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ASSOUAN HAUT BARRAGE D'

Le haut barrage d'Assouan, édifié sur le Nil en Haute-Égypte, a finalement été réalisé avec l'aide des Soviétiques alors que ses objectifs et ses dimensions avaient été initialement définis par les États-Unis, ces derniers ayant ensuite retiré leur financement pour raisons politiques. Constituant l'un des plus importants barrages du monde – avec une hauteur de 111 mètres et une longueur de 3 800 mètres – il a été inauguré le 15 janvier 1971, après onze années de travaux, par le président égyptien Anouar al-Sadate et le président du Soviet suprême Nikolaï Viktorovitch Podgorny. Sa capacité de stockage est de 169 milliards de mètres cubes d'eau. L'ancien barrage d'Assouan, construit en 1902 (en aval) et surélevé en 1933, durant l'époque de la domination britannique, ne stockait que 6 milliards de mètres cubes d'eau.

Comme toute construction de grande ampleur, cet ouvrage fait l'objet de vifs débats et critiques. Les bénéfices majeurs sont d'une part la protection de l'Égypte contre des crues catastrophiques et les sécheresses, et, d'autre part, un développement de l'agriculture de 50 p. 100 en vingt ans, l'irrigation permettant d'accroître les surfaces cultivées et le nombre de récoltes par an (jusqu'à trois). La production hydroélectrique, de l'ordre de 8 milliards de kilowattheures par an (assurée par douze générateurs d'une capacité de 175 mégawatts chacun), est très rentable mais représente aujourd'hui moins de dix pour cent de la consommation du pays.

Bien que vital pour le développement du pays, ce barrage a induit des impacts négatifs importants qui ont été très médiatisés. Tout d'abord, la mise en eau du réservoir a nécessité le déplacement de 100 000 Nubiens et le transfert spectaculaire, sous l'égide de l'U.N.E.S.C.O., d'une vingtaine de monuments, dont les temples d'Abou-Simbel et de Philae devenus célèbres et contribuant à l'attraction touristique de l'Égypte. Parmi les conséquences environnementales, on peut citer : le dépôt de limon qui s'accumule dans le lac réservoir (diminuant d'autant sa capacité) et une eutrophisation des eaux ; un appauvrissement des terres arables, en aval du barrage, celles-ci ne bénéficiant plus des limons fertiles du Nil (d'où une utilisation d'engrais qui provoque une pollution des eaux) ; une augmentation de la bilharziose et de la malaria ; l'érosion du delta du Nil (qui ne représente toutefois que 20 p. 100 du problème analogue du Mississippi).

L' inconvénient majeur et peu connu est l'évaporation de 15 milliards de mètres cubes d'eau par an sur le lac qui atteint près de 7 000 kilomètres carrés, ce qui correspond au débit moyen de la Seine. Un ouvrage moins coûteux, situé plus en amont et stockant 50 milliards de mètres cubes, aurait rendu l'essentiel des services du haut barrage en réduisant de plus de moitié cette évaporation. Mais, politiquement, Égyptiens et Russes ne pouvaient pas proposer un ouvrage moins prestigieux que le projet américain.

Le volume total d'eau s'écoulant sur le bassin du Nil et concernant neuf pays est en moyenne de 120 milliards de mètres cubes par an dont 50 milliards de mètres cubes s'évaporent (30 dans les immenses marécages du Sud Soudan, 5 dans les barrages du Nord Soudan et 15 dans le lac d'Assouan). Ces pertes étaient acceptables dans les années 1980 où l'utilisation de l'eau était essentiellement le fait de l'Égypte (moins peuplée qu'aujourd'hui). Ce n'est plus le cas aujourd'hui avec les demandes croissantes des pays situés en amont, notamment l'Éthiopie, l'Ouganda, la Tanzanie, le Kenya et le Soudan.

On peut espérer, dans les prochaines décennies, réduire fortement les pertes du Sud[...]

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Pour citer cet article

François LEMPÉRIÈRE. ASSOUAN HAUT BARRAGE D' [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • ABU SIMBEL

    • Écrit par Christiane M. ZIVIE-COCHE
    • 1 974 mots
    • 6 médias

    De tous les sites de la Nubie égyptienne (ou basse Nubie), celui d'Abu Simbel (déformation d'Ibsamboul qui était son nom au xixe siècle) est certainement le plus connu. Son sauvetage spectaculaire, réalisé sous les auspices de l'U.N.E.S.C.O. lors de la construction du grand barrage d' Assouan...

  • AFRIQUE (Structure et milieu) - Géographie générale

    • Écrit par Roland POURTIER
    • 21 496 mots
    • 29 médias
    ...régule la sortie des eaux du lac Victoria depuis 1954 et pourvoit l'Ouganda en électricité. Entre Khartoum et Assouan, le Nil franchit six cataractes. L'aménagement du haut barrage d'Assouan a entraîné la formation du lac Nasser, vaste étendue d'eau longue de 500 kilomètres, qui modifie localement...
  • ÉGYPTE - Géographie

    • Écrit par Éric DENIS
    • 5 800 mots
    • 6 médias
    ...égyptienne. L'Union soviétique soutient l'Égypte nassérienne lâchée par les puissances occidentales après la nationalisation du canal de Suez en 1956. Le gigantesque barrage-poids (Sadd al-Ali) est inauguré en 1971 après onze années de chantier. L'Égypte s'affranchit des caprices du Nil : elle dispose...
  • ÉGYPTE - L'Égypte républicaine

    • Écrit par Universalis, Sandrine GAMBLIN, Robert SANTUCCI
    • 38 768 mots
    • 16 médias
    ...coup d'État, ne renoncent pas à maintenir leurs contacts avec Le Caire. Ils tentent de reprendre les choses en main par le biais de l'aide économique. Le projet du haut barrage d'Assouan leur en donne l'occasion. Cet ouvrage monumental doit permettre une régularisation pluri-annuelle des crues du...
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