AMENDEMENT
Au sens juridique du terme, un amendement est une tentative de modification d'un texte par une assemblée délibérante. On retrouve donc dans le vocabulaire juridique le sens de correction, d'amélioration, que le mot revêt dans la langue courante. La notion juridique a un contenu précis et n'est utilisée que dans des circonstances déterminées : il faut tout d'abord qu'il y ait discussion devant une assemblée délibérante (on parle d'un amendement à un projet de loi mais jamais d'amendement à un décret ou à un arrêté) ; en second lieu, l'amendement ne peut porter que sur un texte en discussion qui n'a pas été définitivement voté ; il faut, en troisième lieu, qu'il y ait tentative de modification d'un texte préexistant. On doit distinguer l'amendement de la proposition ou du projet de loi qu'il tente de modifier. Par contre, la nature du texte en discussion importe peu ; on parlera aussi bien d'un amendement à un texte législatif (cas le plus courant) qu'à un texte constitutionnel, à la condition que le projet de constitution soit discuté par une assemblée délibérante. Ainsi, aux États-Unis, le terme « amendement » s'emploie-t-il pour qualifier une révision de la Constitution de 1787 ; on parlera du XVIe amendement, en date du 30 mars 1870, interdisant de refuser le droit de suffrage pour des raisons tenant à la race ou à la couleur, ou du XXVe amendement, en date du 11 février 1967, organisant la suppléance du président par le vice-président au cas d'empêchement de celui-là. On ne parle pas d'amendement au cas où est proposé un nouveau texte, mais de contre-projet ; celui-ci porte sur l'ensemble des dispositions du texte initial, ne s'incorpore pas au corps du projet initial, mais constitue lui-même un nouveau projet entièrement distinct de celui-ci.
Les amendements aboutissent, s'ils sont définitivement votés par l'autorité législative, à substituer à un ou à plusieurs articles du projet initial un ou plusieurs articles de texte au moins partiellement différents ; s'ils sont rejetés, les articles sur lesquels ils portaient sont maintenus dans leur teneur primitive et deviendront règles législatives si l'ensemble du projet est voté. Le droit d'amendement, c'est-à-dire le droit de proposer, pour qu'elle soit soumise au vote, une modification au texte initialement présenté, constitue une variété du droit d'initiative législative ; c'est une initiative incidente, se greffant pour ainsi dire sur l'initiative première et directe, au cours de la discussion et du vote sur celle-ci. La question majeure du règlement du droit d'amendement est évidemment celle de la reconnaissance ou du refus de ce droit aux membres des assemblées parlementaires. Le refus va de pair avec le refus du droit d'initiative législative directe à ces mêmes parlementaires, autrement dit avec la reconnaissance du monopole de l'initiative du gouvernement. Cette solution, qui est fréquente dans les constitutions de monarchie limitée et de quasi-dictature de l'exécutif (Consulat et Premier Empire français), signifie que la participation du Parlement à la législation se limite au seul pouvoir de dire « oui » ou « non » aux projets de loi gouvernementaux.
Dans les constitutions libérales et, à plus forte raison, dans les constitutions démocratiques, les parlementaires ont le droit d'initiative législative sous les formes « principale » et « incidente », donc le droit d'amendement ; pour ces constitutions, la question qui peut être posée est celle de savoir si ce même droit doit être reconnu au gouvernement ; certaines ont cru devoir ne pas le lui attribuer, par crainte qu'il n'accapare en fait cette initiative (par exemple, les constitutions françaises de l'époque révolutionnaire et la [...]
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Écrit par
- Charles EISENMANN : professeur honoraire à l'université de Paris-I
- Daniel GAXIE : professeur émérite à l'université Paris I-Panthéon Sorbonne
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