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VILLERS-COTTERÊTS ORDONNANCE DE (1539)

La première grande étape de la justice française au xvie siècle commence avec l'ordonnance de Villers-Cotterêts. Son intérêt est quadruple. Elle marque, d'abord, la volonté de rendre l'administration accessible au peuple par le remplacement, dans les actes notariaux et judiciaires, du latin par le français. Par là, elle donne à ce dernier une force d'impact considérable qui le fera progresser, au cours des siècles suivants, au détriment de la langue d'oc et des autres parlers du royaume et en fera un admirable instrument de centralisation. Sur le plan de l'état civil religieux, l'ordonnance impose aux prêtres l'obligation, déjà recommandée depuis le milieu du xve siècle par un certain nombre d'autorités religieuses, de tenir les registres paroissiaux. La mesure est longue à s'imposer et il faut attendre la fin du xviie siècle pour qu'elle soit réellement appliquée d'une manière générale. Ces registres sont devenus l'une des bases essentielles de la rénovation des études historiques. L'ordonnance, qui comprend 192 articles, se veut, cependant, essentiellement œuvre de transformation judiciaire. Elle « laïcise » la justice, en ne laissant aux officialités religieuses que leur seule compétence dans les questions de la foi. La systématisation et la rationalisation de la justice aboutissent à la réglementation de la procédure criminelle (institution de l'instruction secrète et de la question). Enfin, dernier aspect de l'œuvre, l'ordonnance interdit toute coalition aux compagnons et aux artisans. Elle traduit ainsi la pression exercée, dès le début du siècle, sur les masses salariales, dont la condition s'était considérablement améliorée au cours de la seconde moitié du xve siècle. C'est, au total, une œuvre capitale qui demande, pour pouvoir être comprise objectivement, à être replacée dans son temps : l'augmentation de la pression démographique, le début du « plafonnement » des ressources agricoles, l'influence croissante du droit romain, la rationalisation de la société française. Mais, sous l'Ancien Régime, son application fut inégale et progressive.

— Jean MEYER

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Écrit par

  • : professeur à la faculté des lettres et sciences humaines de Rennes

Classification

Pour citer cet article

Jean MEYER. VILLERS-COTTERÊTS ORDONNANCE DE (1539) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • FRANCE (Arts et culture) - La langue française

    • Écrit par Gérald ANTOINE, Jean-Claude CHEVALIER, Loïc DEPECKER, Françoise HELGORSKY
    • 15 699 mots
    • 2 médias
    Au xvie siècle, l'autorité royale se renforce ; François Ier, par l'ordonnance de Villers-Cotterêts (1539) abolissant l'emploi du latin dans les tribunaux, inaugure une politique linguistique. Cependant on a toutes les raisons de penser que cet acte autoritaire entérine une évolution déjà...
  • MERCURIALE

    • Écrit par Jean GAUDEMET
    • 299 mots

    Terme qui désigna, dans l'histoire de l'ancienne France, tout d'abord l'assemblée générale des chambres d'un Parlement convoquée tous les quinze jours le mercredi (jour de Mercure). Le premier avocat général et le procureur général y faisaient à tour de rôle un discours sur les réformes et la discipline...

  • OUVRIER MOUVEMENT

    • Écrit par Jean BRUHAT, Bernard PUDAL
    • 11 026 mots
    • 2 médias
    La France fournit un excellent exemple de l'ancienneté et de la continuité de la politique répressive. En août 1539, les ordonnances de Villers-Cotterets font « défense à tous les compagnons et ouvriers de s'assembler en corps sous prétexte de confréries ou autrement, de cabaler entre eux pour se...

Voir aussi