de Martyrium, Grabar discerne la même fracture Orient-Occident car, en Orient, l'icône recueille dès le vie-viie siècle la ferveur naguère dévolue aux reliques et maintenue en Occident.

Autre question complexe, que Grabar n'esquiva pas : l' iconoclasme. En 1957, il publie L'Iconoclasme byzantin. Dossier archéologique (réédité avec de gros changements en 1984).

Textes, monnaies, images sont passés au crible de sa forte érudition. L'ouvrage reste actuel, même si l'on ne sait plus comment a commencé la crise à Byzance ni ce que fut l'édit du calife Yazid II (723). Le rôle de la polémique antijuive y est déjà bien perçu, alors que l'on commence à peine à le redécouvrir.

Deux livres sur la sculpture de Constantinople embrassant, ce qui[...]

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Pour citer cet article

Jean-Pierre SODINI. GRABAR ANDRÉ (1896-1990) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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