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ACTE JURIDIQUE

L'expérience humaine de l'acte juridique

On soupçonne que le problème de l'acte juridique – tel qu'on l'a posé – n'a pu recevoir une solution identique dans toutes les expériences juridiques qu'a tentées l'humanité. À cet égard, l'enseignement de l'histoire et du droit comparé peut être recueilli à plusieurs niveaux.

D'abord, il ne semble pas qu'on ait fait l'économie totale de l'acte juridique comme mode de la vie de relation : si grandes soient les ambitions totalitaires de l'État, les citoyens se voient reconnaître, ou concéder, un certain pouvoir d'action. Ce qui est vrai, c'est que leur domaine d'activité (économique ou sociale) peut être extrêmement restreint, de même que leur liberté d'entrer ou non dans certains rapports et de les aménager. En revanche, un vouloir individuel qui s'épanouirait et réaliserait par lui-même un système juridique ne s'observe pas dans la réalité concrète du droit. En d'autres termes, si les exigences de l'ordre juridique peuvent s'appesantir jusqu'à menacer la possibilité d'une activité juridique privée, l'autonomie parfaite de l'individu n'existe pas. Le problème pratique de l'acte juridique est donc celui de la marge de la liberté du particulier dans le monde du droit ; plus techniquement, de la justification de l'acte de volonté de l'individu dans le monde du droit.

On découvre alors deux espèces de justification. Ou bien les particuliers peuvent user d'une série d'actes typiques, consacrés limitativement (même si le nombre en est élevé) par le droit : c'est la solution retenue par le droit musulman. Ou bien les individus peuvent aménager librement leurs rapports, en façonnant eux-mêmes, s'il y a lieu, les instruments adéquats, sous réserve du respect de certaines exigences juridico-sociales : c'est la solution de la généralité des droits occidentaux.

Seulement, on aperçoit l'artifice de cette présentation, et que si la justification de la vente peut être du même ordre que celle du bail, il doit s'agir de tout autre chose à propos du mariage ou du testament : lors même qu'on entend reprendre pied dans le réel, on généralise les principes des contrats, on abstrait à outrance. L'acte juridique n'est donc pas un corps de règles, une institution caractérisée ; il n'est même pas un problème pratique général. Il n'est qu'une notion théorique, pièce d'une construction (scientifique), et, selon son tempérament, on y verra une conquête ou une aberration de l'esprit humain. En tout état de cause, la notion présenterait cet avantage de faire sentir à chacun non seulement qu'il vit constamment dans le droit, mais que, dans une certaine mesure, il fait le droit.

— Georges ROUHETTE

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Écrit par

  • : professeur à la faculté de droit et des sciences économiques de l'université de Madagascar

Classification

Pour citer cet article

Georges ROUHETTE. ACTE JURIDIQUE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • AVEU

    • Écrit par Robert VOUIN
    • 3 137 mots

    Le terme « aveu » (du latin advocare, appeler ou avoir recours) désignait, à l'époque féodale, l'acte par lequel le serviteur reconnaissait son maître et le maître son serviteur. Il a pris ensuite le sens général d'approbation ou consentement et, dans la langue judiciaire, celui de reconnaissance,...

  • COMMERCIAL DROIT

    • Écrit par Yves GUYON
    • 5 766 mots
    ...toujours été régis par un droit spécifique, car ils avaient recours au crédit beaucoup plus systématiquement que les simples particuliers. En effet, l' acte de commerce le plus habituel est l'achat pour revendre, ce qui implique presque toujours que le commerçant acheteur initial paye son vendeur non pas...
  • JUSTICE - Justice constitutionnelle

    • Écrit par Francis HAMON, Céline WIENER
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    Lesactes qui, dans les différents domaines que l'on vient d'énumérer, peuvent être déférés aux Cours constitutionnelles sont plus ou moins nombreux. Mais l'étendue du contentieux constitutionnel est plus vaste que la sphère de compétence des cours : les actes qui leur échappent relèvent le plus souvent...
  • MINUTE

    • Écrit par Jean FAVIER
    • 231 mots

    Forme initiale et essentielle de l'acte notarié rédigé pour instrumenter un acte juridique dont le notaire a été constitué témoin privilégié et auquel il apporte la sanction de l'autorité qui l'a investi. Malgré son caractère matériel de brouillon, souvent abrégé dans l'énoncé des innombrables...

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Voir aussi