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LOUNATCHARSKI ANATOLI VASSILIEVITCH (1875-1933)

Brillant intellectuel marxiste, auteur fécond allant du journalisme à la dramaturgie en passant par les traités d'esthétique, Lounatcharski est, du début du régime soviétique et jusqu'en 1929, commissaire du peuple à l'Éducation.

Après des études secondaires à Kiev, il fréquente l'université de Zurich et entre en contact avec le groupe Libération du travail dirigé par Plekhanov. De retour en Russie, il milite au comité de Moscou du P.O.S.D.R. avec Anna Elizarova, sœur de Lénine. Arrêté, exilé, il entre dans un cercle d'intellectuels marxistes. À la fin de sa déportation, il adhère au parti bolchevique sous l'influence de son beau-frère Bogdanov. Il émigre en Suisse, ne rentrant en Russie que pour participer à la révolution de 1905. En Suisse, il collabore aux publications bolcheviques, rompt avec Lénine en 1907, faisant partie de la fraction des « bolcheviks de gauche », partisans du boycott des élections à la troisième douma, et regroupés autour de Bogdanov ; ce sont eux qui animent, en 1909, les écoles du parti à Capri et à Bologne. Lounatcharski est alors à l'origine de la théorie de la « nouvelle religion ». Son livre, Religion et socialisme, qui fait l'effet d'une bombe dans le milieu socialiste russe, tente de définir la place du socialisme par rapport aux systèmes religieux, concept que développe Gorki sous le nom de Bogostroitelstvo (Construction-de-Dieu). Installé à Paris en 1911, internationaliste pendant la guerre, Lounatcharski amorce en 1915 sa réconciliation avec Lénine qui s'accomplit lors de la révolution de Février. En 1917, il est l'un des orateurs bolcheviques les plus populaires. Arrêté à l'issue des journées de juillet, il est nommé, après l'insurrection d'Octobre, commissaire du peuple à l'éducation, démissionne quand il apprend comment s'est déroulée la conquête de Moscou, reprend sa démission à la demande de Lénine. Resté à Petrograd alors que le gouvernement s'installait à Moscou, il est envoyé, pendant la guerre civile, comme agitateur sur tous les fronts. Partisan de la compétition des divers courants dans l'art durant la première phase de la révolution, il est un brillant inspirateur idéologique et reste lui-même un auteur fécond mais un piètre administrateur. Contraint de plier en 1924, au moment où la Troïka prend les rênes du pouvoir au détriment de Trotski, il ne parvient à préserver que le style de la politique culturelle « prolétarienne » mais non son contenu. Il se tient à l'écart des luttes internes dans le parti. Nommé en 1933 ambassadeur en Espagne, il meurt lors d'un voyage en France où il passait pour prendre ses fonctions.

— Claudie WEILL

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Écrit par

  • : chercheur à l'École pratique des hautes études

Classification

Pour citer cet article

Claudie WEILL. LOUNATCHARSKI ANATOLI VASSILIEVITCH (1875-1933) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • RUSSIE (Arts et culture) - La littérature

    • Écrit par Michel AUCOUTURIER, Marie-Christine AUTANT-MATHIEU, Hélène HENRY, Hélène MÉLAT, Georges NIVAT
    • 23 999 mots
    • 7 médias
    Face à l'hostilité générale des intellectuels, le commissaire du peuple à l'Instruction Anatole Lounatcharski (Lunačarskij, 1875-1933) confie aux futuristes la Direction des arts plastiques et son hebdomadaire Iskusstvokommuny(L'Art de la commune) dont Maïakovski devient le rédacteur en...
  • RUSSIE (Arts et culture) - Le théâtre

    • Écrit par Béatrice PICON-VALLIN, Nicole ZAND
    • 8 643 mots
    Si les futuristes veulent faire table rase de l'« héritage », le commissaire à l'Instruction publique Anatoli Lounatcharski préconise en 1923 un « Retour à Ostrovski », slogan que Meyerhold appliquera un an plus tard dans une mise en scène cinématographique de La Forêt dont tous les...
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  • SOCIALISTES ART DANS LES PAYS

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    • 12 602 mots
    • 8 médias
    ...futuristes, et après 1917 il ne cessa de souhaiter la vulgarisation de la culture, donc un art qui soit compris des masses populaires. Jusqu'en 1922, Lounatcharski défend les futuristes, mais il pense que l'art sera pratiqué bientôt par « les gens de la classe ouvrière et paysanne ». En 1925, à l'occasion...

Voir aussi