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DÉCOUVERTES GRANDES

Conséquences des grandes découvertes

Il s'agit d'abord du champ des connaissances : progrès de la cosmographie (rotondité de la Terre ; découverte de nouveaux astres), de la climatologie (mécanisme des alizés et des moussons), de l'océanographie, de la botanique et de la zoologie, de la cartographie et de la géographie, de l'ethnologie ; connaissance de nouvelles civilisations, reconnaissance d'une certaine équivalence entre elles ; l'idée d'une certaine relativité de nos croyances.

Il peut y avoir là les racines d'une crise religieuse. Par contre, si les puissances musulmanes sont peu touchées, l'Église a trouvé de nouveaux champs, immenses, d'expansion. La chrétienté universelle ne se confond plus avec l'Europe. Enfin l'Église doit résoudre les nouveaux problèmes moraux posés par les transformations sociales : élévation du niveau de vie du fait de la consommation généralisée du sucre de canne et des épices et, plus tard, du tabac et de la pomme de terre ; développement prodigieux de la classe des grands négociants et armateurs, recrudescence de l'esclavage.

Les transformations sociales dépendent étroitement des conséquences économiques de l'expansion. L'exploitation des mines du Mexique et du Pérou faisant suite à la déviation vers Lisbonne par les Portugais de l'or africain de Mina, or qui, jadis, passait par le Sahara et alimentait le commerce des Barbaresques, provoque un afflux de métaux précieux sur les marchés espagnols et portugais, puis européens.

La hausse des prix européens qui en découle, sensible jusque vers 1640, bouleverse les fortunes et la structure de l'économie. Les profits s'accroissent. Les salaires réels tendent à baisser. La possession des terres perd de son importance dans la composition des fortunes. L'augmentation de la richesse mobilière, conséquence du commerce, active la vie économique. De nouvelles formes de paiement et, par suite, de crédit se développent : lettre de change, billet à ordre, rentes, titres d'État. De nouvelles industries se créent : les commerçants font travailler des centaines d'artisans pour leur compte, leur fournissant la matière première et les débouchés et leur demandant seulement du travail : c'est le capitalisme commercial où la gestion et les profits de la production sont entre les mains des commerçants. Et comme la fortune terrienne occupe maintenant le second rang, c'est la monnaie que l'on recherche d'abord, nécessaire aux grandes entreprises, terrestres ou maritimes, à la guerre aussi, instrument de la puissance de l'État dans le monde.

Enfin, et surtout, les grandes découvertes ont bouleversé les routes commerciales. En Asie d'abord, où les Portugais s'emparent de la vie maritime et vont obliger les peuples jaunes à développer leurs échanges vers l'intérieur des continents : ainsi l'Indochine, que la vie maritime mettait sous l'influence de l'Inde, va être livrée à l'influence de la puissance continentale chinoise. En Europe surtout, où l'Atlantique acquiert l'importance qu'avait jusqu'alors la Méditerranée, et où des ports, tels que Venise et Gênes, sont appelés à perdre leur primauté, non sans un long délai d'ailleurs (après 1530 Venise s'industrialise et retrouve une certaine prospérité). Les flottes, qui accostent une fois l'an en Europe, font de Séville et Lisbonne les centres de redistribution des produits coloniaux. Les commerces triangulaires s'établissent : par exemple, quincaillerie et tissus embarqués au Portugal sont échangés contre les esclaves de l'Angola, que remplaceront sur les côtes du Brésil les caisses de sucre à destination de l'Europe.

Et les États riverains de l'Atlantique voient se lever successivement, selon leur histoire et leurs difficultés[...]

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Écrit par

  • : professeur d'histoire à l'université de Nanterre et à l'Institut des hautes études de l'Amérique latine

Classification

Pour citer cet article

Frédéric MAURO. DÉCOUVERTES GRANDES [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

1400 - 1500. Poussée ottomane et grandes découvertes - crédits : Encyclopædia Universalis France

1400 - 1500. Poussée ottomane et grandes découvertes

Grandes découvertes, XV<sup>e</sup>-XVII<sup>e</sup> siècle - crédits : Encyclopædia Universalis France

Grandes découvertes, XVe-XVIIe siècle

Premier voyage des frères Polo - crédits : AKG-images

Premier voyage des frères Polo

Autres références

  • AFRIQUE (Histoire) - De l'entrée dans l'histoire à la période contemporaine

    • Écrit par Hubert DESCHAMPS, Jean DEVISSE, Henri MÉDARD
    • 9 654 mots
    • 6 médias
    L'arrivée des Européens sur les côtes transforme profondément les conditions de vie du continent, jusque dans l'intérieur, même si les Européens se sont presque toujours bornés à installer des comptoirs sur une étroite bande côtière, leurs exigences commerciales, par le relais de souverains ou de commerçants...
  • AMÉRINDIENS - Amérique du Nord

    • Écrit par Marie-Pierre BOUSQUET, Universalis, Roger RENAUD
    • 10 380 mots
    • 6 médias
    Les étrangers à la peau claire, au visage velu, qui débarquèrent au xvie siècle, furent reçus sans hostilité ni peur. Les Indiens allèrent vers eux, chargés de présents, les invitant dans leurs villages, dans l'esprit de partage et d'échanges culturels qui existaient entre les tribus. Ils ne les prirent...
  • AMÉRIQUE (Histoire) - Découverte

    • Écrit par Marianne MAHN-LOT
    • 4 807 mots
    • 6 médias

    Étymologiquement le mot « Amérique » vient d'Amerigo, prénom de Vespucci. Il a été inventé par Martin Waldseemüller qui, dans sa Cosmographie (1507), proposa d'appeler Amérique la « quatrième partie du monde », prétendument découverte par le Florentin.

    La « découverte de...

  • ANGO JEAN (1480-1551)

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    Armateur dieppois. Issu d'une famille d'origine rouennaise, fils d'armateur — son père arme le premier navire français connu qui ait atteint Terre-Neuve (voyage de La Pensée, 1508) —, Jean Ango transforme l'entreprise paternelle, déjà importante, en une grande affaire capitaliste...

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