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GARDE NATIONALE

Le 13 juillet 1789, le comité permanent des électeurs décide la constitution d'une force armée de 48 000 hommes pour assurer le maintien de l'ordre dans la capitale. Son commandement est confié le 15 juillet à La Fayette. Elle reçoit le nom de garde nationale. Dans la plupart des villes et dans de nombreux villages, des milices sont formées sur ce modèle. Leur recrutement varie selon les régions mais est surtout réservé à l'origine aux citoyens aisés. Le décret du 12 juin 1790 leur donne un règlement uniforme. Le décret du 14 octobre 1791 décide que le service dans la garde sera obligatoire pour les citoyens actifs de dix-huit à soixante ans.

Au cours d'une révolution dont le cadre essentiel est Paris, comment la garde nationale de la capitale n'aurait-elle pas joué un rôle décisif ? Elle est encore une force d'ordre lorsqu'elle tire sur les manifestants au Champ-de-Mars, le 17 juillet 1791. Mais, divisée à la veille du 10 août entre modérés et révolutionnaires, la garde nationale bascule, le jour de l'émeute, dans le camp de la Révolution. L'assassinat de son chef, Mandat, est moins déterminant que l'abstention d'une large couche de la bourgeoisie parisienne, découragée par l'attitude de Louis XVI.

Désormais la garde nationale accentue son caractère démocratique. Tous les citoyens y entrent. À Paris, la garde devient l'émanation des sections : plus de 110 000 hommes en janvier 1793. Le parti girondin s'inquiète. Il est renversé par les canonniers d'Hanriot le 2 juin 1793. En revanche, la garde ne bouge pas, par suite de l'impéritie du même chef, Hanriot, lors du 9 thermidor 1794. Sa reprise en main par les « propriétaires » apparaît nettement lorsqu'elle écrase l'insurrection populaire de prairial an III. La garde glisse même au royalisme dans treize sections parisiennes. La troupe doit tirer sur elle pour sauver la Convention, le 13 vendémiaire (5 oct. 1795). Son règne s'achève ; celui de l'armée commence.

Mises en veilleuse sous le Consulat, réorganisées par un sénatus-consulte de 1805, les gardes nationales ne retrouvent quelque activité qu'en 1809, lors du débarquement anglais à Walcheren (Fouché mobilise celles du Nord), puis en 1814, au moment de l'invasion de la France. La garde parisienne est d'ailleurs la dernière rappelée. Son rôle est modeste lors de la défense de la capitale, malgré l'épisode de la barrière de Clichy, exalté plus tard par Horace Vernet.

La monarchie restaurée s'appuie sur elle contre une armée soupçonnée de bonapartisme jusqu'à la guerre d'Espagne en 1823. L'ordonnance du 30 septembre 1818 étend l'institution à toute la France, mais son recrutement reste limité aux contribuables les plus imposés. On ne peut toutefois éviter la contagion libérale. Le 29 avril 1827, la garde parisienne manifeste contre Villèle, à la faveur d'une revue passée par Charles X. Supprimée, elle participe aux combats des Trois-Glorieuses, mais sur les barricades.

Louis-Philippe s'appuie sur elle en 1830 pour monter sur le trône. Elle devient, par la loi du 22 mars 1831, le principal soutien du régime. L'élection des sous-officiers et officiers subalternes lui est rendue (les officiers supérieurs sont nommés par le roi sur une liste de dix candidats). L'obligation de l'uniforme en écarte les éléments populaires. Les citoyens les plus aisés y forment les compagnies d'élites : grenadiers, voltigeurs, artilleurs. Le caractère bourgeois de l'institution est souligné par la caricature et la satire (Monsieur Prudhomme d'Henri Monnier). Son rôle n'en est pas moins capital : ces boutiquiers, ces rentiers, ces pères de famille maîtrisent les émeutes de 1832 et de 1834. Plusieurs fois par an, le roi les passe en revue et leurs cris le renseignent,[...]

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Écrit par

  • : professeur à l'université de Paris-IV-Sorbonne

Classification

Pour citer cet article

Jean TULARD. GARDE NATIONALE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • COMMUNE DE PARIS

    • Écrit par Édith THOMAS
    • 6 497 mots
    • 8 médias
    ...bombardements. Mais il s'avère bientôt que le gouvernement dit de la Défense nationale n'est nullement décidé à la lutte, tandis que le peuple de Paris réclame la guerre à outrance. 380 000 hommes constituent la garde nationale, groupée dans ses conseils de famille et dirigée par le Comité central.
  • JUIN 1848 JOURNÉES DE

    • Écrit par Émilien CONSTANT
    • 823 mots

    L'élection, les 23 et 24 avril 1848, d'une Constituante républicaine modérée a été ressentie comme une défaite par l'extrême gauche révolutionnaire. Au cours de la journée du 15 mai, des émeutiers, peut-être manipulés par la police, réclament une intervention en...

  • POLICE SOUS LA RÉVOLUTION ET L'EMPIRE

    • Écrit par Vincent DENIS
    • 3 221 mots
    • 1 média
    ...démissionné le 14 juillet 1789, la police est exercée par le Département de police de la Commune provisoire, assisté par une nouvelle force publique, la garde nationale, composée de citoyens et d'anciennes unités chargées du maintien de l'ordre. Dans chacun des soixante districts qui se partagent la ville,...
  • RÉVOLUTION & EMPIRE, armée

    • Écrit par Jean-Paul BERTAUD
    • 8 894 mots
    • 1 média
    ...des bataillons de volontaires nationaux de 1791. Quelque temps avant la fuite du souverain, puis au moment de l'événement, des volontaires issus de la Garde nationale s'étaient levés pour défendre le régime contre une attaque éventuelle des puissances européennes. L'Assemblée légalisa ces levées et demanda...

Voir aussi